Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
F

Fronde (la) (suite)

La Fronde princière

La Fronde parlementaire fut remplacée assez rapidement par la Fronde des princes. Pourquoi cette révolte d’une partie de la noblesse ? Selon F. Billacois, « beaucoup de gentilshommes touchés après 1630 et par le renversement de la conjoncture et par la fiscalité galopante forment un prolétariat noble et revendicateur, hostile à la taille, à la vénalité des offices, aux cours de justice royale ; ils ont quelque chose comme une conscience de classe, mais qui n’a d’autre effet que de jeter un contingent de plus dans les aventures et les troubles suscités par les mécontents ».

Il faut ajouter à cela les ambitions individuelles d’un Gondi (le célèbre cardinal de Retz), d’un Condé, qui, au gré de leurs intérêts, passent d’un parti à l’autre, et l’action de grandes dames écervelées qui se jettent aussi dans la bataille. En janvier 1650, Mazarin fait arrêter Condé et ses parents Conti et Longueville, mais ce coup de force est tellement impopulaire que le ministre, après avoir libéré les princes, s’enfuit à Brühl chez son ami l’Électeur de Cologne en 1651. Année difficile pour le pouvoir royal : une délégation de nobles demande la réunion des états généraux et veut s’unir à l’assemblée du clergé.

Le projet est de restaurer les privilèges de l’Église gallicane, de renforcer le pouvoir des officiers et de supprimer les commissaires. Le roi aurait ainsi une autorité tempérée et devrait respecter les traditions.

La Cour veut faire traîner les pourparlers jusqu’à la majorité du roi (sept. 1651). C’est alors que Condé traite avec l’Espagne et lève des troupes dans le Midi, pendant que Bordeaux se révolte et se donne un gouvernement populaire, l’Ormée, directement influencé par les extrémistes anglais, les Niveleurs. La Cour quitte de nouveau Paris, et une guerre civile terrible ravage le royaume, les deux partis étant aidés par des troupes étrangères.

En avril 1652, Turenne, à la tête des troupes royales, bat Condé à Bléneau et sauve le roi. Il se présente devant la capitale : le 2 juillet, il bat Condé et ses amis au faubourg Saint-Antoine : la Grande Mademoiselle sauve ceux-ci momentanément en faisant tirer sur les troupes victorieuses le canon de la Bastille. Mais le pays est las de cette guerre, et, en octobre, Paris ouvre ses portes au roi. L’année suivante, Bordeaux capitule, et Mazarin revient au pouvoir sans susciter la moindre opposition.


Les résultats

La Fronde ruina durablement plusieurs provinces, comme la Champagne, la Bourgogne et la Saintonge. Elle causa une terrible misère, et c’est principalement pour y remédier que Vincent* de Paul créa la communauté des Filles de la Charité et organisa un admirable secours dans tous les domaines.

Politiquement, la Fronde n’aboutit à rien : les intendants furent rétablis, les parlements subjugués ; quant aux partisans et aux financiers, ils continuèrent de s’enrichir. Tout ce contre quoi avaient voulu lutter les Frondeurs triompha, et tout d’abord l’absolutisme. La cause de cet échec provient de ce que la Fronde portait en elle-même bien plus de passé que d’avenir. Suscitée, en réaction contre les « nouveautés », par les partisans de l’ordre ancien, attachés à leurs privilèges abusifs et anachroniques, elle ne comporta, à l’exception sans doute du mouvement de Bordeaux, aucune innovation créatrice. Elle contribua, par contre, à rassembler tout le royaume derrière son roi et à favoriser l’établissement du régime absolutiste de Louis XIV.

P. R.

➙ Anne d’Autriche / Condé / Louis XIII / Louis XIV / Mazarin / Parlement / Richelieu.

 A. Chéruel, Histoire de la France pendant la minorité de Louis XIV (Hachette, 1879-80 ; 4 vol.). / B. E. Porchnev, les Soulèvements populaires en France de 1623 à 1648 (trad. du russe, S. E. V. P. E. N., 1963). / M.-N. Grand-Mesnil, Mazarin, la Fronde et la presse, 1647-1649 (A. Colin, 1967).

Front populaire

Coalition qui, dans les années 1930, se noua, en divers pays et notamment en France, entre organisations de gauche et d’extrême gauche.



L’union de la gauche en France

En France, pour le 14 juillet 1935, une centaine d’organisations, de nature très variée, partis, confédérations syndicales, groupements d’anciens combattants et d’intellectuels (rassemblées à l’appel d’un Comité formé le 17 juin), avaient décidé de mettre sur pied, à Paris et en province, de grandes manifestations tendant à affirmer l’union de toute la gauche. À Paris, la manifestation comportait le matin, au vélodrome Buffalo, un meeting populaire où fut prêté un serment solennel et, l’après-midi, un grand défilé, de la Bastille à la Nation.

La gauche s’était divisée en 1924 (où les communistes n’avaient pas fait partie du Cartel* des gauches), en 1926 (où les radicaux s’étaient intégrés à l’Union nationale), en 1928 et en 1932 (où les communistes pratiquaient la tactique « classe contre classe » au détriment des socialistes), en 1934 (où la plupart des radicaux étaient retournés à l’Union nationale) ; comment cette gauche avait-elle pu, en 1935, surmonter ses divisions ?

Des facteurs très différents avaient joué. Au soir du 6 février 1934, à la suite de la manifestation sanglante de la place de la Concorde, qui devait aboutir à la chute du cabinet Daladier, la majorité des républicains avait eu le sentiment que les libertés démocratiques et le régime parlementaire étaient menacés, et que, de l’Italie, devenue mussolinienne en 1922, et de l’Allemagne, devenue hitlérienne en 1933, la marée totalitaire pouvait s’étendre à la France. À gauche, c’est dans les Croix-de-Feu du colonel de La Rocque, dont les rassemblements motorisés frappaient l’opinion, qu’on voyait en général la force la plus menaçante. Chaque semaine, on redoutait une marche sur Paris. Mais il existait d’autres « ligues », considérées comme susceptibles d’essayer d’abattre le régime parlementaire et de détruire les libertés publiques.