Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
G

Ghāna (république du) (suite)

Développée par les Anglais dès le début du siècle, la culture du cacao a fait la fortune du pays achanti, suscitant le développement d’une moyenne bourgeoisie de planteurs, qui utilise partiellement de la main-d’œuvre immigrée. La production record a été atteinte en 1963 (428 000 t) ; depuis, la chute continue des cours a entraîné une légère régression (411 000 t en 1970), mais le Ghāna demeure le premier producteur mondial.

La pêche, pratiquée traditionnellement par les Fantis du littoral, demeure une ressource importante (100 000 t par an), mais ne couvre pas les besoins nationaux.

Les ressources minières, exploitées depuis longtemps, constituent un poste important des exportations et sont concentrées dans le Sud-Ouest, qui est déjà la zone du cacao : manganèse, bauxite, diamant, or. Mais l’extraction de ces minéraux est en stagnation ou en recul. Les exportations de manganèse sont tombées de 400 000 à moins de 200 000 t et le Ghāna est passé du troisième au septième rang des producteurs mondiaux. La bauxite a stagné (340 000 t en 1970). Le diamant a régressé de 3,5 à 2,5 M de carats, l’or de 30 à 22 t.

Le régime de Nkrumah avait multiplié les industries de transformation, surtout sous forme d’entreprises d’État ou mixtes (en 1966, 50 entreprises d’État et 12 d’économie mixte), dont certaines ont été depuis rétrocédées au secteur privé. Le traitement du cacao à Takoradi et à Tema, les sucreries, les brasseries, les minoteries, le textile, les usines de mécanique (dont deux usines de montage d’automobiles japonaises), la verrerie, la chimie et les industries pharmaceutiques à Accra, une amorce d’industrie lourde (aciérie de 30 000 t) représentent les principales activités de ce secteur.

Mais la réalisation décisive devait être celle du barrage de la Volta, avec la centrale hydro-électrique d’Akosombo, inaugurée en 1966, qui a permis, dès 1968, de doubler la production d’énergie, jusque-là fournie uniquement par du combustible importé. De 339 GWh en 1959, la production d’électricité est passée à 3 TWh. Cette énergie alimente les industries d’Accra et du nouveau port et centre industriel de Tema ; elle doit alimenter tout l’Ouest jusqu’à Takoradi et Koumassi et être partiellement exportée au Togo et au Dahomey.

Dans l’immédiat, l’électricité d’Akosombo est consommée pour moitié par l’usine d’aluminium (Volta Aluminium Company) créée par les firmes américaines Kaiser et Reynolds pour traiter de l’alumine importée (en 1970, 110 000 t d’aluminium, le dixième en valeur des exportations ghanéennes).

Le Ghāna dispose d’un bon réseau de moyens de transport, dont 1 300 km de voies ferrées desservant la zone riche du Sud-Ouest. Le port d’Accra (aujourd’hui relayé par le nouveau port de Tema) assure l’essentiel du commerce extérieur, le port occidental de Sekondi-Takoradi réalisant une partie des exportations de cacao.

La politique d’industrialisation de Nkrumah avait été fondée pour partie (mais non exclusivement, à la différence de la plupart des États africains voisins) sur le recours aux prêts extérieurs, pour partie également sur la mobilisation des ressources fournies par le cacao.

Dès l’époque anglaise, le système des Marketing Boards, destiné à couvrir les producteurs de cacao contre les variations des cours mondiaux, avait permis à l’Administration, qui achetait le cacao aux producteurs à un prix stable, de réaliser d’importantes plus-values en période de haute conjoncture, plus-values placées sous forme de réserves sur le marché financier de Londres.

Mais l’épuisement de ces réserves, coïncidant avec une chute persistante des cours, avait mis le Ghāna, aux prises par ailleurs avec les charges d’une dette extérieure croissante, dans une situation financière de plus en plus difficile, dont les conséquences ne furent pas étrangères à la chute de Nkrumah.

La persistance de cette conjoncture défavorable n’a pas permis au nouveau régime de résoudre les problèmes qui avaient conduit à la chute de son prédécesseur. Les dévaluations successives ont accéléré la hausse des prix intérieurs ; la liquidation de certaines entreprises d’État a aggravé le chômage, et l’expulsion massive des étrangers (Africains non ghanéens, Libano-Syriens, Indiens) en 1970 ne l’a pas supprimé et a créé d’autres difficultés économiques. Le redressement temporaire de la balance commerciale et du budget n’a pu être maintenu. Le retour au libéralisme (en matière de transfert des bénéfices des entreprises étrangères) et la charge de la dette extérieure (dont le service représente plus de 10 p. 100 de la valeur des exportations) ont aggravé le déficit de la balance des comptes.

Il reste qu’avec un produit intérieur brut de 238 dollars par habitant (1968), une infrastructure médicale relativement solide, une scolarisation poussée (plus de 90 p. 100 des enfants de 6 à 11 ans en 1965 ; trois universités : l’université du Ghāna à Legon, près d’Accra, et les universités de Koumassi et de Cape Coast), le Ghāna est un des pays les plus riches et les plus évolués de l’Afrique de l’Ouest. La présence d’une bourgeoisie africaine anglicisée dans le Sud, renforcée par les « parvenus » de l’indépendance, enrichie par le commerce intermédiaire (les femmes d’affaires, les célèbres « mammies », y jouent un rôle non négligeable), favorable à l’émancipation politique, mais résolument hostile au socialisme, explique largement l’évolution politique du pays, l’ascension de Nkrumah, homme de l’indépendance, puis sa chute lorsqu’il se fit le champion d’une évolution vers le socialisme.

J. S.-C.

➙ Accra / Achantis / Afrique noire / Empire britannique / Nkrumah (K.).

 K. Nkrumah, Ghana, Autobiography of Kwame Nkrumah (New York, 1957 ; trad. fr. Autobiographie, Présence africaine, 1961) ; Africa Must Unite (Londres, 1963 ; trad. fr. L’Afrique doit s’unir, Payot, 1964). / J. Boyon, Naissance d’un État africain : le Ghāna. La Gold Coast de la colonisation à l’indépendance (A. Colin, 1958). / W. E. F. Word, A History of Ghana (Londres, 1958). / E. A. Boateng, Geography of Ghana (Cambridge, 1959 ; 2e éd., 1966). / F. M. Bourret, Ghana. The Road to Independence, 1919-1957 (Londres, 1960). / W. Manshard, Die geographischen Grundlagen der Wirtschaft Ghanas (Wiesbaden, 1961). / D. Kimble, A Political History of Ghana. The Rise of Gold Coast Nationalism, 1840-1920 (Londres, 1963). / W. Birmingham et coll., A Study of Contemporary Ghana (Londres, 1966-67 ; 2 vol.). / H. L. Bretton, The Rise and Fall of Kwame Nkrumah (New York, 1966). / J. Lacouture, Quatre Hommes et leur peuple (Éd. du Seuil, 1969). / S. G. Ikoku, le Ghana de Nkrumah (trad. de l’angl., Maspéro, 1971).