Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
E

évolution biologique (suite)

Et la même succession s’observe dans les faunes. La faune cambrienne comprend de nombreux groupes bien différenciés : Spongiaires, Cœlentérés, Annélides, Mollusques, Brachiopodes, Crustacés, Trilobites. Au Silurien, les groupes se perfectionnent et, au Silurien supérieur, les Vertébrés apparaissent : le plus ancien représentant, le Jamoytius, découvert en Écosse, appartient à la classe des Agnathes (absence de mâchoire inférieure). Les Poissons placodermes, avec un squelette cartilagineux, des plaques dermiques et une mâchoire inférieure, sont connus au Dévonien ; les Sélaciens datent du Dévonien supérieur. Au Carbonifère et au Permien, les Myriapodes, les Insectes, les Arachnides sont largement représentés. Les Stégocéphales, premiers tétrapodes, nés au Dévonien à partir de Poissons Crossoptérygiens, se diversifient, et au Permien ils donnent naissance aux premiers Reptiles adaptés à la vie terrestre.

Les Reptiles présentent un extraordinaire développement au Secondaire ; ils occupent tous les milieux. Les Crustacés supérieurs (Décapodes), les Insectes à métamorphose complète apparaissent. Les Ammonites sont à leur apogée, alors que déclinent et disparaissent les Échinodermes à tige, les Mérostomes, les Trilobites. Les premiers Mammifères, alliés aux Reptiles Ictidosauriens, se manifestent au Jurassique ; les Mammifères placentaires apparaîtront plus tard, au Crétacé. Les plus anciens Oiseaux, alliés à des Reptiles, sont connus au Jurassique supérieur. L’ère tertiaire se caractérise par la disparition des Reptiles géants et l’extraordinaire épanouissement des Mammifères, dont tous les ordres actuels datent de cette époque.

Le Quaternaire verra la naissance de l’Homme.

L’apparition des flores et des faunes suit une évolution progressive, les formes les plus simples étant toujours les plus anciennes ; on constate une concordance rigoureuse entre l’apparition d’un groupe et la place que lui confère son organisation. Par exemple, parmi les Vertébrés, les Agnathes sont suivis par les Poissons, qui précèdent les Reptiles, auxquels succèdent les Oiseaux et les Mammifères.

• Les formes intermédiaires. Le passage d’une organisation simple à une organisation plus complexe repose sur la découverte de formes intermédiaires : elles présentent une structure composite, comportant une mosaïque de caractères anciens et nouveaux, elles sont synthétiques. Selon le nombre et l’importance accordée aux caractères, le type de passage appartiendra encore au groupe souche ou sera classé dans un groupe nouveau. Les exemples de formes intermédiaires sont assez fréquents chez les Vertébrés. Les Ichtyostégidés découverts dans le Dévonien du Groenland relient les Poissons Crossoptérygiens Rhipidistiens aux Amphibiens Stégocéphales du Carbonifère. Ichtyostega possède une ceinture pelvienne et des membres du type Amphibien, alors que le crâne à voûte basse est celui d’un Poisson Crossoptérygien. L’Amphibien Protobatrachus Massinoti des schistes gréseux triasiques du nord de Madagascar représente une forme ancestrale des Amphibiens Anoures. Il présente de nombreuses ressemblances avec les Anoures (peau nue, crâne) et aussi quelques caractères squelettiques de Stégocéphales : vraisemblablement, les Amphibiens Anoures dérivent des Amphibiens Stégocéphales. Autre forme intermédiaire : le Conodectes, ou Seymouria (Permien inférieur du Texas), classé tantôt parmi les Amphibiens Stégocéphales par suite de sa larve têtard, tantôt parmi les Reptiles primitifs (Cotylosauriens) en raison de l’abondance des caractères reptiliens. Les Mammifères proviennent de petits Reptiles Cynodontes et Ictidosauriens du Trias, porteurs de caractères mammaliens accusés ; ceux-ci ne sauraient être des coïncidences et témoignent réellement d’une filiation entre Reptiles et Mammifères. L’Archæopteryx* des schistes de Solnhofen représente l’exemple classique d’une forme intermédiaire entre les Reptiles et les Oiseaux. Il est classé dans les Oiseaux, mais son vol différait certainement de celui des types actuels.

Ces formes intermédiaires correspondent-elles à l’archétype souche ? Probablement non, mais elles représentent des jalons, rares et d’autant plus précieux, entre deux types d’organisation dont la genèse paraît ainsi moins obscure.

• Les séries continues. Dans certaines conditions privilégiées, le dépôt des terrains sédimentaires s’effectue sans discontinuité, sans changement d’aucune sorte pendant de longues durées. La falaise crayeuse de Margate (sud de l’Angleterre), d’âge turonien et sénonien, haute de 120 à 150 m, s’est édifiée pendant 3 à 4 millions d’années dans une mer peu profonde et calme. Cette falaise contient de nombreux fossiles d’un Oursin régulier du genre Micraster ; en raison de la vie pélagique des larves, les adultes ne descendent pas obligatoirement les uns des autres, mais ils constituent un « ensemble rangé » du type Micraster pendant un grand nombre d’années. Plus de 2 000 spécimens ont été recueillis avec soin par A. W. Rove. De l’ensemble des échantillons ressort une évolution intéressant la forme, l’ornementation du test, le déplacement de la bouche vers la périphérie.

Les Paludines de Slavonie et les Planorbes de Steinheim constituent également des séries continues dans les sédiments qui se sont déposés dans les lacs d’eau douce. De bas en haut, les coquilles fossiles, d’abord lisses, deviennent de plus en plus ornées par la présence de carènes qui portent des tubercules. À l’origine, une seule espèce, qui progressivement se diversifie en plusieurs lignées. Le même phénomène s’observe chez les Paludines quaternaires et actuelles : aux formes lisses succèdent des formes carénées, qui sont suivies à leur tour par des formes tuberculées. Une évolution analogue concerne les Planorbes du lac miocène de Steinheim (Wurtemberg). Cette sériation d’espèces dans des sédiments épais et continus s’observe dans divers groupes : Ammonites, Pectens, Oursins, Brachiopodes ; elle témoigne d’une variation extrêmement lente.