Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
F

Fouché (Joseph) (suite)

Fouché a alors quarante-cinq ans. Cet homme au visage étrangement pâle, au « regard glauque d’une fixité curieuse et exigeante » (Charles Nodier) affiche une froideur ironique ou narquoise qui intimide et, parfois, terrifie. Napoléon apprécie, sans l’estimer, ce bourreau de travail qui connaît tous les rouages de l’administration impériale. Fouché sait à fond son métier et apparaît toujours comme indispensable. Réinstallé au ministère, il paralyse les activités royalistes dans l’Ouest et frappe la presse réactionnaire. Dès lors, sa faveur augmente. Aussi, quand, pendant la campagne d’Espagne, il intrigue avec Talleyrand*, prévoyant le cas où Napoléon viendrait à disparaître, et s’entend avec lui sur le nom de Murat* comme successeur possible, l’Empereur, au lieu de le disgracier, le ménage parce qu’il a besoin de lui. Le ministre tout-puissant reçoit par intérim pendant quelques mois (1809) le portefeuille de l’Intérieur et est créé duc d’Otrante. L’année suivante, partisan d’un mariage russe, l’ancien régicide voit sans plaisir Napoléon songer à épouser une princesse autrichienne, petite-nièce de Louis XVI. Mais surtout, inquiet de la politique des conquêtes, il ose entamer des pourparlers secrets avec Londres, par l’intermédiaire du financier Ouvrard. Furieux de cette initiative, le souverain met à pied son ministre (3 juin). Sommé de passer sa succession à Savary, le disgracié se hâte de détruire toutes ses fiches de police : bien plus, il a l’audace d’emporter avec lui certaines lettres de la famille impériale. Au comble de l’irritation, Napoléon l’exile à Aix.


Dernières années

Trois ans plus tard (1813), le duc d’Otrante semble rentrer en grâce : l’Empereur lui confie le gouvernement des provinces Illyriennes. Gouvernement qui dure deux mois : devant l’invasion autrichienne, Fouché se réfugie à Venise, puis passe à Florence, à Naples, à Rome. Revenu à Paris après la chute de l’Empire, il s’applique à plaire aux Bourbons, mais, lorsque Napoléon débarque à Golfe-Juan, il change de camp.

Pendant les Cent-Jours*, l’Empereur, obligé, faute de talents, de s’appuyer sur Fouché, lui rend son portefeuille, tout en confiant à Carnot, si grande est sa défiance : « Avant de m’occuper de lui, j’ai besoin d’une victoire. » En fait, l’adroit ministre prône une politique de modération et de fermeté, soucieux avant tout de se préparer l’avenir par son double jeu. Quelques jours avant Waterloo, lucide, mais impuissant, Napoléon avoue : « Le duc d’Otrante me trahit... » Après le désastre, les Chambres, manœuvrées par Fouché, obtiennent l’abdication. Le vieux renard devient président d’une commission de gouvernement proposée par ses soins et est à la tête du pouvoir exécutif. Le 6 juillet 1815, grâce à ses négociations avec les agents de Louis XVIII, l’ancien Conventionnel est ministre-secrétaire d’État du roi ; le lendemain, il prête serment de fidélité avec Talleyrand, « le vice appuyé sur le crime », suivant le mot de Chateaubriand. Mais les ultras, qui le haïssent, se débarrassent rapidement de lui (sept.). Jugé indésirable dans une France qu’il ne devait plus revoir, Fouché est d’abord nommé ministre à Dresde, puis exilé purement et simplement par la loi qui frappe les régicides (1816). Il vit alors en Allemagne et finalement se retire à Trieste, où quatre ans plus tard, le 26 décembre 1820, il meurt, après avoir fait brûler les « épaves compromettantes de son formidable passé ».

L’authenticité des Mémoires de Fouché a été discutée en raison d’erreurs qu’aurait laissé passer le duc d’Otrante. Il semble, cependant, que ces Mémoires ne sont pas apocryphes ou, en tout cas, qu’ils ont été rédigés d’après les notes de Fouché.

A. M.-B.

 L. Madelin, Fouché (Plon, 1955 ; nouv. éd., Perrin, 1969). / J. Savant, Tel fut Fouché (Fasquelle, 1955). / L. Kammacher, Joseph Fouché (Éd. du Scorpion, 1962). / H. Buisson, Fouché, duc d’Otrante (Panorama, Bienne, 1968).

foudre

Décharge aérienne qui, accompagnée d’explosion, appelée tonnerre, et de lumière, dénommée éclair, se produit entre un nuage électrisé et la terre ou entre deux nuages.



Mécanisme du phénomène

En 1754, Benjamin Franklin* procéda à des séries d’expériences qui lui permirent d’élaborer la théorie du paratonnerre, liée au pouvoir des pointes. Celles-ci drainent les charges électriques des nuages, qui, dans certaines conditions, s’électrisent par frottement de l’air. En outre, il se forme de violents courants d’air ascendants en présence de certains nuages appelés cumulus. Dans ces conditions, les gouttes d’eau de pluie qui tombent se chargent d’électricité positive, alors que, par influence, l’air se charge négativement. Le cumulus est donc porteur d’électricité négative par contact avec le courant d’air ascensionnel. Le champ électrique atmosphérique atteint fréquemment 300 V/m, ce qui correspond à des charges électriques trop faibles pour provoquer une décharge. Pour qu’une décharge, c’est-à-dire une étincelle, prenne naissance, il faut que le champ électrique atteigne environ 300 000 V/m. Si le nuage orageux, dont l’altitude au-dessus du sol varie entre 150 et 1 000 m, se trouve à 500 m au-dessus de la terre, la différence de potentiel entre le nuage et le sol est de l’ordre de
50 m × 300 000 V/m = 150.106 V.
Lorsque l’étincelle jaillit, il y a une ionisation intense à l’intérieur du nuage, et le coup de foudre ne dure que quelques secondes. Son intensité peut atteindre 10 000 à 500 000 A pendant la première phase du phénomène, qui ne dure que de 5 à 500 μs : il s’agit d’un phénomène d’onde à front raide. La quantité d’électricité mise en jeu pendant le coup de foudre est de l’ordre de quelques dizaines de coulombs.

À titre comparatif, la fission de l’atome d’uranium se produit sous une tension voisine, mais elle met en jeu une énergie de 10 000 à 100 000 fois plus grande.