Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
G

Guyane française (suite)

Le climat est équatorial ; les températures varient peu : 25 °C en janvier et 27 °C en octobre ; les amplitudes journalières sont cependant plus grandes. Les pluies, abondantes sur la côte, diminuent en allant vers l’intérieur ; les vents sont dominés par l’alizé du nord-est. On peut distinguer quatre saisons : une petite saison des pluies de décembre à février, une petite saison sèche de mars à avril, une grande saison des pluies d’avril à juillet et une nouvelle saison sèche d’août à décembre. La forêt équatoriale et la savane se partagent le pays.

M. R.


L’histoire

Ce sont les Espagnols qui abordèrent les premiers en Guyane. Vers 1503, quelques colons s’installèrent à Cayenne. L’attrait du légendaire Eldorado, que l’on situait dans ces parages, entre l’Amazone et l’Orénoque, et qui passait pour regorger d’or, explique les explorations faites par Raleigh à la fin du xvie s. Cet imaginaire Eldorado sera responsable des désillusions que la Guyane provoquera chez les premiers colons, qui viendront y chercher une fortune rapide et qui, par dépit, feront à cette colonie une mauvaise réputation qui lui sera préjudiciable.

Les Français apparurent en Guyane dès les premières années du xviie s. Plusieurs essais de colonisation furent tentés ; ainsi, en 1624, des marchands rouennais installèrent des comptoirs à Sinnamary, mais toutes ces entreprises ne subsistèrent pas longtemps ; toutefois, elles firent de la Guyane la plus ancienne des colonies françaises d’outre-mer.

Durant tout le xviie s., des compagnies, plus ou moins éphémères, se formèrent à Rouen ou à Paris pour l’exploitation de la colonie, et la ville de Cayenne fut fondée en 1643. Mais les révoltes des Indiens maltraités par les colons, l’insuffisance des gouverneurs comme Charles Poncet de Brétigny († 1645) et la rivalité anglaise et hollandaise furent les causes principales de la précarité de ces premiers établissements.

C’est Colbert qui entreprit la colonisation systématique. En 1663, il fonda la Compagnie de la France équinoxiale pour exploiter la Guyane. Son directeur, Antoine Lefebvre de La Barre († 1688), y débarqua l’année suivante avec une puissante escadre ; toutefois, les guerres continentales de Louis XIV eurent leurs répercussions jusque dans ces lointaines contrées, et les Français disputèrent la Guyane aux Anglais et aux Hollandais ; en 1677, enfin, la colonie devint définitivement française.

Son développement économique sera très lent. Dans la première moitié du xviiie s., de bons gouverneurs, les Orvilliers, aidés par les pères jésuites, encouragèrent la culture, surtout celle du café et du cacao. Les principaux centres agricoles furent Kourou, Oyapock, Roura et Rémire. Mais l’expulsion des Jésuites en 1762 fut catastrophique pour le pays ; en effet, les Indiens qu’ils avaient pu réunir s’enfuirent dans la forêt pour échapper à la tutelle plus dure des colons.

Pour remédier à cette perte, le duc de Choiseul décida, en 1763, d’y expédier 12 000 personnes, chiffre énorme et sans proportion avec les débouchés offerts par la Guyane. L’entreprise tourna à la catastrophe. L’expédition avait mal été préparée avec des chefs incapables ; les émigrants, ramassés au hasard, se découragèrent en ne trouvant à leur arrivée aucune des facilités promises, car le mythique Eldorado était toujours dans les esprits. Décimés par la faim et les épidémies, des 12 000 hommes débarqués deux ans auparavant, il n’en restait pas un millier en 1765. Ce désastre contribua à accréditer dans l’esprit public que l’homme blanc ne pouvait pas vivre en Guyane.

Sous Louis XVI, cependant, de bons intendants rétablirent en Guyane une certaine prospérité en assainissant l’Administration, en asséchant les terres et surtout en introduisant la culture des poivriers et des girofliers. En 1794, la Convention y abolit l’esclavage, qui fut d’ailleurs rétabli quelques années plus tard, et en fit un territoire de relégation. Billaud-Varenne, Collot d’Herbois, Pichegru, victimes de la « guillotine sèche », furent les plus célèbres des prisonniers politiques qui y séjournèrent. En 1809, une flotte anglo-portugaise s’empara de la Guyane, qui ne fut rendue à la France qu’en 1817.

Au xixe s., tous les essais de colonisation échouèrent, et l’abolition de l’esclavage en 1848-49 acheva d’y ruiner toute vie économique, en provoquant l’abandon des plantations et des travaux de drainage. L’installation d’un bagne par Napoléon III en 1852 accentua le côté répulsif de la Guyane. Toutefois, en 1855, on découvrait enfin l’or de l’Eldorado. Bien exploité à partir de 1870, il assura un temps à la Guyane une relative mais artificielle prospérité. L’épuisement des gisements au xxe s. laissa le pays démuni.

Le bagne, qui reçut de 1852 à 1939 plus de 70 000 prisonniers — dont le plus célèbre fut le capitaine Dreyfus, enfermé à l’île du Diable —, ne permit pas une bonne exploitation de la colonie. Après la Première Guerre mondiale, l’opinion publique, alertée par les enquêtes d’Albert Londres (1884-1932), réclama la suppression du bagne, qui fut décrétée en 1938, mais la guerre empêcha son exécution, et ce n’est qu’en 1947 que le bagne cessa d’exister.

Depuis 1848, les Guyanais avaient le statut de citoyens français et, en 1877, ils étaient représentés au Parlement. Divisée en 1930 en deux territoires, la Guyane et l’Inini, la colonie devint en 1946 un département. Actuellement, elle souffre d’un manque de main-d’œuvre et de la faiblesse du marché commercial. En 1966, la France a construit à Kourou un centre d’études spatiales et un champ de tir pour remplacer celui d’Hammaguir, au Sahara.

P. P. et P. R.


La population

La Guyane comptait près de 30 000 habitants en 1945 et 45 000 en 1970. La population a donc relativement peu augmenté malgré le net excédent des naissances sur les décès (le taux de natalité dépasse 40 p. 1 000 ; le taux de mortalité avoisine 20 p. 1 000). La cause en est le départ de la quasi-totalité des anciens forçats et la forte émigration de l’élite locale. Environ 80 p. 100 de la population vivent sur la côte, en particulier dans l’île de Cayenne, qui regroupe près de deux tiers du total ; les communes côtières en réunissent 30 p. 100, et les communes de l’intérieur 5 p. 100 seulement.

La population est assez hétérogène, formée pour plus de moitié de métis ou de créoles avec d’importantes minorités européenne, noire, indienne, anglaise (originaire de Sainte-Lucie), chinoise. Les Indiens, divisés en tribus, vivent d’une économie fondée sur la pêche et la chasse.