Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
E

Europe (suite)

• Un rapprochement des législations était également nécessaire pour que les trois libertés profitent à tous sans discrimination. Ainsi, les salaires suivent une tendance à l’égalisation vers le haut (surtout sensible aux Pays-Bas et en Italie) ; de même, les catégories de personnes bénéficiant de la sécurité sociale ont été élargies (cas de la France). En matière de fiscalité, surtout, de grandes différences existaient entre les pays, certains insistant sur les impôts directs, d’autres sur les impôts indirects, et chacun pouvant se servir de mouvements fiscaux pour équilibrer sa politique financière. Pour l’instant, la T. V. A. a été généralisée à tous les pays membres suivant des taux qui devront peu à peu se rejoindre. D’autre part, des normes communautaires techniques ont été établies pour un certain nombre de produits. Enfin, le droit des sociétés nécessite une profonde refonte pour faciliter la fusion des entreprises de la communauté ; la Commission a établi un projet de statut d’entreprise européenne, concrétisant un véritable droit européen.

• La politique de concurrence doit être sévèrement réglementée pour être bénéfique, toute barrière douanière tombée. Une législation communautaire interdit donc les ententes (sauf les « petites ententes ») et les aides que les États accordent à certains secteurs industriels, sauf celles que justifient des politiques régionales ou sociales. Les fusions et concentrations d’entreprises n’ont pas besoin d’autorisation (sauf dans le secteur charbon-acier), mais une interdiction peut néanmoins intervenir.

• Les politiques sectorielles.

• L’Europe verte.
Des politiques sectorielles, la politique agricole est l’une des plus difficiles à mettre sur pied ; elle a déjà demandé au Conseil un nombre important de « sessions marathons ».

La difficulté vient de la situation de l’agriculture en Europe occidentale, insérée dans un ensemble très complexe de problèmes humains, sociaux, financiers et économiques. La Communauté doit faire face à de multiples exigences, parfois contradictoires : améliorer le revenu des agriculteurs, améliorer la productivité agricole, adapter la production à la consommation et aux marchés, adapter les anciennes structures à une organisation nouvelle, etc. Elle mène donc une quadruple politique commune : commerciale, structurelle, sociale et de marché. La session marathon des 22-25 mars 1971 a abouti à une résolution d’actions communes comprenant des mesures en faveur des agriculteurs qui souhaitent cesser leur activité agricole et de ceux qui continuent leur activité agricole, des mesures en faveur de l’information et de la formation professionnelle, des mesures visant à améliorer la commercialisation des produits agricoles et une politique d’aide, en se fondant sur les deux rapports que la commission Mansholt avait présentés en 1960 et en 1968.

Le F. E. O. G. A. (Fonds européen d’orientation et de garantie agricole) a été fondé en janvier 1962 et comprend 2 sections ; la section « garantie » est chargée des restitutions à l’exportation vers les pays tiers, des interventions sur le marché intérieur, des aides communautaires ; la section « orientation » subventionne les projets d’aménagements structurels. Il a été alimenté par la contribution des pays membres jusqu’en 1970 (fin de la période transitoire pour la mise en place de la politique agricole) et depuis par des ressources propres.

• La politique industrielle, la politique des transports et celle de l’énergie.
Le secteur industriel, en évolution rapide, n’a été abordé que tardivement par la Communauté, en dehors de la politique spécifique du charbon et de l’acier, menée par la Haute Autorité, qui établissait des programmes prévisionnels indicatifs, fixait les prix maximaux et minimaux à l’exportation et pouvait orienter les décisions des entreprises par les prêts qu’elle fournissait ou garantissait. Quelques actions spécifiques ont été entreprises pour la recherche scientifique et technique, pour les industries en régression, pour les investissements des industries lourdes, pour les industries de pointe, mais ces politiques communes restent encore très ponctuelles.

La politique des transports préoccupa par contre immédiatement la Communauté, en raison de l’importance de ce secteur pour tout le reste de l’économie et de son impact sur les politiques régionales et sectorielles. Il a donc fallu harmoniser les obligations des services publics et la réglementation du travail et des régimes de sécurité sociale pour les salariés de ce secteur, régler le problème des capacités de transport et souligner l’importance dans ce secteur de la transparence du marché et de la non-discrimination.

La politique de l’énergie avait été abordée dès 1952 (après le traité de Paris) pour le secteur charbonnier. La C. E. E. se chargea, quant à elle, des domaines pétroliers et des gaz (tandis qu’à la C. E. E. A., enfin, était réservé le domaine nucléaire), un comité interexécutif étant créé pour permettre la confrontation des diverses politiques et l’unification des institutions. Une politique commune était, en effet, indispensable pour assurer la sécurité de l’approvisionnement et l’aide aux charbonnages, décider quelle part donner à la recherche nucléaire et à quel genre de recherche (le centre commun de recherche nucléaire assure l’exécution, par quatre établissements communautaires et les établissements nationaux, d’un programme et passe des contrats de recherche avec des individus ou des entreprises).

• Les politiques spécifiques

• Les deux éléments essentiels de la politique scientifique au niveau communautaire sont l’intervention à plusieurs dans des opérations trop importantes pour un seul pays et l’information pour éviter les doubles emplois ; ces actions restent encore trop souvent au niveau de la simple coopération.

• Par contre, la Communauté essaie de faire une large place aux politiques régionales. En effet, l’intégration économique progressive pourrait accentuer encore la disparité entre les régions de la Communauté : « Le problème régional n’est pas un problème partiel mais un problème total, écrit Albert Borschette, il s’agit de savoir si la Communauté reste une communauté d’échanges et de tarifs, ou devient une véritable communauté de développement. » Le traité de la C. E. E. prescrivait d’ailleurs que « à la responsabilité des États membres s’ajoute une responsabilité de la Communauté à l’égard de certains problèmes régionaux d’intérêt commun ». L’Italie du Sud, la Bretagne et l’Alsace, par exemple, ont déjà bénéficié de cette politique d’aide. La Communauté est aussi l’organe idéal de l’élaboration d’une programmation économique commune pour les régions frontières.