Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
F

Florence (suite)

Maîtresse d’Arezzo et de Cortone, disposant par ailleurs d’un débouché et d’un empire maritimes, grâce à l’annexion de Pise en 1406, de ses ports de Porto Pisano et de Livourne en 1421 et de ses possessions extérieures, Florence est devenue la capitale d’un vaste district (distretto) composé de quatre contadi et qui offre une solide base territoriale et économique à la puissance des Médicis. Cosme (qui dirige Florence de 1434 à 1464), Pierre le Goutteux (1464-1469) et Laurent le Magnifique (1469-1492) contribuent dès lors à faire de la ville de Dante, de Pétrarque et de Boccace le centre de la vie intellectuelle et artistique de l’Italie, dans le respect de la tradition humaniste des grands chanceliers de la République : Coluccio Salutati (chancelier de 1375 à 1406) et Leonardo Bruni (1410-11 et 1427-1444).

Mais en dénonçant, à partir de 1490, la richesse, le luxe et la corruption des mœurs, le dominicain Savonarole* accélère la dispersion des artistes florentins en Italie et même hors de celle-ci ; surtout, il ébranle l’autorité des Médicis, dont le dernier représentant, Pierre II le Malchanceux (1492-1494), s’enfuit lors de l’arrivée en Toscane de Charles VIII, en 1494. Savonarole édifie une république aristocratique à la fois rigoriste et antipontificale, qui livre à la flamme expiatoire du bûcher objets précieux et tableaux de maîtres, dont certains chefs-d’œuvre de Botticelli*. Victime de son intolérance, le moine ferrarais périt à son tour sur le bûcher. Réorganisée par les grands marchands florentins, qui confient la direction de sa diplomatie à Machiavel*, la république accepte en 1512 le retour des Médicis et se place sous la direction de deux de leurs bâtards, qui bénéficient de la protection successive des deux papes Médicis Léon X (1513-1521) et Clément VII (1523-1534).

Les Médicis sont chassés une seconde fois en 1527, mais ils sont rappelés en 1530 par un Parlement au lendemain de l’occupation de Florence par les troupes de Charles Quint, qui fait de l’un d’eux, Alexandre, un duc de Florence ; maître de Sienne en 1555, son successeur, Cosme Ier, est enfin proclamé grand-duc de Toscane en 1569. Déclinant sous la domination de ses héritiers jusqu’en 1737, Florence renaît à la prospérité entre 1737 et 1859, sous le despotisme éclairé des grands-ducs de la maison de Lorraine. Occupée entre-temps par les troupes françaises en mars 1799, capitale du royaume d’Etrurie de 1801 à 1807, chef-lieu du département de l’Arno de 1807 à 1814, Florence se rattache au Piémont en mars 1860, et Victor-Emmanuel II y établit la capitale du royaume d’Italie de 1865 à 1870.

P. T.


Florence et l’école florentine


L’époque romane

À partir de l’an 1000, Florence est une ville de première importance ; à l’intérieur et à l’extérieur de ses remparts, de nombreux édifices religieux aux formes romanes sont construits selon les normes des basiliques des ordres monastiques du Saint Empire romain. Le baptistère consacré en 1059, joyau à partir duquel va s’épanouir l’art de la ville, permet de définir cette architecture romane florentine qui se distingue par sa régularité géométrique, l’élégance de son dessin, l’équilibre de ses volumes et l’harmonie de la couleur. L’église San Miniato al Monte (commencée au xie s.) présente les mêmes caractéristiques.

Au moment où, au xiie s., Florence atteint l’autonomie communale, elle devient l’une des villes les plus splendides de l’époque par la prospérité de son industrie et de son commerce (création de la corporation des arts) et par la beauté de ses monuments. Tandis que les « maisons tours » aux murs épais, aux bossages lisses, aux ouvertures étroites sont conçues pour la défense (maison tour des Foresi, xiiie s.), le désir d’embellir la cité se fixe sur les édifices religieux.

Dès le début du xiiie s., des mosaïstes vénitiens viennent décorer le baptistère. Ce chantier va être le foyer de formation de nombreux artistes locaux, dont le principal est Cimabue*, personnalité marquée qui réussit à se dégager du rythme byzantin, redécouvre l’espace et prépare ainsi la voie à Giotto*. En sculpture, la leçon du Pisan Andrea* da Pontedera et du Siennois Tino di Camaino va être reçue par un artiste de génie, Arnolfo* di Cambio ; également architecte remarquable, il va ouvrir l’ère de l’art gothique à Florence. Au xiiie s. apparaissent également les premières manifestations littéraires et poétiques en langue vulgaire, qui précèdent l’œuvre de Dante*.


L’époque gothique


Architecture

Dans le centre de Florence, le « Duomo » et le palazzo della Signoria représentent les deux pôles de l’architecture religieuse et civile.

L’architecture religieuse est liée à celle des nouveaux ordres mendiants ; installés en grand nombre à Florence, ils vont multiplier les églises à la fin du xiiie s. Santa Maria Novella, église dominicaine commencée en 1278, inaugure ce type nouveau. Les trois nefs avec élévation à deux étages, de vastes espaces intérieurs dégagés pour les besoins de la prédication, une réduction du nombre des travées, un rapport d’élévation entre nef et collatéraux accentuant l’effet d’horizontalité, tels sont les caractères d’un style gothique original que l’on retrouve dans l’église franciscaine de Santa Croce (reconstruite à partir du milieu du xiiie s.). Santa Maria del Fiore, le Dôme, est entreprise en 1296 par Arnolfo di Cambio ; son campanile est dû à Giotto et sa coupole ne sera terminée qu’au xve s. Empreint d’un classicisme hérité de l’Antiquité, formé de grandes masses équilibrées (l’élévation s’inscrit dans un carré), élégant et fastueux avec ses incrustations de marbre, le Dôme est l’expression la plus haute de ce gothique florentin.

L’apparition d’une autorité plus démocratique à la fin du xiiie s. va faire naître les premiers bâtiments publics : palazzo della Signoria, ou Palazzo Vecchio (1298-1304), édifié sur les plans d’Arnolfo di Cambio pour abriter le conseil des Prieurs ; palazzo del Podesta, ou Bargello (1254-1345). Ces palais ont encore l’allure de forteresses, mais vont se transformer au cours du xive s. La loggia dei Lanzi (1376), magnifique corps de garde composé de trois arcades en plein cintre, illustre cette évolution. Florence étant plus pacifiée, les exigences esthétiques vont aussi se manifester dans les maisons privées. Un exemple en est le palazzo Davanzati, avec loggias et grandes baies surmontées d’arcs largement ouverts : les pièces sont distribuées autour d’une cour centrale qui donne plus de lumière.