Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
E

enfant (suite)

D’autres jeux, plus spécifiquement éducatifs, visent à développer divers aspects de la personnalité enfantine à des âges différents : formation de l’adresse manuelle par des jeux d’emboîtage, de moulage, de construction de maquettes, de bricolage ; formation de l’esprit de logique par des jeux comme celui, par exemple, qui consiste à présenter dans un ordre cohérent plusieurs images relatives à une même histoire ; formation de l’esprit de créativité, soit sur le plan artistique, par la pratique de la pâte à modeler, des crayons de couleurs ou de la peinture et plus tard par l’apprentissage des émaux ou de la poterie, soit sur le plan scientifique, par des expériences élémentaires de chimie, des observations au microscope, etc.

À la limite du jeu et du travail se situent les jouets conçus pour parfaire ou contrôler l’enseignement scolaire par l’association de la question et de la réponse : par exemple, animaux sauvages à répartir selon un type de paysage. Les Américains envisageaient même, en 1969, la construction de robots susceptibles d’enseigner à l’enfant certaines opérations comme le laçage des chaussures. À ce stade-là, on peut d’ailleurs se demander si l’« amusement », qui, selon Pierre Larousse, « est le principal but » du jouet, reste toujours aussi vif.


L’évolution technique

Si une connaissance plus exacte de l’enfant a conduit à l’élaboration d’un univers mieux adapté à ses besoins, cette évolution s’est faite dans le cadre des progrès techniques, dont l’enfant, comme l’adulte, a bénéficié.

La prolifération de matières nouvelles d’origine chimique a transformé son habillement, son mobilier et ses jouets. Le tissu extensible en mousse de polyamide s’est imposé dans l’habillement dès le premier âge, et cela d’autant plus facilement qu’il prolonge la durée d’un vêtement. Les matières synthétiques de type acrylique (Dralon, Courtelle, Leacryl), polyamide (Dropnyl, Helanca, Nylon, Rilsan) ou polyester (Dacron, Diolen, Tergal) tendent de plus en plus à remplacer la laine ou à se mélanger à elle pour en faciliter l’entretien ; de plus, elles ont permis l’extension des fourrures synthétiques lavables. Le coton reste en bonne place en raison de son aspect frais et pimpant, mais il est le plus souvent traité (coton et viscose) pour ne nécessiter qu’un léger repassage, ou tissé sous forme de jersey. La ouate de cellulose et les couches en plastique ont rendu la lessive désormais inutile dans ce domaine. Le plastique sert aussi bien à enduire des tissus qu’à fabriquer le biberon, l’assiette incassable, la baignoire portative ou le mobilier. Des landaus à coque de plastique moulé ont fait leur apparition. Le jouet, lui-même, a subi une transformation identique : les animaux sont en fourrure de Nylon lavable, les poupons en plastique moulé incassable ou en chlorure de vinyle souple, et le cheval de bois d’antan se voit détrôné par le cheval en plastique stratifié floqué.

Les progrès techniques vont dans le sens d’une utilisation plus ingénieuse, et donc plus pratique, de l’objet concerné. Manipulation réduite pour un même usage avec un maximum d’efficacité : le chauffe-biberon électrique ou à capsule autochauffante, le stérilisateur par l’intermédiaire d’un liquide ou d’une gaine de plastique aseptisée illustrent ce renouvellement.

Le même esprit pratique préside à la conception du mobilier pour enfant. Lavable, il ne craint plus les coups de crayon ou les éraflures ; léger, il est, au sens strict du terme, vraiment « mobile » ; transformable, il s’adapte à l’évolution de l’enfant : lit à l’anglaise, dont un des côtés coulisse vers le bas, lit extensible grâce à un système de glissières, sièges à hauteur réglable. Un article, pour justifier son achat, doit pouvoir rendre un service durable, d’où la table à langer qui est en même temps baignoire ou commode, le landau qui devient porte-bébé, berceau, poussette et siège.

Le style des jouets et leur perfectionnement ont été liés, plus particulièrement depuis le xviiie s., au développement des sciences et des techniques. La mécanique, la vapeur, l’électricité et l’électronique ont donné vie au jouet, depuis le premier train à vapeur, dont le combustible provenait de lampes à alcool, jusqu’à la voiture télécommandée d’aujourd’hui. Les petites filles ont des fers à repasser qui repassent, des machines à laver qui lavent et des cuisinières qui cuisent. L’utilisation de circuits électriques dans certains jeux éducatifs permet l’apparition d’un signal lumineux si la réponse donnée à une question se révèle exacte. Enfin, la science rejoint la fiction avec le jouet électronique, qui revêt presque un caractère magique : jouet télécommandé par voie électromagnétique ou par cellule photo-électrique. L’orgue et l’ordinateur électroniques appartiennent désormais au domaine du jouet. Derniers-nés de la science de l’espace, les jouets à moteur à réaction ne connaissent plus l’attraction terrestre, que ce soit l’avion propulsé au gaz ou le missile à réaction chimique.

La multiplicité des branches intéressées à la production des articles pour enfants, la souplesse des moyens de production au service d’une demande très diversifiée, l’accroissement de la consommation dû à l’élévation du niveau de vie, tout cela concourt à l’expansion de ce marché. Aussi de grands noms de l’industrie se sont-ils intéressés à ce phénomène. Les enfants ont désormais leurs propres stylistes et leurs propres couturiers dans le domaine de l’habillement : Cardin, Carven, Dior (Baby Dior), Louis Féraud, Emanuel Ungaro et Paco Rabanne ; leurs propres designers dans celui de l’ameublement (berceau en plastique transparent de l’architecte Perret, chambre d’enfant de Jean Royère et Geneviève Pons, sièges pour enfants de J. A. Motte). Il n’est pas jusqu’au jouet qui ne soit le fruit de recherches où le goût, allié à la fantaisie, engendre souvent un style plein d’humour : poupées de chiffon au visage plat, aux yeux ronds et aux pommettes marquées de couleur vive ; animaux de bois pleins de vie (« Nos amis les bêtes », jeu d’assemblage de A. Lacroix) ; éléphants aux oreilles fleuries (Ajena) ; boa souriant ; chien obéissant sur simple secousse. Si l’industrie du prêt-à-porter pour l’enfant est prospère, celle du jouet, qui l’est aussi, doit faire face à la concurrence redoutable des pays étrangers : poupées d’Italie, jouets mécaniques allemands et jouets très bon marché en provenance du Japon et de Chine.