Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
G

Guadeloupe (suite)

Jusqu’au début des années 1960, la population résidait surtout à la campagne, vivant du travail de la terre ; les villes et les bourgs ne jouaient qu’un rôle limité. L’effort économique et social entrepris après 1958 et le surpeuplement des campagnes ont provoqué l’essor et le développement des agglomérations de Basse-Terre et de Pointe-à-Pitre. Préfecture du département, ville administrative et port bananier, centre de commerce pour la côte sous le vent et la moitié sud de la côte au vent, Basse-Terre (16 000 hab.) est à la tête d’une agglomération s’étendant sur les communes de Baillif, de Gourbeyre et de Saint-Claude, station résidentielle climatique de montagne sur les pentes de la Soufrière. Pointe-à-Pitre et ses banlieues, situées au centre de l’archipel, regroupent 60 000 habitants. L’agglomération se transforme rapidement grâce à la mise en œuvre d’un plan de rénovation urbaine et de lutte contre l’habitat insalubre ; elle s’étend surtout sur le territoire des Abymes, dont la population a plus que doublé de 1954 à 1967. Port sucrier, monopolisant également les importations du département, tête de ligne des relations avec les dépendances, centre de commerce de gros et de détail rayonnant sur tout l’archipel, centre administratif et universitaire avec le vice-rectorat et la sous-préfecture, elle essaie de diversifier ses activités par l’implantation d’une zone industrielle à la Pointe Jary. La présence de l’aérodrome international du Raizet, dans la proche banlieue, contribue au développement de cette agglomération animée et pittoresque.


La mise en valeur et l’économie actuelle

Après quelques années d’essai (entre 1635 et 1660) de colonisation blanche fondée sur la petite exploitation de cultures vivrières et de coton, la Guadeloupe s’est consacrée à des cultures commerciales destinées à la métropole : canne essentiellement pour le sucre, le rhum et la mélasse ; café, cacao, plantes aromatiques, indigo, tabac. Les plantations sucrières connaissent leur apogée entre 1759 et la Révolution.

La canne à sucre demeure la principale production, mais les structures agraires, les techniques de production, les rapports sociaux sont bouleversés. Fixés à la fin du xixe s., les caractères de l’économie sont restés les mêmes jusque vers 1960, la banane pour l’exportation remplaçant toutefois progressivement les cultures secondaires de plantation (café, cacao, aromates) à partir de 1930 dans le sud de la Basse-Terre.

Le sucre et la banane sont donc les deux seules ressources locales notables ; le premier représente environ 55 p. 100 des exportations ; la banane, un peu plus du tiers ; le rhum, un peu moins de 10 p. 100. La canne à sucre est une monoculture à Marie-Galante, en Grande-Terre, dans le nord-est de la Basse-Terre, de Sainte-Rose à Capesterre. Sa production est entre les mains de cinq grosses sociétés, métropolitaines et martiniquaises, qui possèdent 38 000 ha de terres et qui fabriquent 80 p. 100 du tonnage de sucre dans sept usines. Il n’existe qu’une seule société guadeloupéenne, dont la production est limitée. Ces sociétés exploitent les meilleures terres de leur domaine en faire-valoir direct et confient le reste à de petits exploitants ou colons qui ne disposent en moyenne que d’un à trois hectares ; ces colons trouvent des ressources complémentaires en travaillant comme ouvriers agricoles sur les terres de la société, surtout au moment de la récolte. Les moyens planteurs indépendants sont très peu nombreux dans ce secteur de l’activité agricole. À Marie-Galante, où la réforme foncière a été effectuée et où les planteurs sont de petits propriétaires indépendants, le traitement de la canne est effectué dans une usine modernisée, propriété du département. Cette île produit environ 12 000 t de sucre.

La production sucrière connaît un ensemble de difficultés économiques et sociales qui ont été amplifiées par les calamités naturelles. De 185 000 t en 1965, elle est tombée au-dessous de 150 000 t en 1968 et en 1969, alors que le Ve Plan prévoyait une production de 220 000 t. Deux usines ont fermé depuis 1965 ; les rendements restent trop bas, le coût de la main-d’œuvre s’élève, les luttes sociales sont aiguës. Cependant, la métropole assure un marché privilégié au sucre.

La banane devait dans une certaine mesure prendre le relais de la canne à sucre, mais les plantations ont été dévastées par des cyclones consécutifs. On a récolté 76 000 t en 1965 après le cyclone Cléo, 93 000 t en 1967, 130 000 t en 1969, alors que la production pourrait dépasser 200 000 t sur les 8 650 ha de terres plantées dans le sud montagneux de la Basse-Terre et de la côte au vent jusqu’à Capesterre. Cette production devrait cependant assurer des revenus plus élevés et plus réguliers que la canne. La propriété est moins concentrée et se trouve entre les mains des Guadeloupéens. La métropole achète la totalité de la production à un tarif préférentiel.

Les cultures vivrières (racines tropicales, légumes), pratiquées par de petits exploitants en général indiens, déclinent et sont très insuffisantes. L’élevage moderne pour le lait et la viande n’est pratiqué que par une grande société sucrière. Les structures foncières opposant latifundia et microfundia ne sont pas favorables à une diversification des cultures. Le travail de la terre souffre d’une désaffection presque générale.

Depuis une dizaine d’années, l’État s’est engagé dans un effort important de développement économique et social. Celui-ci porte sur l’infrastructure (communications, énergie, équipements collectifs), l’éducation (scolarisation assurée à 95 p. 100), l’aide sociale (allocations diverses, logement). Il en résulte un transfert important de fonds publics et une hypertrophie du secteur tertiaire, qui représente 62,5 p. 100 du produit intérieur brut. Par contre, le développement des industries reste très limité (16,8 p. 100 du produit intérieur brut en 1967). Parmi celles-ci, la construction est la plus prospère (11,4 p. 100 du produit intérieur brut), et elle est en grande partie financée par des fonds publics. Le tourisme est la seule activité notable qui se développe depuis 1962. On compte 600 chambres de classe internationale.