Esturgeon (suite)
Les Acipenséridés
Les Acipenséridés groupent quatre genres distincts. L’Esturgeon commun de France, qui remonte encore la Gironde et l’Adour, est Acipenser sturio. Il existe des espèces voisines en Europe centrale (A. ruthenus) et en Amérique du Nord (A. rubicundus). Le Danube abrite le géant de la famille, le Bélouga (Huso huso), dont le poids peut dépasser la tonne. Une seule femelle fournit alors 100 kg de caviar. À partir de la vessie gazeuse de ces Poissons, on fabrique l’ichtyocolle, utilisée pour clarifier les vins. Les Scaphirhynchus sont américains, et les Kessleria asiatiques.
Les Esturgeons ont un rostre antérieur et une bouche située ventralement qui évoquent l’habitus des Requins ; 4 barbillons précèdent l’ouverture buccale. Le corps porte 5 rangées longitudinales de plaques osseuses : 1 dorsomédiane, 2 latérales et 2 ventrales, qui donnent à l’animal, en coupe transversale, une forme pentagonale. Ce sont des Poissons des eaux tempérées et tempérées froides de l’hémisphère Nord, surtout abondants en Asie et en Europe orientale. Si certaines espèces de petite taille, comme le Sterlet d’Europe centrale (A. ruthenus), sont dulcicoles, les autres sont des migrateurs potamotoques qui se reproduisent dans les rivières et se nourrissent en mer, sur les fonds vaseux du plateau continental ; leurs proies sont surtout constituées de Mollusques, de Vers et de petits Poissons. La montée commence au printemps, mais, à l’inverse des Saumons, les Esturgeons ne remontent pas les rivières jusqu’à leur cours supérieur. Les femelles pondent, en mai-juin, des millions d’œufs minuscules, qui éclosent très vite. Les alevins passent un an en eau douce, puis gagnent les estuaires et de là les fonds marins jusqu’à 150 m environ. La croissance est très lente ; la maturité sexuelle n’est atteinte qu’à 20 ans. Les adultes reviennent en mer après chaque frai et peuvent vivre un nombre respectable d’années (un siècle, prétend-on).
Les Esturgeons deviennent de plus en plus rares, non seulement par suite de la pêche intense qu’on en a faite, mais aussi et surtout par suite de la pollution des eaux douces, qui s’oppose à leur reproduction.
Les Polyodontidés
Les Polyodontidés, seconde famille d’Acipensériformes, ont la peau nue — elle contient, comme celle des Esturgeons, de petites écailles incluses dans la peau, mais ne comporte pas les rangées de scutelles longitudinales — et un rostre allongé et aplati en pelle, d’où leur nom de Spatules. Contrairement aux Esturgeons prédateurs, ils ont un filtre branchial, et leur nourriture est microphage. On prétend qu’ils utilisent leur rostre pour fouiller les fonds vaseux, mais l’observation n’a rien montré de tel. On connaît deux espèces de Spatules, l’une du Mississippi (Polyodon spathuma), l’autre du Yangzi (Yang-tseu) [Psephurus gladius] ; la première peut atteindre 2 m et peser 75 kg, la seconde, bien plus grande, atteindrait 4 à 6 m. On sait peu de chose de leur reproduction. Les œufs constituent un excellent caviar.
Pour fabriquer le caviar, on extrait les œufs des femelles pêchées, puis on les bat ou on les frotte sur un tamis pour les séparer de leurs coques, et enfin on leur ajoute du sel pour en assurer la conservation.
R. B.
J. P. Lehman et L. Bertin, « Super-ordre des Chondrostéens » in P.-P. Grassé (sous la dir. de), Traité de zoologie, t. XIII, fasc. 3 (Masson, 1958).