Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Grèce (suite)

Le Néolithique récent de la Thessalie débute à la fin du Ve millénaire avec l’arrivée, dans le golfe Pagasétique, d’envahisseurs venus d’Asie Mineure ou de Thrace. Ceux-ci détruisent la culture de Sesklo et s’installent sur les rives du golfe ; ils établissent leur capitale près de Dimini (Dhimínion), sur une acropole où la demeure du chef, du type « à mégaron », est enfermée dans une sextuple enceinte.


Le bronze ancien et l’hégémonie des Cyclades

Le Néolithique récent évolue sous l’influence des cultures anatoliennes, qui utilisent le métal plus de deux millénaires avant que la Grèce ne le connaisse. Dans la première moitié du IIIe millénaire, le métal, sous la forme du cuivre, est introduit dans les Cyclades, sans doute apporté par des colons venus d’Anatolie, à la recherche de cuivre et aussi d’étain.

C’est quelques siècles plus tôt, vers la fin du IVe millénaire, qu’a été fondée Troie* : place forte étroite, ceinte d’un puissant rempart, c’était la citadelle d’un peuple peut-être venu du sud de l’Anatolie par la mer, sans doute destinée à détendre les voies commerciales entre la mer Égée et la mer Noire, et plus encore entre les Balkans et l’Asie Mineure. L’apparition à Troie de populations porteuses de métal se situe dans un contexte semblable à celui qui voit l’expansion des Anatoliens dans les Cyclades et, de là, en Grèce, où les mines d’étain de la région de Kirrha (Kírra), en Phocide, furent mises en valeur vers cette époque. Des établissements nouveaux sont fondés sur les côtes grecques, tel celui de Lerne, qui succède au village néolithique : ainsi débute sur le continent la période dite « du bronze », appelée ici Helladique ancien.

Dans le même temps, des groupes d’Anatoliens s’installent en Crète* orientale, autour du golfe de Mirabéllou, où ils fondent l’établissement de Vassilikí, dans lequel on a retrouvé une grande demeure, la « maison sur la colline », sans doute la résidence d’un chef. La Crète avait été peuplée dès le début du Néolithique, le plus ancien établissement connu ayant été exhumé sous la cour du palais de Knossós (ou Cnossos), où il remonte à la fin du VIIe millénaire. La révolution métallurgique venue d’Anatolie donne naissance à une civilisation nouvelle en Crète, le minoen, qui, dans sa phase ancienne, est marquée surtout autour du golfe de Mirabéllou et, au sud, dans la plaine de la Messará, où l’on élève près des villages des tombes collectives circulaires dites « à tholos ». Cette civilisation, qui est socialement fondée sur le clan et le village, est surtout caractérisée par une céramique originale et de beaux vases de pierre, qui ont certainement subi initialement une influence égyptienne.

L’hégémonie appartient cependant aux Cyclades, où les nouveaux venus, qui se sont imposés souvent par la violence, comme on le voit par l’incendie de l’acropole protocycladique de la « colline des amandiers » à Náxos, constituent la première thalassocratie de l’histoire. L’île de Sýros devient l’un des centres prédominants, et sa maîtrise maritime s’exprime dans l’art par la présence, dans les tombes, de récipients circulaires à petits rebords, dits « poêles à frire », où sont gravées des représentations de vaisseaux aux formes élancées. Il est possible que les Cycladiens aient été alors les fourriers du commerce avec le monde syrien et l’île de Chypre.

Cependant, l’insécurité de cette époque est marquée par l’apparition de fortifications, où sont utilisées parfois des tours semi-circulaires, comme à Lerne ou à Khalandhrianí, à Sýros. C’est d’ailleurs par la violence que se termine la brillante culture de l’Helladique ancien II (v. 2200 av. J.-C.). L’Helladique ancien III, qui lui succède, avec ses demeures à abside, les fosses appelées bothros, ménagées dans le sol des maisons et dont on ignore la destination exacte, ses vases allongés à deux anses (depas amphikypellon), présente des normes culturelles différentes, dont l’origine doit se trouver en Anatolie, peut-être dans la région de Troie. Dans le même temps, Troie II a succédé à Troie I, détruite par un incendie, mais le passage s’est fait sans solution de continuité culturelle entre les deux établissements. La destruction de Troie II est un peu antérieure à celle des sites de l’Helladique ancien II, et l’on trouve des similitudes entre les cultures de Troie III et celles de la Grèce contemporaine.


Le bronze moyen et l’hégémonie minoenne

La civilisation de l’Helladique ancien disparaît dans la violence vers 2000 av. J.-C., sans doute à la suite de l’arrivée des Indo-Européens en Grèce. Pendant plus de quatre siècles, la Grèce continentale va connaître une civilisation assez terne : l’architecture la plus caractéristique consiste en maisons de plan rectangulaire en briques crues élevées sur fondations en pierre, dans le sous-sol desquelles les morts sont ensevelis dans des cistes, en position repliée (de jockey), comme on l’observe en particulier à Orchomène, en Béotie.

En Messénie, une cité comme celle qui a été exhumée par les Suédois près de Málthi prend une certaine importance et s’entoure d’un rempart de pierre, mais c’est là un cas exceptionnel. La poterie caractéristique est grise ou jaune, aux formes simples, aux profils aigus, à l’éclat métallique ; son origine doit se trouver en Asie Mineure, et elle porte le nom de minyenne, qui lui fut donné par Heinrich Schliemann.

Les Cyclades perdent leur hégémonie, et c’est Mêlos (Mílos), avec Phylacopi (Fylakopí), qui prend le pas sur Sýros. La cité est aussi enfermée dans d’épais remparts, comme l’établissement d’Aghía Iríni, dans l’île de Kéa, où a été exhumé le plus ancien « sanctuaire » de la Grèce et des Cyclades. Vers 1700, les Crétois étendent leur influence sur la mer Égée et la Grèce, préparant l’avènement du monde mycénien.

Le minoen moyen, qui débute en Crète vers 2000 av. J.-C. et se termine cinq siècles plus tard, voit l’apogée de la civilisation de la grande île. L’établissement de pouvoirs centralisés et de monarchies de caractère théocratique se concrétise par l’édification de palais, en partie détruits par un tremblement de terre vers 1730 et reconstruits plus spacieusement en terrasses, à flanc de coteau, centrés autour de grandes cours rectangulaires. Il ne semble pas qu’on puisse retenir une hypothèse récente selon laquelle les « palais » seraient de vastes complexes culturels ; c’étaient certainement des centres administratifs et des résidences princières ; le fait semble certain pour Knossós et Phaistos ; il est plus difficile de se prononcer pour Mália, où les tablettes administratives font défaut, et pour Ghournía, petite cité industrielle édifiée autour d’un petit palais de style provincial. Quant au palais de Zákros, selon le fouilleur Nikhólaos Pláton, ce serait un établissement knossien ouvert vers l’Orient.