Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
G

Grillons (suite)

Mode de vie

Suivant les espèces et les conditions climatiques, la vie larvaire de ces Insectes comprend de cinq à douze stades, à la suite desquels s’effectue une dernière mue qui permet aux ailes, élytres et organes copulateurs d’atteindre une taille et une forme définitives (holométabolie). Leur adaptation aux différents climats est remarquable. Parmi toutes les espèces étudiées, plus de six types de cycles vitaux sont observés, comportant chacun une synchronisation particulière des stades avec les saisons, et le déterminisme de cette synchronisation peut être de nature variée : longueur du jour, température, etc. Un arrêt de développement, la « diapause », permet chez beaucoup d’espèces la survie face aux conditions défavorables, dans l’œuf ou au cours de la vie postembryonnaire. Certaines espèces, au contraire, se développent de façon continue, comme le Grillon du foyer (Gryllus domesticus) ; d’autres se reproduisent deux fois par an, la génération d’hiver possédant une diapause (Gryllus rubens d’Amérique du Nord). À l’opposé, pour la Courtillière, ou Grillon-Taupe (Gryllotalpa gryllotalpa), une génération complète demande deux années.


Relations avec l’Homme

Il est rare que des Grillons soient de grands prédateurs. Tout au plus a-t-on signalé quelques pullulations irrégulières. En effet, des expériences de laboratoire ont montré que les Grillons n’étaient, en général, pas aptes à se regrouper en bandes et à migrer, comme le font certains autres Orthoptères parmi les Acridiens, même dans le cas où ils montrent une sensibilité au groupement, se traduisant par exemple par un changement de coloration ou une modification de la croissance (Gryllus bimaculatus). [V. groupe (effet de).]

Différentes espèces de Grillons constituent de bons animaux de laboratoire, car leur élevage est facile. Ils ont donné lieu à des recherches fondamentales de génétique : hybridation interspécifique, évolution, croissance, etc.

Le Grillon trouve sa place depuis fort longtemps dans les traditions populaires et le folklore. En Chine, les combats de Grillons sont célèbres. Les animaux combattent sous l’œil des parieurs, grâce à des méthodes fort ingénieuses. La coutume remonte probablement à l’époque Song (xe-xiie s.). Il suffit de stimuler l’agressivité de l’animal de façon appropriée, après l’avoir isolé ; les Grillons vivant en groupe restent en effet de mauvais combattants et perdent leur agressivité. La victoire est purement « psychologique », puisque le vaincu fuit, quitte le terrain et refuse ensuite tout combat, à moins que son propriétaire ne le rééduque.

S. F. B.

Grimm (les frères)

Jacob (Hanau 1785 - Berlin 1863) et Wilhelm (Hanau 1786 - Berlin 1859), philologues et écrivains allemands.


Avant que la postérité les réunît, ils avaient vécu et travaillé en étroite union. Quand Wilhelm se maria en 1825, ils continuèrent à habiter la même maison ; c’est ensemble aussi qu’ils poursuivirent leur carrière à Göttingen et, à partir de 1841, à Berlin. Ils signèrent ensemble aussi bien la protestation des « Sept de Göttingen » contre le roi de Hanovre en 1837 que leur œuvre la plus célèbre, leur recueil de contes ; ensemble aussi, ils fondèrent leur dernière grande entreprise : un dictionnaire de la langue allemande.

Élevés à Kassel par une mère sans fortune, veuve peu d’années après leur naissance, ils eurent, jeunes encore, des emplois de bibliothécaires et de secrétaires. L’un comme l’autre, ils furent des collectionneurs passionnés, en particulier de tout ce qui se rapporte aux légendes populaires ; ils ont fixé le premier texte écrit d’un grand nombre de contes qu’ils avaient recueillis de la tradition orale. « C’est dans ces légendes et dans ces contes que le peuple a inscrit sa foi et ce qu’il tient pour la nature des choses ; c’est là son lien à la religion, c’est un trésor dont il ne saisit pas bien la nature, mais qui lui apporte la félicité. » Ainsi s’exprimait Jacob Grimm en 1808 dans le Journal pour ermites (Zeitung für Einsiedler) que publiait, à Heidelberg, le poète Achim von Arnim. Arnim lui-même travaillait depuis 1803 avec son ami Clemens Brentano à la collecte des poèmes populaires. Les deux poètes se retrouvaient alors chez Joseph von Görres, qui, après avoir été révolutionnaire et républicain « cisrhénan », était devenu professeur à Heidelberg, où il a, le premier, rassemblé et publié les récits de la mythologie germanique. Joseph von Görres et le juriste Friedrich Karl von Savigny, que Jacob Grimm avait déjà entendu à l’université de Marburg en 1802, ont été les maîtres à penser de ce groupe romantique de Heidelberg, au sein duquel les frères Grimm ont commencé leurs recherches et leurs publications. Görres, mythologue et politique, et Savigny, fondateur de l’école historique du droit (historische Schule), accordaient une valeur éminente aux traditions populaires et à tout ce qui, venu du fond des âges, se transmet avant ou à côté de l’écriture.

C’est dans cette atmosphère que les frères Grimm ont commencé leur œuvre d’historiens de la langue et leur enquête sur les antiquités nationales de l’Allemagne, qui ont fait d’eux les fondateurs de la philologie allemande.

La première partie de cette œuvre est constituée par les Contes d’enfants et du foyer (Kinder- und Hausmärchen, 2 vol., 1812-1814) et par les Légendes allemandes (Deutsche Sagen, 2 vol., 1816-1818). Ces deux ouvrages passent, à juste titre, pour un monument national. Pourtant, ils sont l’œuvre personnelle des frères Grimm. Les notes que ceux-ci avaient prises en écoutant les gens du peuple sont, le plus souvent, schématiques et sans couleur. Les récits, rédigés en particulier par Wilhelm Grimm, sont beaucoup plus développés ; rien n’a été changé à la donnée, mais les formes et la couleur sont l’apport déterminant du conteur.

Dans la philosophie comme dans la philologie des frères Grimm, tout ce qui est attesté par l’usage constitue la vérité d’une langue qui évolue et se développe comme un être vivant. La Grammaire allemande, de Jacob Grimm, publiée en quatre volumes de 1819 à 1837, a posé les fondements — entre autres, la loi de Grimm — des études de syntaxe et de morphologie, germaniques ou comparées.