épargne (suite)
Partant des faits, l’analyse économique contemporaine définit bien l’épargne comme la fraction non consommée du revenu, mais elle souligne que l’épargne est loin d’être considérée négativement par les individus et par les ménages comme un reste. Cette fraction peut soit financer directement des investissements, soit être placée, sous une forme ou une autre, en créances (actions ou obligations), ou encore être simplement conservée sous forme de monnaie* (épargne liquide). Dans tous les cas, l’épargne a un aspect précis et volontariste qui s’exprime à travers le désir positif de constituer un patrimoine : la structure de celui-ci à un moment donné reflète donc, de façon plus ou moins fidèle, l’ensemble des désirs spécifiques d’une personne. Il résulte de cette observation une conception de l’épargne plus active. Au lieu de reprendre la seule différence entre revenu et consommation, on cherche à appréhender l’épargne à partir de ses divers emplois : placements, variation des encaisses, autofinancement des investissements, remboursement des emprunts.
Les motivations de l’épargne chez les particuliers et dans les ménages
Il est devenu nécessaire d’encourager l’épargne à s’investir, d’autant que les ménages tendent aujourd’hui à épargner relativement moins. Les pouvoirs publics des différents pays, pour encourager les ménages à épargner, ont pris diverses mesures allant de l’aménagement de la fiscalité à la mise en place de formules institutionnelles rendant les placements plus attrayants et plus faciles.
Les motivations susceptibles de déclencher l’épargne chez les particuliers ou dans les ménages, ou de l’orienter vers une forme plutôt que vers une autre, sont multiples. On peut, avec Raymond Barre, en distinguer un certain nombre.
• L’importance du revenu influe, à la base, de manière extrêmement significative : l’épargne peut d’autant plus facilement se constituer que le revenu est assez important pour largement couvrir les dépenses de consommation du particulier ou du ménage en laissant des excédents.
• La propension à consommer, finement analysée par Keynes, ne doit pas être trop élevée, l’épargne tendant à s’analyser comme un phénomène résiduel, venant après l’acte de consommation. Si le revenu s’accroît sensiblement, Keynes note d’ailleurs que la consommation n’augmentera pas d’autant et que l’épargne, donc, tendra, par voie de conséquence, à croître.
• La stabilité (ou l’instabilité) monétaire a un effet déterminant, dans la mesure où elle attire l’épargne ou, au contraire, en détourne les particuliers ou les ménages : en France, l’indexation des emprunts fut, à plusieurs reprises entre 1945 et 1958, pratiquée, en vue d’accroître le volume des placements en obligations.
• Le niveau de la fiscalité frappant les objets d’épargne est également important. La parafiscalité (sécurité sociale), notons-le, tendant à établir des institutions de répartition à la place de structures de capitalisation, ne prédispose pas à la formation d’une épargne volontaire.
• L’importance du patrimoine de l’épargnant peut tendre, à partir d’un certain niveau, à influer sur le taux d’épargne en raison inversement proportionnelle à cette importance. L’épargne est guidée, en effet, par un mobile de sécurité : si ce mobile est déjà assumé par la possession d’un patrimoine important, l’épargne peut tendre à diminuer dans sa formation.
J. L.
G. R.
➙ Autofinancement / Bourse de valeurs / Capital / Consommation.
E. A. Lisle, l’Épargne et l’épargnant (Dunod, 1967). / A. Dauphin-Meunier, le Jeu de l’épargne et de l’investissement à l’âge industriel (Payot, 1969).