Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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génétique (suite)

La détermination du sexe a, elle aussi, depuis toujours intrigué les Hommes. Pour les Anciens, le testicule droit engendrait le sexe fort, et le testicule gauche l’autre sexe. William Harvey (1578-1657) fut le premier à tenter un rapprochement entre la reproduction ovipare et la reproduction vivipare. Ce fut le Danois Niels Steensen (en fr. Nicolas Sténon, 1638-1686) qui, en 1667, émit l’idée que les ovaires de la femme produisent des œufs qui se développent dans l’utérus. Reinier De Graaf (1641-1673) décrivit en 1672 les follicules produits par les ovaires et qui portent aujourd’hui son nom, mais c’est seulement en 1827 que Karl Ernst von Baer (1792-1876) découvrit l’œuf à l’intérieur des follicules de De Graaf. La fécondation, quant à elle, ne fut découverte qu’en 1875 par Oskar Hertwig (1849-1922), chez l’Oursin.

Les plus grands noms de la biologie sont, cependant, attachés à l’explication de l’évolution des espèces.

• Pierre Louis Moreau de Maupertuis (1698-1759) fut peut-être le premier généticien digne de ce nom. Dans sa Dissertation physique à propos du Nègre blanc, il montra que l’albinisme est un caractère héréditaire. Il soutint que l’hérédité était supportée par des particules provenant du père et de la mère, et que des particules ayant une action similaire s’appariaient. L’une ou l’autre particule de chaque paire peut avoir une action prédominante et permettre ainsi à un caractère d’être hérité à partir d’ancêtres lointains tout en étant transmis par des parents ne montrant pas ce caractère. C’était une anticipation géniale des lois de Mendel. Maupertuis décrivit même les mutations.

• Le grand mérite de Lamarck*, dont la Philosophie zoologique parut en 1809, est d’avoir cherché à expliquer l’évolution et à formuler une hypothèse ; selon lui, la génération spontanée demeure très probable en ce qui concerne les petits organismes, les Algues par exemple, et c’est à partir de ces organismes que la nature va se diversifier en allant du plus simple vers le plus complexe. Lamarck admet surtout le rôle de l’influence du milieu sur le développement des organes : les organes qui sont très employés par un animal tendent à devenir plus forts et plus développés, tandis que le défaut constant d’usage d’un organe atrophie celui-ci et finit par le faire disparaître. Dans sa seconde proposition, Lamarck soutient que ces caractères acquis sont devenus héréditaires. On connaît l’exemple de la Girafe, qui, pour avoir vécu de nombreuses générations dans des lieux où la terre presque toujours aride et sans herbage l’oblige à brouter le feuillage des arbres, a vu son col s’allonger.

• Dans On the Origin of Species, paru dans sa totalité en novembre 1859, Darwin* a montré que la plupart des espèces vivantes, l’Homme inclus, sont susceptibles de se reproduire quasiment à l’infini. Or, les populations vivantes sont limitées. Cette contrainte est imposée, selon Darwin, par le milieu, qui est généralement hostile, et cela d’autant plus que la population considérée s’accroît. Chaque individu est donc obligé, pour survivre, de livrer le fameux struggle for life. Darwin soutient que cette pression exercée par le milieu est une force sélective qui permet la survie et la multiplication des individus les mieux adaptés au détriment des individus moins adaptés. Cette variation d’adaptation serait, elle-même, le résultat d’une variation de structure parfois minime qui donne un avantage sur les congénères. Or, ces variations de structure sont des caractères héréditaires qui apparaissent spontanément et continuellement avec une fréquence qui peut paraître très faible à l’échelle d’une génération, mais qui sont importants par rapport à l’évolution. Ce sont les mutations qui, par le jeu de la sélection, vont être responsables de l’évolution des espèces.

• Gregor Mendel est le véritable fondateur de la génétique. Il montre que les deux patrimoines héréditaires d’un être vivant, celui qui provient du père et celui qui provient de la mère, sont formés d’un grand nombre d’unités distinctes et qu’ils ne font que coexister chez un individu donné en gardant la possibilité d’être désunis dans sa propre descendance. Il démontre ainsi que ces combinaisons se font et se défont selon les lois du hasard. Mendel parvient à ces résultats en étudiant des particularités simples d’une plante telle que le Pois, qu’il cultive dans le jardin de son monastère. Deux caractères, par exemple l’aspect lisse ou l’aspect ridé des fruits, forment une paire d’éléments opposés. Un Pois est lisse ou bien il est ridé. En croisant des Pois ridés et des Pois lisses, les uns et les autres d’une lignée pure, Mendel observe que les hybrides de première génération, ou F 1, sont tous lisses. Mais, si ces Pois F 1 sont entrecroisés ou croisés avec leurs parents, des Pois ridés vont apparaître dans la seconde génération, ou F 2, et cela dans des proportions rigoureuses. Mendel conclut que les hybrides de la première génération possèdent les deux caractères « lisse » et « ridé » ; mais un seul se manifeste, le caractère lisse, que Mendel appelle dominant par rapport au caractère ridé, qui est récessif. Cette paire de caractères lisse-ridé se sépare, subit une ségrégation et permet la réapparition, à la génération suivante, du caractère récessif « ridé ».

Dans une deuxième série d’expériences, Mendel démontre que la ségrégation d’une paire de caractères, lisse-ridé par exemple, se fait de façon indépendante de celle d’autres caractères, concernant par exemple la couleur des fleurs.

Il expose ses découvertes en 1865 devant la Nouvelle Société d’histoire naturelle de Brünn (auj. Brno), mais son exposé passe largement au-dessus de la tête de son auditoire, et son œuvre tombera dans l’oubli. C’est seulement en 1900 que trois savants, H. De Vries aux Pays-Bas, Correns en Allemagne et Tschermak en Autriche, découvriront de nouveau, indépendamment les uns des autres, les lois que Mendel avait établies et rendront hommage à ce dernier en reconnaissant le mérite d’une découverte faite trente ans plus tôt.