Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
F

faïence

Matériau céramique dont la texture se situe entre la poterie grossière et les porcelaines fines.


En réalité, il y a continuité entre les différentes sortes de matériaux obtenus suivant les techniques céramiques, suivant la pureté et la finesse des matières premières utilisées et suivant la température de cuisson pratiquée. En faïencerie, les impuretés, surtout ferrugineuses, jouent sur la couleur, alors que la température de cuisson a une action prépondérante sur la porosité. Pour limiter celle-ci, on a recours à un émail (on dit parfois glaçure), constitué par des verres relativement fusibles qui recouvrent le corps de la pièce, lequel peut alors être formé de matériaux peu onéreux.


Classement

Les faïences sont ordinairement classées suivant le choix des matières premières et la finesse des objets obtenus.

• Les poteries vernissées. Leur corps est obtenu à partir de marnes, ou argiles calcaires ferrugineuses. La cuisson ne leur donne pas une résistance à la rayure suffisante, ce qui exige la pose d’un émail assurant à la fois la dureté superficielle et l’absence de porosité. Leur couleur jaunâtre est visible au travers de ce vernis transparent.

• La faïence commune. Elle est obtenue à partir d’argiles plus fines et est recouverte d’un émail opaque, ce qui donne plus de liberté pour le choix des couleurs de l’objet fini. L’opacification était autrefois obtenue par l’oxyde d’étain. Les faïences stannifères étaient courantes en Asie dès le viiie s. et atteignaient Venise au ixe s. Elles se généralisaient ensuite en Italie. Les majoliques, ou faïences émaillées à partir d’émaux tendres, ce qui enrichissait la palette des couleurs possibles, firent le succès des céramiques mauresques, italiennes (le nom de faïence viendrait de « Faenza », ville italienne célèbre au xve s. pour ses produits céramiques), hollandaises (Delft), etc. Les faïences stannifères de Nevers, de Rouen, de Quimper, de Marseille, de Strasbourg ont connu leur période de prospérité, qui dut céder devant les faïences fines anglaises et les porcelaines translucides.

• La faïence fine. Elle est obtenue à partir de matières premières très pures qui conduisent à une pâte dure après cuisson, quoique encore poreuse, et dont la couleur blanche autorise une glaçure transparente. Les porcelaines, elles, qui sont vitrifiées à cœur, n’ont pas de porosité. Les faïences fines, de même que les porcelaines, limitaient ou évitaient les difficultés rencontrées en faïencerie pour accorder les coefficients de dilatation du corps et de l’émail. Si ces coefficients sont mal ajustés, ils conduisent à la trésaillure si la couche superficielle est mise en extension par son retrait plus important que celui du corps lors du refroidissement, ou bien à l’écaillage dans le cas inverse. Un effet décoratif était parfois tiré de la trésaillure (faïences craquelées). De nos jours, Sèvres rénove les faïences fines.


Fabrication

Après façonnage par les techniques céramiques habituelles (tournage, moulage, coulage), le corps de la pièce argileuse est généralement soumis à une première cuisson en atmosphère oxydante, à des températures qui peuvent varier de 900 à 950 °C avec des argiles calcaires tendres, allant jusqu’à 1 200 °C et plus avec des argiles feldspathiques. On pose ensuite l’émail sur la pièce ainsi obtenue (biscuit), par pulvérisation, au pinceau ou par trempage ; et on procède, s’il y a lieu, à une décoration, par divers procédés ne risquant pas d’abîmer l’émail cru. On peut procéder aussi à la décoration sous émail ; la faible température de cuisson de l’émail de faïence employé permet alors une grande richesse de tons.

Convenablement broyé, l’émail est mis en suspension dans l’eau pour constituer le bain de pistolage ou de trempage. Les éléments qui seraient solubles dans l’eau, tels le borax et les composés alcalins, ou toxiques, tels les sels de plomb, sont tout d’abord incorporés dans une phase vitreuse par frittage. La fritte est ensuite broyée et ajoutée aux éléments stables (kaolin, feldspath, sable quartzique, craie, etc.). Le décor fait intervenir des oxydes colorés tels que l’oxyde de cobalt (bleu), de cuivre (vert), de fer (rouge-brun), d’étain (jaune), de manganèse (violet), etc.

La fabrication s’achève par une seconde cuisson, destinée à fondre l’émail et à lui permettre de napper la pièce. Les températures nécessaires pour cette dernière phase dépendent de la nature du support et de l’émail ; elles peuvent atteindre 1 100 à 1 150 °C.


Usages

Alors que les poteries de terre cuite ordinaire, faites à partir d’une pâte d’argile dégraissée au sable, au calcaire ou à la chamotte d’argile cuite, sont poreuses et utilisées de ce fait pour des usages grossiers (drains, pots à fleurs), les poteries vernissées au vernis plombeux sont imperméables. Elles forment ainsi le pont avec les faïences proprement dites, dont les qualités sont dues au choix plus poussé des matières premières, à la solidité conférée par la température de cuisson et surtout à l’émail, assurant une imperméabilité parfaite et une excellente résistance aux agents chimiques habituels. La faïence constitue un produit céramique d’emploi massif dans la construction (carreaux), dans le matériel culinaire (plats, assiettes) et, à un moindre titre, dans les objets de décoration (statuettes, vases). Certaines pâtes de faïence, plus siliceuses et cuites à plus haute température (1 280 °C), sont vitrifiées à cœur et ont naturellement une porosité nulle ou faible. Chamottées avec des terres cuites, elles conduisent aux grès. Ceux-ci sont revêtus d’un engobe, non pour accroître une imperméabilité déjà obtenue par la cuisson, mais pour leur donner une surface lisse. Cette surface est recouverte par un émail transparent, brillant et dur qui s’oppose aux salissures, d’où l’usage extensif de ces produits dans le sanitaire (cuvettes de lavabos, baignoires, etc.).

I. P.

➙ Céramique / Émail / Porcelaine / Poterie / Produit réfractaire.

 M. Haussone, Technologie céramique générale : faïences, porcelaines (Baillière, 1954).