Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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France (suite)

Sur les côtes, les oscillations du niveau marin ont pu, par places, retoucher le modelé continental, mais c’est surtout lorsque, à la fin des grandes glaciations, le niveau des eaux s’est relevé (jusqu’à dépasser légèrement les côtes actuelles) que les rivages ont pris la physionomie que nous leur connaissons. Les basses vallées élargies et approfondies devinrent des estuaires ou des « rias » que maintenant la marée remonte. Sur les basses terres s’édifièrent des marais que l’homme tentera de conquérir (polders). Le tracé du littoral est désormais acquis, et les retouches ultérieures seront fort limitées : poursuite de l’édification du delta du Rhône, de l’envasement de certains golfes ou estuaires, du colmatage des étangs languedociens, remaniement des dunes landaises par exemple.

Présentement, l’évolution du relief est ralentie presque partout (sauf dans le domaine soumis au climat méditerranéen et dans les montagnes) grâce à la protection d’un couvert végétal suffisamment dense, que l’on doit au caractère tempéré du climat actuel.


L’organisation du relief

Une grande ligne en S, allant de la Montagne Noire (sud-ouest du Massif central) aux Vosges par les Cévennes, le Vivarais, le Charolais, le plateau de Langres, jalonne la limite entre deux espaces. À l’ouest, c’est le domaine hercynien et la France des grandes plaines et des bas plateaux, aux horizons marqués par les aplanissements et par l’incision des vallées, ou par le moutonnement des collines dont l’altitude reste faible. Les reliefs sont suffisamment atténués pour que la circulation soit aisée, sauf au cœur du Massif central et des Vosges. La ligne précitée rassemble précisément les points culminants des unités géologiques qui s’y terminent, et les seuils qu’elle comporte s’en trouvent valorisés d’autant. C’est sur elle que prennent naissance un grand nombre de fleuves et de rivières, du Tarn à la Moselle, en passant par la Loire et la Seine ; c’est la limite entre les bassins hydrographiques gagnant l’Océan ou ses mers annexes, et ceux qui sont dirigés vers la Méditerranée. Les premiers ne tiennent pas compte des différentes unités géologiques, tant fut étroite la solidarité morphologique entre les massifs anciens et les bassins sédimentaires. À l’est et au sud dominent les montagnes mises en place par les grands mouvements tertiaires et leurs avant-pays, ainsi que quelques secteurs effondrés (Alsace, plaine de la Saône). C’est la France aux reliefs jeunes, aux contrastes topographiques accusés, aux systèmes hydrographiques plus complexes, guidés par les accidents structuraux.

À l’intérieur de ces deux unités, les nuances sont d’un autre ordre. Dans les chaînes de formation récente, les zones géologiques ordonnent la répartition des paysages. Mais d’autres différences proviennent du degré de la marque glaciaire et de l’agressivité des eaux courantes. Ainsi le Jura, atteint par les glaces mais non sculpté par elles, a un relief moins heurté que les Préalpes et les Alpes ; les Alpes du Sud et les Pyrénées orientales doivent beaucoup de leurs traits physiques à la torrentialité méditerranéenne. Dans la France hercynienne, certaines distinctions se fondent surtout sur la nature des roches. Les formes lourdes, les dislocations compactes, les vieilles surfaces creusées de gorges, une dissection dense en rapport avec des terrains imperméables sont le lot des massifs cristallins aux sols acides et lessivés ; les étendues rocailleuses et burinées des plateaux calcaires secs, aux rivières plus rares, affectées de pertes, contrastent avec eux. Mais, ailleurs, l’organisation du relief, dans le détail, combine la structure et l’agencement hydrographique ; les aptitudes physiques y dépendent aussi des terrains superficiels.


Modération et variété de l’ambiance climatique et leurs conséquences

Les oppositions fondamentales réalisées sur le plan du relief ont leur transposition dans les nuances du climat ; il n’y a pas exacte coïncidence toutefois. Les « Midis » aquitain et méditerranéen, par leurs hivers atténués et leur chaleur estivale, s’apparentent déjà aux climats subtropicaux. Le reste de la France s’inscrit dans la zone tempérée stricto sensu ; mais les mers, la continentalité, la latitude et le relief se combinent pour en diversifier les caractères. L’ample ouverture du territoire sur l’Atlantique et ses annexes (Manche, mer du Nord), bénéficiant des effets de la dérive des eaux chaudes (prolongement du Gulf Stream), permet une large extension des temps perturbés de l’Ouest, caractéristiques des climats tempérés et de l’ambiance « océanique ». Des pluies fréquentes et abondantes réparties sur toute l’année, des contrastes thermiques modérés (action régulatrice des eaux maritimes) entre un hiver « tiède » et un été frais sont les caractères dominants. Mais la latitude explique que les hivers de Dunkerque n’aient que 2 à 3 °C de température moyenne, contre 6 à 7 °C à Brest et sur toute la côte atlantique. À mesure que l’on progresse vers l’intérieur aussi, les étés deviennent plus chauds, alors que les hivers voient les froids s’accuser. Les endroits déprimés, les bas plateaux situés à plus de 100 km des rivages deviennent plus secs (Beauce, pays de la Loire, plaine de Toulouse : 500 à 600 mm de pluies par an, contre 700 à 1 200 mm sur les côtes). La progression des altitudes dès la Lorraine, le sud-est du Bassin parisien et le Limousin y permet cependant une recrudescence des précipitations, dans lesquelles la neige joue un rôle non négligeable.

Le climat méditerranéen s’étend jusqu’à la rencontre de la ligne des reliefs qui, au sud et au sud-est, ourlent le Massif central ; il déborde jusqu’à la haute Durance et à la Drôme sur les reliefs méridionaux des Alpes. Le rétrécissement du couloir rhodanien et les montagnes empêchent une extension plus grande vers le nord des rythmes et des traits de ce type climatique original, caractérisé par une sécheresse accusée de l’été, des pluies de saisons froides tombant en brutales averses, une luminosité exceptionnelle de l’atmosphère, des vents locaux violents (mistral). Associé à des pentes importantes, un tel climat favorise le ruissellement, l’érosion des sols, l’évaporation ; le déficit estival des sols en eau oblige l’agriculteur à pratiquer l’irrigation, tout comme la brutalité des crues menace les établissements humains dans les vallées ou à leur débouché et permet les atterrissements du littoral. Les travaux hydrauliques y sont, par conséquent, nécessaires pour des raisons multiples.