Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
G

Guderian (Heinz) (suite)

Dès 1922, Guderian oriente sa recherche sur la motorisation, puis, après un stage dans l’armée suédoise, où, pour la première fois, à quarante et un ans, il peut voir des chars évoluer sur le terrain, il prend en 1930 la tête du 3e groupe de transports à Berlin. Il en fait aussitôt un groupement blindé expérimental où il conjugue l’action d’unités de motocyclistes, d’automitrailleuses, de canons antichars et de chars encore simulés (ils sont interdits par le traité de Versailles). Il écrira plus tard : « Nous partions d’une évidence : l’organisation future de l’arme blindée devrait lui permettre d’emporter la décision dans la bataille ; elle ne pourrait donc revêtir que la forme de divisions puis de corps blindés. » C’est le principe fondamental de la nouvelle arme blindée allemande, à la création de laquelle Guderian consacre désormais tous ses efforts comme chef d’état-major de l’inspection des troupes motorisées (1931), puis du commandement des troupes blindées (1934). Le changement d’appellation traduisait une révolution d’une tout autre ampleur : depuis 1933, Hitler est au pouvoir et saisit immédiatement l’importance du char. « Voilà ce qu’il me faut », s’écrie-t-il à la première présentation que lui fait Guderian de l’unité blindée. Le 15 octobre 1935, les trois premières Panzer (divisions blindées) sont créées, et Guderian prend la tête de la 2e à Würzburg. Pour diffuser ses idées, il publie alors deux petits livres, dont l’un surtout (Achtung ! Panzer, 1937) fera date.

Général en 1936, Guderian est nommé en février 1938 commandant du premier corps blindé (le 16e), avec lequel il entre en Autriche le mois suivant. Dès lors, sa carrière s’identifie avec le triomphe de la Blitzkrieg allemande ; chef du 19e corps blindé en Pologne (1939), puis en France, où il le conduit en 1940 de Sedan à Dunkerque, puis de Rethel à la Suisse, il commande en Russie la IIe armée blindée. Après la digression que Hitler leur impose sur Kiev, les Panzer de Guderian arrivent épuisés devant Moscou, et, le 20 décembre 1941, leur chef est brutalement congédié par le Führer pour avoir osé demander un répit pour sa troupe. Au bout de quatorze mois de retraite, Guderian est cependant rappelé par Hitler après le désastre de Stalingrad, et nommé le 1er mars 1943 inspecteur des troupes blindées. Il discerne vite qu’il est trop tard pour rétablir la supériorité allemande, mais la séduction qu’exerce sur lui Hitler lui fait refuser de prendre part au complot du 20 juillet 1944. Elle explique sa nomination, le lendemain, au poste de chef d’état-major de l’armée, alors surtout chargé de la direction des opérations sur le front russe ; elle explique aussi la terrible responsabilité qu’il porte dans les sanglantes représailles du putsch. Durant huit mois, Guderian affrontera les prétentions insensées de Hitler, qui intervient sans cesse dans son commandement et le congédie finalement le 28 mars 1945.

Prisonnier des Américains, il rédige à leur demande des études sur l’emploi des blindés et sur l’organisation du haut commandement. Libéré en 1950, il se retire en Bavière, où, fort de ses bons rapports avec les Américains, il exerce une influence certaine sur les milieux dirigeants allemands. En 1951, il publie ses Mémoires (Erinnerungen eines Soldaten) ainsi que deux plaquettes : Kann Westeuropa verteidigt werden ? (1950) et So geht es nicht (1951), où il fait de la restauration de la souveraineté de l’Allemagne la condition de son réarmement pour la défense de l’Europe. Après sa mort paraîtra en 1956 sous le titre Panzer - Marsch ! un dernier ouvrage résumant la pensée de Guderian sur l’emploi des blindés.

P. D.

➙ Blindé / Guerre mondiale (Seconde).

Gueldre

En néerl. Gelderland, province de l’est des Pays-Bas ; 5 014 km2 ; 1 534 000 hab. Capit. Arnhem.


La plus vaste des provinces néerlandaises est aussi celle dont les paysages sont les plus variés. Sa division historique en quatre « quartiers » (celui de Roermond fait maintenant partie du Limbourg) se calquait dans une large mesure sur de grandes unités naturelles :
— le quartier d’Arnhem, ou de la Veluwe, comprenait surtout un ensemble de hauteurs sableuses d’origine morainique ; pays de landes et de forêts, la Veluwe n’a jamais été très peuplée, sauf sur ses bordures, mais son intérêt résidentiel et touristique apparaît considérable aujourd’hui ;
— le quartier de Nimègue (en néerl. Nijmegen) s’étendait sur les terres basses argileuses des vallées du Rhin, du Waal et de la Meuse ; l’endiguement des fleuves et le drainage des marécages en ont fait un pays d’agriculture intensive où dominent prairies et vergers (ceux-ci en Betuwe notamment) ;
— le quartier de Zutphen comprenait le sud de la plaine sableuse qui s’élève progressivement à l’est de l’IJssel ; une polyculture assez pauvre a longtemps caractérisé cette région, où le développement récent de l’élevage et de l’industrie a introduit de nouvelles sources d’activité.

L’importance historique de la Gueldre s’appuyait surtout sur les courants commerciaux qui parcouraient ses grands fleuves, en particulier les trois bras du Rhin mettant en relation Rhénanie, Hollande et nord des Pays-Bas. Jusqu’au xviiie s., les principaux centres urbains étaient surtout des villes de marchands et de bateliers, sur le Waal (Nimègue, Tiel), le Rhin (Arnhem), l’IJssel (Zutphen) ou la côte du Zuiderzee (Harderwijk). L’affaiblissement du rôle d’intermédiaire de la région et le caractère tardif de son industrialisation (xxe s.) ont amené le déclin relatif de beaucoup de ces villes : Tiel, Zutphen et Harderwijk n’atteignent pas 30 000 habitants aujourd’hui. En revanche se développaient aux xixe et xxe s., sur de petits noyaux préexistants, de nouveaux centres urbains, desservis par les voies de communication terrestres et pourvus d’industries variées : Doetinchem, Winterswijk (25 000 à 30 000 hab.), Ede (plus de 30 000 hab. pour la ville) et surtout Apeldoorn. Cette vaste commune de l’est de la Veluwe a connu un essor prodigieux depuis 1870-1880, sa population décuplant en moins d’un siècle ; ses ressources reposent à la fois sur une industrialisation importante (chimie, papier, textile, métallurgie), sur une fonction de ville de repos et de retraite, de centre culturel et touristique, et sur le développement de commerces et de services utilisés aujourd’hui par une grande partie de la Veluwe ; la ville elle-même compte maintenant près de 100 000 habitants.