Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
E

ennemis des cultures (les) (suite)

Mesures prophylactiques

Elles visent à réduire la sensibilité d’une culture aux divers parasites. Les pouvoirs publics sont amenés à organiser le contrôle de l’état sanitaire des semences, l’organisation de quarantaines, la lutte contre les hôtes sauvages des parasites ou l’assainissement des zones sauvages de pullulation. L’agriculteur peut aussi intervenir par le choix des cultures (élimination des plus sensibles), des graines, plants ou greffons, ainsi que de ses techniques culturales (le travail du sol pour enfouir certains parasites, la date et la densité de semis ou de plantation pour adapter la plante aux parasites endémiques ou à ceux qui ont une forte probabilité de survenir). Enfin, l’élimination, dans les cultures peu denses, des pieds atteints, peut ralentir l’expansion d’une maladie contagieuse (vergers).

Un dernier moyen prophylactique est de sélectionner, chez les variétés cultivées, des caractères de résistance. La résistance aux mauvaises herbes est acquise par une meilleure vitesse de croissance et une modification des périodes de croissance.

Les facteurs de résistance aux insectes sont, en plus de la recherche de précocité :
— physiques : facteurs d’attraction (couleurs et formes), pilosité, dureté des cuticules, etc. ;
— chimiques : variations des teneurs en certaines substances plus ou moins attractives ;
— physiologiques : croissance rapide, réactions tissulaires efficaces.

Pour les maladies biotiques, on sélectionne, dans une conception analogue, sur des caractères :
— physiologiques : recherche d’incompatibilités métaboliques entre l’hôte et le parasite ; accélération de la mort des cellules autour du point infecté pour en limiter l’extension (hypersensibilité) ;
— mécaniques : épaississement de membrane ;
— fonctionnels : recherche d’une fermeture des stomates aux humidités favorables à l’infection.


La protection des plantes

Elle peut être envisagée, en ce qui concerne les parasites et les maladies biotiques, de différentes manières : par création d’un milieu défavorable à l’ennemi, par lutte biologique et par destruction directe.

La création d’un milieu défavorable se fait surtout par des traitements physiques ou chimiques. Le traitement du sol est fait sur la ligne de plantation ou sur toute la surface pour désinfecter : fumigations chimiques, chauffage à la vapeur, inondations (riz), etc. Le traitement de la plante hôte consiste à déposer sur celle-ci des substances toxiques aux ennemis. Les traitements systémiques consistent à faire véhiculer, par la sève des plantes, des produits toxiques pour les ravageurs ; ceux-ci sont atteints dès qu’ils commencent leur attaque. De délicats problèmes de résidus sont alors posés, mais ces traitements présentent une bonne efficacité préventive.

Une protection physique des plantes est possible : filets contre les oiseaux, plantes pièges (les semis de betteraves à graine sous couvert d’orge sont nettement moins atteints par les pucerons que les semis en sol nu). Des modifications nutritionnelles, surtout par le biais d’un déséquilibre, rendent les plantes plus sensibles : l’excès d’azote, par rapport aux mycoses, par exemple. De même, des variations de milieu (brise, vent) améliorent la résistance.


La lutte biologique

Elle exige trois conditions générales de réussite :
— découvrir un ennemi spécifique d’un parasite dans un milieu d’origine ;
— constater la possibilité pour cet ennemi de vivre dans un milieu d’introduction ;
— s’assurer qu’il a conservé sa spécificité.

Contre les mauvaises herbes, elle remporte des succès considérables pour les formations végétales uniformes de grande surface (savanes, forêts, steppes, ...) ; mais la lutte biologique est très difficile en région de polyculture, à cause de la fréquente parenté entre plantes cultivées et adventices. Pour les insectes, on fait actuellement un effort systématique d’inventaire de leurs ennemis et maladies ; la production industrielle de certains de leurs parasites est en cours. Mais les études sont beaucoup moins avancées en ce qui concerne les maladies biotiques. Il faut signaler par ailleurs des techniques de lutte biologique particulières contre les insectes. La diffusion des mâles stériles diminue le pourcentage de fécondation, donc de reproduction ; des substances attractives ou certaines hormones attirent les insectes dans des pièges où ils peuvent être détruits.

La destruction directe des parasites se fait essentiellement par des méthodes chimiques, car l’action doit être très rapide. Aussi celles-ci sont-elles souvent utilisées à des doses bien plus élevées que celles qui sont utilisées en prévention, bien qu’il s’agisse en général des mêmes produits.

C’est dans ces cas que l’on recherche surtout des substances rapidement dégradées (par des micro-organismes ou par le métabolisme de la plante traitée) pour limiter les résidus possibles.

Ces méthodes sont apparues progressivement, en liaison avec les progrès de la chimie, de la biologie (physiologie, pathologie, génétique), de l’écologie et de l’agronomie. La plupart du temps, elles sont encore considérées indépendamment les unes des autres. Mais une tendance récente consiste à concevoir une organisation globale de la lutte pour en accroître l’efficacité et réduire les coûts.


Organisation globale de la lutte contre les ennemis des cultures : lutte intégrée

L’idée est déjà ancienne que l’on doit pouvoir tenir compte, pour lutter contre un parasite donné, d’un modèle de relations avec le milieu calqué sur les écosystèmes naturels. La démarche de l’agriculteur est de déplacer l’équilibre d’un écosystème en faveur d’un de ses composants, la plante cultivée. On peut concevoir que, dans l’ensemble des autres composants, de nouveaux équilibres apparaissent, dont on doit pouvoir bénéficier. L’idée de lutte biologique est ainsi née, au début de ce siècle, puis, depuis une dizaine d’années, celle de lutte intégrée.