Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
E

épiphytes (plantes) (suite)

Ces plantes possèdent toutes de la chlorophylle ; elles n’ont pas d’autre source d’aliments carbonés que la photosynthèse. Sur ce point, elles ne diffèrent guère des autres végétaux verts. Par contre, en ce qui concerne la nutrition minérale, réalisée chez les autres plantes à l’aide des racines, les épiphytes, portées soit par d’autres êtres vivants, soit même parfois par un support inerte tel qu’un fil de fer, utilisent uniquement les substances apportées par l’air : minuscules poussières arrachées au sol ou dissoutes au passage par les gouttes de pluie.

À cette fin, les plantes épiphytes possèdent des organes spécialisés. Certaines, comme Tillandsia, portent sur leurs tiges et leurs feuilles des poils absorbants pluricellulaires, assez compliqués, qui, d’une part, s’enfoncent dans les tissus et, d’autre part, s’étalent à la surface de la tige. La paroi externe des cellules est couverte d’un mucilage hygroscopique épais, capable de retenir l’eau de pluie, la rosée et même la vapeur d’eau de l’air ambiant.

D’autres, Monocotylédones pour la plupart, laissent pendre vers le sol de longues racines aériennes dépourvues de poils absorbants, mais qui sont recouvertes de tissus morts réduits à leurs membranes squelettiques ; les cellules, vides de cytoplasme, sont remplies d’air. L’eau de pluie, la rosée et même le brouillard y pénètrent, et c’est dans cette structure que les tissus vivants internes puiseront l’eau indispensable à la plante. Ce velamen joue en somme le rôle d’une éponge. On connaît de telles dispositions chez certaines Orchidées (la vanille par exemple), Broméliacées, Aracées : certains Monstera exploités au Mexique pour leurs fruits et connus en Europe comme plantes ornementales de serre peuvent vivre fixés aux arbres après avoir perdu leur liaison avec le sol, et dans ce cas leurs longues racines pourvues de voile assurent seules le ravitaillement en eau.

Un autre dispositif réalisé dans la nature s’observe chez certaines Broméliacées qui portent des feuilles en forme de coupe. Certaines recueillent ainsi un demi-litre d’eau. Chez Nidularium, les feuilles forment une coupe rouge qui entoure les fleurs ; l’eau stagnante pénètre par les poils absorbants portés par la surface foliaire. Pour certaines espèces, cette eau n’est pas un simple appoint, mais est strictement indispensable à la vie et au développement de l’individu. Des citernes, souvent en forme de bulbe, existent aussi chez certaines Orchidées.

Enfin, de nombreuses épiphytes accumulent entre elles et leur support un peu d’humus, qui se gorge de l’eau des précipitations et maintient de l’humidité à la base de la plante. Il semble que ce soit le rôle du prothalle persistant de certaines fougères épiphytes comme Platycerium ; si, après développement du sporophyte, on arrache cette lame, de taille importante, la plante dépérit ; le prothalle, même mort et apparemment desséché, garde son rôle.

L’eau ainsi obtenue est bien pauvre en éléments minéraux par rapport à celle que les plantes enracinées dans le sol utilisent. L’absorption par les feuilles des poussières contenues dans l’atmosphère est, dans le cas d’un épiphytisme vrai, la seule explication de l’alimentation minérale du végétal. Or, des Tillandsia, vivant sur un support minéral, subsistent fort bien et ont une composition chimique (analyse de cendres) semblable à celle des individus fixés sur support vivant. Cela exclut donc tout apport éventuel de la plante hôte.

Les épiphytes sont le plus souvent, sous nos climats, des Mousses et des Lichens, qui encombrent les troncs et les branches de certains arbres. Dans les régions tropicales, on en trouve un bien plus grand nombre d’espèces, appartenant à tous les groupes autotrophes (Mousses, Fougères, Angiospermes). Ce mode de vie permet à des plantes de petite taille de se hausser à une hauteur où, dans la grande forêt, les rayons lumineux pourront les atteindre. En effet, dans ces zones, la densité de la végétation est telle que seuls les grands arbres reçoivent les rayons lumineux directement, les plantes plus basses se contentant de la faible lueur des rayons qui ont filtré à travers cette première couche. Mais l’adaptation des épiphytes à ce milieu leur permet de tourner la difficulté et de subsister dans des conditions difficiles.

J.-M. T. et F. T.

Épire

Province grecque qui, longtemps isolée, devint pour peu de temps, à l’époque hellénistique, un grand royaume.



L’Épire antique

L’Épire, au nord-ouest de la Grèce, est séparée de la Thessalie par la chaîne du Pinde, si difficile à franchir. Si elle touche vers le sud au golfe d’Ambracie (auj. Arta), elle est baignée à l’ouest par la mer Adriatique, et sa côte est des plus inhospitalières. La contrée resta ainsi très longtemps isolée du reste du monde grec, malgré certains efforts des Corinthiens pour s’installer dans la région (au viiie s. av. J.-C., ils avaient créé dans l’île de Corfou la colonie de Corcyre, qui devint très vite une puissante cité commerçante). L’intérieur du pays est rude ; des ravins escarpés, des vallées profondes qu’il est souvent impossible de remonter, séparés par d’abrupts chaînons rocheux parallèles, le découpent. Y vivaient de solides montagnards, Molosses, Thesprotes, Chaoniens..., qui se groupaient en clans, en tribus souvent hostiles, sans connaître l’organisation des cités qui sont la marque de la civilisation grecque.

Un pays si particulier n’était pas sans charmes : les Grecs, qui en apercevaient de loin les sommets embrumés, en avaient fait un pays de légendes. C’est au cœur même de l’Épire, à Dodone, que se trouvait l’oracle de Zeus (le premier sans doute des oracles panhelléniques), qui parlait en faisant bruire la ramure de chênes millénaires tandis que les selloi, prêtres aux pieds nus, interprétaient les prescriptions divines.

Les rois qui régirent si longtemps la contrée surent de même se draper des splendeurs de la légende épique. Néoptolème, dit Pyrrhos, le fils d’Achille, fut le premier à s’y installer, accompagné d’Andromaque, la veuve d’Hector, qui lui donna des fils, descendants d’Héraclès. Ce n’est pourtant que sous le règne de Tharypas, à la fin du ve s. av. J.-C., que les tribus de l’Épire furent véritablement groupées en un seul royaume, dont les rois n’étaient d’ailleurs guère puissants : leur gouvernement pouvait passer pour constitutionnel, limité par des institutions qui garantissaient l’autonomie et les particularismes des diverses parties du peuple épirote ; ils surent pourtant jouer les chefs de guerre et unir leurs sujets dans de vastes expéditions qui leur assurèrent la réputation de valeureux soldats. On vint même d’Italie, à la fin du ive s., pour s’assurer le concours d’Alexandre Ier le Molosse.