Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Guerre mondiale (Première) ou Grande Guerre de 1914-1918 (suite)

L’armée française dispose alors d’une gamme de généraux au tempérament très divers, mais qui, pour beaucoup, sont des hommes de premier plan. Son chef, Pétain*, est assisté de trois remarquables commandants de groupe d’armées, Fayolle*, polytechnicien prudent et méthodique, Maistre, le vainqueur de la Malmaison, travailleur acharné, étranger à tout esprit d’intrigue, et Castelnau*, le seul de l’équipe Joffre de 1914 qui soit encore en place.

Les armées ont pour chefs A. Baucheron de Boissoudy (1864-1926), le « sanglier des Ardennes », brillant commandant de la 43e D. I. à Verdun en 1916 ; H. M. Berthelot (1866-1927), ancien aide-major de Joffre en 1914, qui quitte le front français en octobre 1918 pour entrer à Bucarest à la tête des troupes françaises du Danube ; M. E. Debeney (1864-1943), qui réussit en mars à bloquer l’avance allemande en Picardie et laissera dans son livre la Guerre et les hommes (1937) un témoignage sur la qualité de son commandement ; Gouraud* l’Africain ; A. E. Hirschauer (1857-1943), officier du génie, l’un des pionniers de l’aéronautique ; G. L. Humbert (1862-1921), ancien adjoint de Lyautey*, premier commandant de la fameuse division marocaine ; Mangin*, enfin, dont les ordres du jour fracassants jalonnent l’avance de nos troupes...


Victoires alliées dans les Balkans, au Moyen-Orient et en Italie

Dans les deux camps, la primauté du front français, où se joue l’ultime décision de la guerre, laisse d’abord peu de place aux fronts extérieurs dans les préoccupations des belligérants. Tout changera quand, au cours de l’été, le fléau de la balance aura penché définitivement du côté des Alliés, qui chercheront alors à relancer les fronts extérieurs pour accélérer leur victoire et garantir leurs positions politiques et économiques.

Dans les Balkans, Guillaumat, qui a remplacé Sarrail à Noël 1917, se consacre à la réorganisation des forces assez disparates des armées alliées d’Orient. Rappelé en France après la percée allemande du Chemin des Dames pour diriger la défense de Paris, il a pour successeur Franchet d’Esperey*, qui, dès son arrivée le 19 juin, prépare l’offensive dont il attend la rupture du front germano-bulgare (v. Macédoine). Déclenchée le 15 septembre au Dobro Polje, elle contraint les Bulgares à déposer les armes dès le 29. Exploitant aussitôt sa victoire. Franchet d’Esperey lance ses troupes sur Sofia, occupée le 16 octobre, Belgrade, où les Serbes font leur rentrée triomphale le 1er novembre. L’Autriche et l’Allemagne du Sud sont menacées, tandis que Berthelot, qui avait été le chef de la mission française en Roumanie, fonce sur Bucarest, qu’il atteint le 1er décembre.

Alors que Clemenceau ne croyait guère à la valeur stratégique des Balkans, Lloyd George était au contraire convaincu de celle du Moyen-Orient, où il entendait assurer à son pays une solide position politique et économique. Aussi a-t-il consacré à ce théâtre d’importants moyens militaires. Ils permettent aux Anglais de relayer en Iran la présence russe défaillante et de tenter en outre un raid sur Bakou. Mais l’essentiel de ces forces est confié en Palestine au général Allenby, qui, le 19 septembre, bouscule les troupes germano-turques de Liman von Sanders. Un détachement français entre à Beyrouth le 7 octobre, et, le 25, les Britanniques sont à Alep. Le 1er octobre, les Arabes de Fayṣal et de Lawrence avaient libéré Damas, où Ḥusayn s’était proclamé « roi des pays arabes », tandis que les forces de Mésopotamie fonçaient vers le nord et entraient à Mossoul le 4 novembre. Depuis cinq jours, le feu avait cessé sur les fronts du Moyen-Orient. Dans un immense désarroi, le gouvernement turc venait, en effet, d’obtenir un armistice qui avait été signé le 30 octobre par les seuls Britanniques « au nom des Alliés » dans la rade de Moudros (ou Moúdhros). Le 13 novembre, une escadre alliée arrivait à Istanbul.

En Italie, enfin, où la défaite de Caporetto avait finalement donné un coup de fouet au pays, un immense effort de redressement moral, économique et militaire a été accompli. En juin, Diaz repousse brillamment une offensive autrichienne sur la Piave, mais attend son heure pour frapper le grand coup que lui demande Foch avec insistance. L’édifice disparate de l’armée austro-hongroise, dont les diverses nationalités sont en train de proclamer leur indépendance, donne des signes certains de désagrégation. Le 20 octobre, les Hongrois se mutinent dans le Vulsugana ; le 24, Diaz lance son offensive sur Vittorio Veneto ; le 3 novembre, les Italiens sont à Trente et à Trieste. Dans la soirée du même jour, un armistice est signé par les Autrichiens dans la villa Giusti, près de Padoue ; le 25 octobre, la Hongrie avait réclamé son indépendance, c’est-à-dire la rupture avec Vienne.


L’effondrement du IIe Reich

Le 14 août, au conseil de la Couronne de Spa, la faillite de la politique allemande était apparue au grand jour. À l’échec militaire de Ludendorff s’ajoutait maintenant la menace — devenue réalité le 29 septembre pour les Bulgares — de l’effondrement des alliés de l’Allemagne. Le 3 octobre, Guillaume II remplace le chancelier Georg von Hertling par le prince Max de Bade, qui prend aussitôt contact avec Wilson pour tenter d’obtenir sa médiation sur la base des 14 points. Après plusieurs échanges de notes, Wilson signifie le 23 octobre à Berlin son désir de traiter avec un pouvoir « démocratique ». Dès lors, la situation politique va se dégrader très rapidement. Le 26, Ludendorff est congédié et remplacé par le général Groener ; le 3 novembre éclatent à Kiel les premières mutineries de la flotte, qui se propagent à Hambourg, à Cologne et à Berlin. Le 7, la république est proclamée à Munich. La veille, à la demande instante de Hin-denburg, une délégation d’armistice présidée par Matthias Erzberger avait quitté Berlin ; elle franchit les lignes françaises le 8 et signe le 11 l’armistice à Rethondes. Entre-temps, Guillaume II avait abdiqué, et la république avait été proclamée à Berlin par Scheidemann, tandis que Max de Bade transmettait ses pouvoirs à Ebert.