Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
G

Gama (Vasco de) (suite)

Le Portugal entreprend dès lors d’exploiter la découverte de la voie nouvelle : après les expéditions de Cabral et João da Nova (1500 et 1501), Vasco de Gama repart à la tête de vingt navires en 1502 ; il commence par s’emparer de Quiloa (Kilwa) et Sofala, premières bases portugaises du futur Mozambique, et écarte ses rivaux arabes par la terreur : un navire égyptien est incendié avec tout son équipage, y compris les femmes et les enfants. Aux Indes, il impose la domination portugaise avec la même rigueur inhumaine, fait bombarder Calicut pendant trois jours et établit à Cochin le premier comptoir portugais d’Asie. Rentré à Lisbonne en 1503, il reste vingt ans dans l’inaction, peut-être victime du sage principe qui écarte du pouvoir ceux qui auraient tendance à abuser de la gloire qu’ils ont acquise au service du roi. Finalement, nommé vice-roi des Indes en 1524 par Jean III, il s’efforce de lutter contre la corruption qui se développe dans les trois comptoirs, mais meurt à la fin de l’année même où il est arrivé aux Indes.

S. L.

➙ Empire colonial portugais.

 E. Micard, l’Héroïque Inquiétude de Vasco de Gama (P. Roger, 1930 ; 2 vol.). / Rémy, les Caravelles du Christ (Plon, 1956). / J. F. Rolland, les Portugais à la conquête de l’Asie (Club français du livre, 1956).

Gambetta (Léon)

Avocat et homme politique français (Cahors 1838 - Ville-d’Avray 1882).



L’orateur républicain

C’est comme orateur que Gambetta sort de l’anonymat. Est-ce à ses ascendances méridionales, génoise par son père, gasconne par sa mère, qu’il doit sa faconde et sa puissance verbale ? En 1857, il a quitté l’épicerie familiale, le « Bazar génois » de Cahors, pour étudier le droit à Paris. Il obtient sa licence en 1860. Il s’inscrit alors au barreau et prête serment dès 1861. Soutenu par Adolphe Crémieux et Jules Favre, il acquiert assez de notoriété pour être choisi en novembre 1868 comme avocat par Charles Delescluze. Celui-ci est l’un des sept journalistes traduits en correctionnelle pour avoir ouvert une souscription en vue d’élever un monument sur la tombe du député A. Baudin, tué sur une barricade le 2 décembre 1851. La plaidoirie que Gambetta prononce pour Delescluze tourne au réquisitoire contre l’Empire et consacre le jeune avocat chef du parti républicain. Selon ses propres termes, Gambetta vient de « pénétrer par effraction sur la scène du monde ».

Aux élections de 1869, sur une profession de foi radicale appelée plus tard programme de Belleville, Gambetta est élu le 23 mai député dans le XXe arrondissement de Paris contre H. Carnot*, et, le 6 juin, à Marseille contre F. de Lesseps*. Il choisit de représenter Marseille. Lors des discours qu’il prononce à la tribune de l’Assemblée, son talent force l’admiration. Sa stature massive, son visage pesant sont très vite populaires, et ses discours longuement applaudis.


Le patriote

Lorsque la nouvelle de Sedan parvient à Paris, il paraît prématuré à Gambetta de proclamer la république, par crainte de compromettre, face à l’ennemi, l’union nationale. Il cède cependant à la pression populaire et, le 4 septembre, à l’Hôtel de Ville, dans une harangue enflammée, il déclare la république instaurée et devient ministre de l’Intérieur dans le gouvernement de la Défense nationale. Son premier souci est le maintien de la cohésion nationale. Il craint l’insubordination de la province, où il place des préfets au patriotisme bon teint, et de l’armée, à laquelle il s’adresse : « Le nom de République veut dire union intime de l’armée et du peuple pour la défense de la patrie. »

Pour rendre autorité et énergie à la délégation du gouvernement réfugiée à Tours, il décide de la rejoindre : le 7 octobre, il s’envole en ballon de la place Saint-Pierre à Montmartre et atteint Montdidier, d’où il gagne Tours. Il ajoute alors à ses fonctions celle de ministre de la Guerre. Pendant quatre mois, assisté de Charles de Freycinet, il organise la résistance : il parvient à faire enrôler plus de 600 000 hommes, à créer de nombreux corps francs. Il s’insurge violemment contre le défaitisme, s’opposant ainsi à Thiers*, qui souhaite négocier la paix et se déclare révolté par « cette politique de fou furieux ». Mais la capitulation de Metz (27 oct.), l’échec de l’essai de jonction entre les forces parisiennes et l’armée de la Loire, la prise d’Orléans (3 déc.) et la capitulation de Paris enfin (28 janv. 1871) rendent inutiles ses efforts. S’il ne parvient pas à chasser l’ennemi du sol de la patrie, il espère du moins que celle-ci se prononcera en faveur de la république. Pour suppléer au manque de ferveur républicaine de la province, il voudrait que tous ceux qui ont servi sous l’Empire soient déclarés inéligibles, mais il n’est pas suivi par les républicains modérés, qui le forcent à démissionner (6 févr.).

Aux élections du 8 février, Thiers, l’homme de la paix, l’emporte sur les radicaux. Gambetta est cependant élu par neuf départements ; il opte pour le Bas-Rhin. La cession de l’Alsace à l’Allemagne, contre laquelle il a solennellement protesté, annule son mandat. Il s’exile à Saint-Sébastien.


Le leader de l’opposition

Les élections complémentaires du 2 juillet 1871 lui rendent une place à l’Assemblée nationale, qui siège à Versailles. Les dissensions entre Thiers et Gambetta s’estompent. Le chef de l’Union républicaine soutient Thiers contre la majorité monarchiste de l’Assemblée, mais, mal à l’aise dans une chambre qui lui est en majorité hostile, il porte ses efforts surtout devant l’opinion publique. Il fonde le 5 novembre 1871 un quotidien de haute tenue, la République française, dont il garde la direction. Il se dépense d’autre part sans compter pour se faire en province « le commis voyageur » de l’idée républicaine.

Après la démission de Thiers et tandis que Mac-Mahon* s’efforce de faire prévaloir une politique conservatrice et de rétablir l’« ordre moral », Gambetta s’entend avec le centre orléaniste et les républicains modérés. Il appuie l’amendement Wallon qui, le 30 janvier 1875, introduit le terme de république dans la Constitution. Il contribue de même au vote des lois constitutionnelles de 1875.

Ses efforts sont fructueux puisque les élections de 1876 donnent une majorité républicaine à la Chambre et contraignent Mac-Mahon à faire appel au républicain modéré Jules Simon.