Eure. 27 (suite)
Pendant près d’un siècle, la population n’a cessé de décroître par la combinaison négative de l’émigration et du déficit des naissances sur les décès. Ainsi, entre 1841 et 1921, le département a perdu plus de 120 000 habitants, soit près du tiers de la population du début du xixe s. Entre les deux guerres mondiales, l’Eure comptait à peine plus de 300 000 habitants. Cette hémorragie s’explique par la sous-industrialisation et la sous-urbanisation du département pendant cette période, la crise d’activités traditionnelles comme le textile ou la ferronnerie et le malthusianisme accusé jusque dans les campagnes des familles d’artisans et de petits propriétaires paysans.
Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, chaque recensement enregistre au contraire une vigoureuse progression de la population du département. Entre 1946 et 1975, celle-ci augmente de 107 000 habitants pour dépasser le chiffre de 420 000 personnes. L’accroissement naturel est maintenant assez sensible. L’émigration a été enrayée et même remplacée par un notable courant d’immigration. Une telle mutation ne peut s’expliquer que par une transformation profonde des conditions sociales et économiques.
La proximité de Paris, l’influence directe de la région parisienne, en accroissement, conditionnent la vie du département, dont la préfecture, Évreux, ne se trouve qu’à une centaine de kilomètres de la capitale, à environ une heure de train de celle-ci.
L’expansion industrielle des vingt dernières années s’est manifestée avec vigueur moins par la survivance d’activités traditionnelles comme le textile de Louviers ou la métallurgie de l’Ouche (Verneuil-sur-Avre, Breteuil, Rugles...) que par l’implantation de nouvelles usines dirigées par des firmes parisiennes. La taille des établissements est généralement petite ou moyenne (très rarement plus de 1 000 ouvriers, le plus souvent moins de 500) ; la gamme des fabrications est très variée, avec une nette prépondérance des fabrications légères dans la métallurgie, la transformation des matières plastiques, la construction de matériel électrique ou électronique. Une nette dissymétrie oppose la partie occidentale du département, peu industrialisée et où les usines restent isolées autour de Pont-Audemer, de Bernay, de Rugles, à la partie orientale, plus proche de Paris et où les vallées de l’Andelle, de la Seine (Vernon, Gaillon, Les Andelys), de l’Eure et de l’Avre (Verneuil, Nonancourt, Louviers, Pacy...) constituent avec Évreux une véritable nébuleuse industrielle.
Les résidences secondaires de Parisiens se sont aussi multipliées, modifiant profondément la vie des communes rurales. L’Eure ne manque pas d’attraits, à très courte distance de la capitale. En plus de quelques beaux sites historiques comme Château-Gaillard ou l’abbaye du Bec-Hellouin, lieux de promenades dominicales, les vallées surtout retiennent chaque fin de semaine des citadins, auxquels elles offrent des paysages verdoyants et calmes, des rivières pour la pêche, des forêts toutes proches. Ainsi, vallées, lisières de forêts, vieux hameaux pittoresques se trouvent-ils maintenant jalonnés de fermettes restaurées ou de domaines luxueux.
L’agriculture n’en demeure pas moins une activité essentielle. Les exploitations agricoles sont inégalement concentrées, avec une nette dominance des très grandes fermes dans le Vexin, des grandes exploitations sur les plateaux du Neubourg et de Saint-André, de petites ou moyennes exploitations (moins de 50 ha) à l’ouest du département. Les plateaux limoneux se consacrent surtout aux cultures mécanisées de céréales (blé, orge, maïs) et de plantes industrielles (betterave sucrière, éventuellement lin), sans pour autant négliger totalement l’élevage. De grands poulaillers semi-industriels ont été édifiés pour livrer d’importantes quantités d’œufs et de poulets de chair au marché parisien. À l’ouest, l’élevage des vaches laitières l’emporte, accessoirement associé dans les plus grandes exploitations à quelques cultures ou à l’embouche.
Très dépendant de la proximité de Paris et de celle de Rouen (la capitale régionale), le département ne comporte aucune grande ville. Il est animé par un réseau dense de villes petites ou moyennes, comme Évreux, chef-lieu et principal centre industriel et commercial, ou Vernon (23 559 hab.), Louviers (18 874 hab.), Bernay (11 263 hab.), Pont-Audemer (10 011 hab.).
A. F.
➙ Évreux.