Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
G

Grèce (suite)

Période hellénistique (iiie - iie s. av. J.-C.)

À l’avènement d’Alexandre, Athènes voit disparaître sa primauté. Alexandrie* devient la capitale de l’hellénisme, où les Ptolémées rassemblent autour d’eux artistes et savants. Pergame, Antioche, Pella, Rhodes et Syracuse sont, elles aussi, des foyers de la civilisation grecque. L’époque alexandrine se caractérise par son goût de la recherche scientifique et érudite. La science connaît son apogée avec Euclide* (iiie s.) et Archimède* (iiie s.), tandis qu’en philosophie se dessinent les courants du stoïcisme (Zénon de Kition, Chrysippe, iiie s.) [v. stoïciens], de l’épicurisme (Épicure*, ive-iiie s.) et du scepticisme (Pyrrhon, ive-iiie s.) [v. sceptiques]. Avec Polybe*, auteur d’une œuvre neuve et puissante, l’histoire prend une nouvelle orientation ; quant à la géographie (Eratosthène, iiie s.), elle présente à son tour une rigueur toute scientifique.

Parallèlement à ce développement de disciplines qui gardent un aspect relativement austère tant dans leurs formes d’exposition que dans leur nature même, érudits et savants s’exercent à des travaux de philologie et d’exégèse (Aristophane de Byzance, iiie-iie s. ; Aristarque de Samothrace, Cratès de Mallos, iie s.). Cette attitude critique n’entraîne pas toutefois une stérilité de la littérature proprement dite. On constate, au contraire, l’épanouissement d’une poésie où l’art est considéré comme une fin en soi et où le principal but recherché est le pur plaisir esthétique. Les écrivains se détournent de la vie sociale et politique. Philétas (ive-iiie s.), Callimaque (iiie s.) et Apollonios de Rhodes (iiie s.) sont les meilleurs poètes de l’époque, mais ils appartiennent bien à leur temps par leur amour des pièces concises et travaillées, à la facture savante et souvent artificielle. L’inspiration naïve ou disciplinée apparaît rarement, sauf, dans une certaine mesure, chez le plus grand de tous. Théocrite (iiie s.).

Peut-on parler d’une décadence ? Sans doute un bon nombre d’œuvres restent remarquables. Mais le souffle manque. Des esthètes ont remplacé les créateurs. On est en présence d’une civilisation qui succombe peut-être sous le poids d’une tradition trop lourde.


Période romaine (ier s. av. J.-C. - ive s. apr. J.-C.)

Lorsque Rome s’érige en capitale du monde antique, le génie grec se montre inférieur à lui-même et donne le jour à une littérature d’imitation qui tente, non sans mal, de ranimer et d’entretenir les traditions de l’âge classique. À bien des égards, l’époque alexandrine, quelles qu’aient été ses limites, avait été féconde. Désormais, les œuvres sont plus l’expression d’une expérience lentement acquise que le fruit d’une pensée et d’un art véritablement originaux.

Si le siècle d’Auguste est avant tout un siècle d’histoire et de critique, qui va de l’honnête compilation (Diodore de Sicile, Denys d’Halicarnasse) à un effort réel de synthèse scientifique (Strabon), le siècle des Antonins (96-192) se présente comme une tentative souvent heureuse pour tirer parti des leçons du passé. L’art oratoire brille avec Dion Chrysostome, et philosophes et moralistes (Plutarque*, Epictète, Marc Aurèle) laissent une œuvre durable, tandis que l’histoire est illustrée par Arrien et Appien. Quant à la prose satirique, elle trouve son maître en Lucien, dont l’indépendance d’esprit et la spirituelle critique n’exerceront malheureusement pas sur la littérature à venir l’influence qu’on pourrait en attendre.

Dès le iiie s., en effet, le déclin semble définitif. Avec Dion Cassius, l’histoire n’est plus qu’un récit consciencieux et sans relief ; l’éloquence reste une pâle imitation d’un art déchu ; seul le roman (Jamblique) apparaît comme une création durable, cependant que, par une sorte de renouvellement de la philosophie, Plotin et Porphyre prouvent encore la vitalité de l’esprit grec. En fait, l’époque comprend beaucoup d’écrits, mais bien peu d’écrivains. Il devait appartenir aux apologistes chrétiens du ive s. (Eusèbe* de Césarée, Grégoire* de Nazianze, saint Basile*, saint Jean* Chrysostome) d’apporter le témoignage d’une renaissance littéraire : mais, dès lors, c’est à Byzance que se poursuivent les destins de l’hellénisme.

A. M.-B.

➙ Antiquité classique (les grands courants littéraires de l’).

 A. et M. Croiset, Histoire de la littérature grecque (E. de Boccard, 1887-1899 ; nouv. éd., 1951 ; 5 vol.). / W. von Christ, Geschichte der Griechischen Literatur (Munich, 1888-89 ; 6e éd. rev. par W. Schmid et O. Stählin, 1911-1926 ; 2 vol.). / F. Robert, la Littérature grecque (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1955 ; 6e éd., 1967). / A. Lesky, Geschichte der griechischen Literatur (Berne, 1958 ; 2e éd., 1963). / A. Bonnard, Civilisation grecque (La Guilde du livre, Lausanne, 1959 ; 3 vol.). / J. Defradas, la Littérature grecque (A. Colin, 1960). / W. Nestle et W. Liebich, Geschichte der griechischen Literatur (Berlin, 1961). / R. Flacelière, Histoire littéraire de la Grèce (Fayard, 1962). / J. Laloup, Dictionnaire de littérature gréco-latine (Éd. universitaires, 1969). / B. P. Reardon, Courants littéraires grecs des iie et iiie siècles après J.-C. (Les Belles Lettres, 1971).


La musique dans la Grèce antique

L’histoire musicale de la Grèce antique nous est assez bien connue, mais les données en sont dispersées et hétéroclites. Par exemple, une harpe minoenne datant de 1425-1400 avant J.-C., découverte dans une tombe non loin du palais de Knossós, avait été prise en 1906 par sir Arthur J. Evans pour un bateau. On a des représentations d’instruments et de danses sur des vases peints. Toute la littérature gréco-latine est riche d’allusions et d’attestations.


Parce que la musique est « sons » et « nombres », elle est une science commune aux grammairiens, aux philosophes et aux mathématiciens

Le Pseudo-Plutarque écrit : « Puisque les meilleurs grammairiens définissent le son comme un ébranlement de l’air perceptible à l’ouïe [...] la seconde des sciences consacrée aux sons [...] c’est la musique » (De la musique, i, 2). Le rhéteur romain Marcus Fabius Quintilien (ier s. apr. J.-C.) dit : « Sans la musique, la grammaire ne peut être complète, puisqu’elle doit traiter de mètres et de rythmes » (Institutio oratoria [la Formation de l’orateur], I, iv, 4).