Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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France (suite)

La crise de l’autorité monarchique (1610-1624)

• 1610 : Louis* XIII (1610-1643) n’ayant que neuf ans, le parlement déclare régente la reine mère Marie de Médicis. Celle-ci se laisse dominer par des aventuriers italiens, les Concini*. Les protestants, inquiets de l’influence d’un catholicisme conquérant lié à la Contre-Réforme, et les Grands s’agitent.

• Aux états généraux de 1614-15, le tiers état, constitué en grande majorité d’officiers riches et influents, s’oppose à la noblesse et dénie toute autorité au clergé dans les affaires de l’État. La noblesse demande l’abolition de la vénalité des charges. Cette lutte d’influence réduit les états à l’impuissance.

• Concini assassiné avec le consentement du jeune roi (24 avr. 1617), celui-ci donne sa confiance à un favori, Luynes, qui doit faire face à des soulèvements nobiliaires et à la révolte des protestants du Midi. Luynes meurt après avoir échoué à Montauban (1621).

• La politique extérieure de la France est alors dominée par les impératifs religieux, liés à l’influence du parti dévot. Mais, pour concilier les intérêts de l’Église et ceux de la diplomatie française, la reine mère réussit à faire entrer au Conseil Richelieu, qui, en 1624, en devient le chef. Durant près de vingt ans, le cardinal de Richelieu († 1642) et Louis XIII († 1643) vont collaborer dans la conduite du pays ; cette collaboration résistera à la crise politique de 1630 (journée des Dupes).


L’œuvre de Richelieu* (1624-1642)

Cette œuvre est absolument subordonnée à la grandeur et aux intérêts du royaume et du roi.

• Élimination du danger politique protestant. Siège de La Rochelle (1627-28) ; Richelieu contraint les protestants à la reddition. Édit de « grâce » d’Alès (28 juin 1629) ; suppression des places de sûreté protestantes.

• Lutte contre les Grands et les oligarchies d’officiers : complots contre Richelieu (opposition d’Anne d’Autriche, de Marie de Médicis, de Gaston d’Orléans, de Michel de Marillac et du parti dévot) ; exécution de Chalais (1626), du duc Henri II de Montmorency (1632), de Cinq-Mars (1642).

• Développement de l’absolutisme et de la centralisation monarchique dû à une guerre de 24 ans qui oblige le roi à recourir à des moyens exceptionnels de gouvernement. Généralisation des « commissaires départis », devenus « intendants de justice, police et finances ».

• Extension de l’empire colonial : développement de la colonisation au Canada (fondation de Ville-Marie [Montréal], 1642) ; installation française à la Guadeloupe et à la Martinique (1635) ; comptoirs au Sénégal et à Madagascar.

• Mais assez vite Louis XIII et le cardinal sacrifient tout à la lutte contre les Habsbourg (v. Trente ans [guerre de]). Au début, Richelieu les combat par personnes interposées (Suède). Mais en 1635 il déclare la guerre à l’Espagne. La France connaît des revers (Corbie, 1636), puis des succès marquants dans les Pays-Bas (prise d’Arras, 1640) et dans le Roussillon (prise de Perpignan, 1642).

• L’économie française, dont la prospérité tient davantage à la masse territoriale et démographique qu’à l’ingéniosité technique et commerciale, subit les contrecoups de cette guerre (qui se prolongera jusqu’en 1659). Écrasées d’impôts, les populations rurales se révoltent en de nombreux endroits (« croquants » du Poitou et du Limousin, 1635-1637 ; « va-nu-pieds » de Normandie et d’Anjou, 1639).


Mazarin* et la minorité de Louis* XIV (1643-1661)

• 1642-43 : annulation du testament de Louis XIII par le parlement (18 mai 1643) ; suppression du Conseil de régence ; le parlement de Paris donne les pleins pouvoirs à Anne d’Autriche, qui appelle Mazarin comme chef du gouvernement.

• La guerre continuant (victoire de Condé à Rocroi en 1643, à Lens en 1648 juste avant les traités de Westphalie*), les finances sont dans un état déplorable ; le gouvernement recourt aux expédients. Les abus de l’État provoquent l’intervention du parlement, dont les meneurs (Broussel) sont arrêtés. Alors éclate la Fronde* parlementaire (1648-49), que suit la terrible Fronde* des princes (1650-1652), dont le bilan politique est entièrement négatif, Mazarin rentrant à Paris (févr. 1653) plus fort que jamais et le jeune Louis XIV puisant dans l’humiliation et l’insécurité de ces années des résolutions qui iront dans le sens de l’absolutisme. D’autant plus que le traité des Pyrénées (1659), en consacrant le triomphe de la France sur l’Espagne, lui vaut l’Artois et le Roussillon.


La Réforme catholique en France

• La France, dans la première moitié du xviie s., est aux prises avec une autre aventure, spirituelle celle-là : l’application (relativement tardive par rapport au concile de Trente) de la réforme catholique.

• C’est l’âge d’or de l’Église de France, d’un jaillissement spirituel unique. Se développe alors une théologie mystique alimentée par l’augustinisme, la mystique espagnol et le courant rhéno-flamand, mais gardant un trait français par son sens de la mesure et son aptitude à se réaliser en œuvres utiles et solides. C’est le temps des saints prêtres : Bérulle*, François* de Sales, Vincent* de Paul, Olier*. L’école française de spiritualité rayonne sur le monde, mais l’art et la littérature baroques influencent les œuvres françaises.

• Cependant, au plus fort de son élan, la réforme catholique s’interroge et se divise : c’est la crise du jansénisme*, mouvement spirituel marqué de pessimisme et tendant à faire triompher les droits de la conscience individuelle contre les arbitraires, fussent-ils royaux.


Louis XIV et la France classique (1661-1715)


L’effort à l’intérieur

• En 1660, Louis XIV épouse Marie-Thérèse, qui renonce à ses droits sur l’Espagne moyennant une dot que Mazarin sait l’Espagne incapable de payer. La paix des Pyrénées, complétée par la paix d’Oliva (1660) en Europe du Nord, fait de la France l’arbitre de l’Europe.

• Lorsqu’il meurt en 1661, Mazarin a déjà fait de son roi le Grand Roi, dont le règne offre le spectacle du rassemblement de toutes les forces de la nation sous la direction d’un prince qui, tout à la fois, l’incarne et la dirige.

• C’est entre 1661 et 1670 que l’ordre royal est définitivement rétabli, que les indisciplines sont réduites, que les intendants sont organisés et que la monarchie absolue prend la forme qu’elle conservera jusqu’à la Révolution.

• Tout le pouvoir est en définitive entre les mains du roi, qui sait s’entourer d’excellents seconds comme Colbert*, Lionne, Le Tellier et Louvois*.