Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Alpes (Hautes-). 05 (suite)

L’économie, essentiellement rurale, repose sur de faibles superficies en culture ; la « montagne » est la seule richesse agricole réelle pour l’élevage laitier, mais l’herbe laisse souvent la place à une pelouse rase convenant davantage au mouton qu’aux bovins. Les sports d’hiver ont transformé la vie des « montagnes à vaches » qui bénéficient d’un ensoleillement prolongé, et les stations de ski se sont multipliées à Serre-Chevalier, Vallouise-Pelvoux, Montgenèvre, Superdévoluy, Orcières-Merlette, où s’investissent les capitaux marseillais. Le nombre de logements terminés montre une progression, et le bâtiment reste l’industrie essentielle, à l’exception de quelques initiatives limitées, telle l’implantation au début du siècle d’une usine de production d’aluminium à L’Argentière-la-Bessée, dans le haut Embrunais. Cependant, la Durance bénéficie d’une série d’équipements qui multiplient les centrales hydro-électriques dans le cadre d’un aménagement régional, dont le plus beau fleuron est le barrage de Serre-Ponçon.

R. D. et R. F.

Alpes-de-Haute-Provence. 04

Anc. Basses-Alpes, départ. de la Région Provence - Côte-d’Azur ; 6 944 km2 ; 112 178 hab. Ch.-l. Digne. S.-préf. Barcelonnette, Castellane, Forcalquier.


Le département est méditerranéen par les influences climatiques et alpin par les éléments du relief, lequel compte encore quelques sommets dépassant 3 000 m (Parpaillon, mont Pelat, aiguilles de Chambeyron). La complication de la structure donne une succession de bassins et de défilés, de gorges étroites (Durance, Ubaye, Verdon) sciées dans les barres de roches dures ou les plateaux calcaires. Dans ce paysage désordonné, largement déboisé, souvent rocailleux et raviné, soumis à une érosion torrentielle intense, on peut distinguer quatre grands ensembles : les hauts massifs alpins du secteur oriental, frontaliers de l’Italie, avec les cols de Vars et de Larche ; la moyenne montagne des « Barres », abruptes de Castellane à Sisteron ; les plateaux du Sud-Est, cailloutis et blocs détritiques de Valensole, tables calcaires entaillées par le Verdon ; les plissements ouest-est de la montagne de Lure et du Luberon sur la rive droite de la Durance.

Les moyennes de température n’ont aucune signification, les contrastes étant grands en fonction de la mosaïque du découpage, de l’exposition à l’adret ou à l’ubac, de l’altitude. L’hiver est neigeux, l’été court mais lumineux ; les pluies torrentielles des saisons intermédiaires gonflent les débits des cours d’eau, qui enregistrent de fortes crues. L’olivier, révélateur d’un climat méditerranéen, pousse jusqu’à Sisteron, Digne et Moustiers-Sainte-Marie, mais laisse la place à l’amandier au-dessus de 700 m.

L’omniprésence de la montagne et les difficultés d’accès, les caprices climatiques et la pauvreté des sols sont autant de facteurs peu attrayants pour l’homme. Les Alpes-de-Haute-Provence ont longtemps été une zone en abandon, à la population vieillie, donnant naissance à de larges courants migratoires. Au milieu du xixe s., les « barcelonnettes » gagnent l’Amérique latine, où ils s’établissent dans le commerce des textiles, et rares sont les « Mexicains » qui regagnent par la suite leur pays d’origine. La Première Guerre mondiale accélère le mouvement. En un siècle, le département a perdu la moitié de sa population : 156 000 habitants en 1846, 83 000 un siècle plus tard ; 1954 marque une stabilisation à 84 000 et apparaît comme une année charnière qui prouve le renversement d’une tendance séculaire : on compte en effet 92 000 habitants en 1962, et les 100 000 sont largement dépassés en 1968. Le gain est dû pour une grande part au solde migratoire (11 p. 100), qui dépasse largement le solde naturel (3 p. 100). C’est donc une mutation totale qui se manifeste et qui ne s’explique pas uniquement par l’installation de rapatriés d’Afrique du Nord ; le taux annuel de croissance de population enregistré entre 1954 et 1962 (+ 1,1 p. 100) a doublé entre 1962 et 1968 (– 1 p. 100 entre 1968 et 1975).

Mais les contrastes persistent entre les zones de peuplement industriel ou urbain et les régions agricoles, entre les petites villes et les campagnes. Les densités montrent que les premières regroupent presque toujours plus de 100 habitants au kilomètre carré (plus de 12 000 personnes autour de Digne, Manosque et Château-Arnoux). Les secondes, malgré la multiplication des résidences secondaires, qui contribuent à enrayer l’exode rural, n’ont jamais 10 habitants au kilomètre carré, sauf le val de Durance (23) ; les densités sont de 5 pour la montagne de haute Provence, de 6 pour le plateau de Valensole, qui restent les secteurs les plus déserts du département.

Les taux d’activité montrent encore la prédominance du secteur agricole : polyculture et élevage ovin de type méditerranéen, pour un faible revenu. Les services administratifs, l’armée contribuent à asseoir l’influence de quatre centres régionaux de deuxième ordre : Sisteron, petit centre d’échanges sur une cluse ; Manosque, productrice de lignite et de légumes ; Barcelonnette (fondée au xiiie s. par le comte de Provence Raimond-Bérenger IV pour rappeler ses origines catalanes), devenue ville de garnison ; Digne, préfecture à la jonction d’ensembles régionaux contrastés. Ces quatre villes n’offrent que des équipements limités, desservant des régions faiblement peuplées et gravitant dans l’aire marseillaise. À la fin de l’Ancien Régime, les faïenciers de Moustiers et les soyeux de Forcalquier envoyaient de longues caravanes de mulets vers les foires de Beaucaire. Aujourd’hui, les industries sont rares après la période de spéculation fébrile sur la distillation de l’essence de lavande ; elles pâtissent de l’éloignement et de la difficulté des communications. L’usine Pechiney de Saint-Auban est l’établissement industriel le plus important. Mais l’aménagement en cours de la Durance et du Verdon fournira à la fois l’énergie et l’eau pour l’irrigation.

R. D. et R. F.