Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
E

Evtouchenko (Ievgueni Aleksandrovitch) (suite)

Poète doué d’une très grande facilité, Evtouchenko n’innove guère, sinon en matière de rimes ; mais il applique avec virtuosité les leçons de la poésie russe moderne, dont il a assimilé les rythmes libérés, les recherches d’expressivité sonore et les structures associatives. Il excelle dans l’évocation concrète de scènes et de détails réalistes qui s’insèrent en général dans un ample mouvement oratoire, parfois élargi en suites narratives (Stantsia Zima [la Station Zima], 1956) ou en cycles épiques (Bratskaïa GES [la Centrale hydro-électrique de Bratsk], 1965). À l’exemple de Maïakovski, son principal modèle, il prend ses sujets dans l’actualité et place son propre personnage au centre de son œuvre, faisant ainsi de la poésie lyrique une forme d’engagement politique et de ce dernier une question de morale personnelle.

Cette attitude, jointe à un tempérament de lutteur et de tribun ainsi qu’à une remarquable sensibilité aux courants profonds de l’opinion, fait de lui, à partir de 1955-56, le héraut (et le héros) d’une génération « critique », éveillée de son sommeil dogmatique par la « déstalinisation » et qui, faute d’une presse d’opinion, cherche dans la poésie l’expression de ses aspirations. Ses vers, d’abord récités devant de vastes auditoires (notamment au cours des « journées » annuelles de la poésie, à partir de 1955), dénoncent au nom de l’idéal révolutionnaire l’hypocrisie des bureaucrates qui s’en réclament. Il n’hésite pas à y soulever les questions brûlantes qui divisent l’opinion : celle des survivances du stalinisme (Nasledniki Stalina [les Héritiers de Staline], 1963), celle de l’antisémitisme (Babi Iar, 1961). Il ose faire état de ces dissensions dans une Autobiographie précoce (1963), publiée en français et destinée au public occidental, aux yeux duquel il passe pour l’un des leaders du mouvement « libéral », ce qui lui vaudra de sévères réprimandes des autorités officielles, réprimandes suivies d’une autocritique. Ses nombreux voyages à l’étranger (notamment aux États-Unis, à Cuba, en France, en Italie, en Espagne, au Moyen-Orient) lui inspirent des poèmes « internationalistes », tandis que la note patriotique se fait plus insistante dans les œuvres récentes, inspirées par des séjours dans le nord de la Russie (recueil Kater sviazi [la Vedette de liaison], 1966) ou par des réflexions sur l’histoire de son pays (cycles Bratskaïa GES [la Centrale hydro-électrique de Bratsk] et Kazanski Ouniversitet [l’Université de Kazan], 1970).

M. A.

Éwés, Éoués ou Éhoués

Ethnie du littoral du golfe de Guinée.


Elle est à peu près équitablement répartie entre le Ghāna (500 000 personnes) et le Togo (400 000), dont elle constitue plus d’un tiers de la population. Elle occupe une région de lagunes côtières et de savanes intérieures jusqu’à environ 150 km au nord, où se trouvent d’assez fortes collines. Cette ethnie fait partie du groupe linguistique kwa (nigéro-congolais).

Connaissant des relations commerciales très anciennes avec l’Europe, c’est une société qui a subi des transformations considérables. Au début du siècle, les Éwés étaient répartis en cent vingt sous-tribus indépendantes à base territoriale. Mais ils n’ont jamais véritablement formé d’unité politique fédérale ou confédérale. La sous-tribu, le dou, peut comprendre de quelques dizaines à quelques milliers de personnes. L’organisation sociale et politique est fondée sur des patrilignages exogames avec un principe de résidence virilocal. Chaque dou est dirigé par le plus ancien du lignage royal, choisi par l’assemblée des chefs, qui comprend les notables de la famille royale et les chefs militaires. La succession est à la fois héréditaire et élective.

Le pays connaît deux saisons : l’une sèche, de novembre à mars, et l’autre humide. Du point de vue agricole, les Éwés cultivent le maïs, l’igname, l’arachide, les haricots, le coton. Ils extraient le sel des lagunes et en font le commerce. Enfin, ils pratiquent la pêche en mer et en lagune. À la fin de la saison, on répartit les bénéfices de la pêche entre les propriétaires du bateau, du filet et ceux qui avaient des responsabilités dans l’organisation de la pèche. Il faut aussi noter les fameux tissages en coton teint.

Les croyances religieuses des Éwés sont centrées autour de trois groupes d’êtres surnaturels, auxquels correspondent trois groupes d’officiants. Ce sont : le culte de Mamwu, dieu suprême et créateur ; le culte des esprits Trowo, créés par ce dernier et servant d’intermédiaires entre lui et les hommes (il y en avait environ 150) ; enfin le culte des ancêtres.

J. C.

 M. Manoukian, The Ewe-Speaking People of Togoland and the Gold Coast (Londres, 1952). / F. N’Sougan Agblémagnon, Sociologie des sociétés orales d’Afrique noire : les Ewe du Sud-Togo (Mouton, 1969).

examen

Épreuve ou séries d’épreuves que subit un candidat, en vue de constater ses aptitudes.


Dans leur définition la plus large, les examens ne sont pas une création récente ; toutes les sociétés, qu’elles soient traditionnelles ou primitives, antiques ou historiques, ont leurs rites de passage : une vérification de la bonne acquisition par l’adolescent du savoir minimal exigé par la vie en société, vérification qui, si elle se révèle positive, permet au jeune homme d’entrer dans la vie adulte. Aux îles Andaman, le jeune indigène doit subir de longs jeûnes qui lui permettent d’éliminer certains tabous alimentaires, tandis que le jeune Arunta d’Australie doit endurer de nombreux sévices (dents arrachées, incisions de toutes sortes) avant d’obtenir le bull-roarer, bâton sacré que l’on pourrait qualifier de « diplôme de maturité ». À côté de ces diplômes que doit acquérir tout homme adulte, on trouve aussi des examens techniques, telles les petites guerres cruelles des Spartiates contre leurs esclaves ilotes ou les visions que doivent avoir les Indiens Pueblos s’ils veulent devenir des combattants qui auront l’appui des dieux.