Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
E

électron (suite)

Sir J. J. Thomson* révélait en 1897 l’existence de l’électron, infime charge négative, dont il avait pu déterminer la masse, environ la deux millième partie de celle de l’atome d’hydrogène. Les années suivantes, les travaux de Thomson, de Hertz* et de Lorentz* permirent de déterminer le rapport de la charge e à la masse m de l’électron.

C’est seulement vers 1910 que l’Américain Millikan* put déterminer, avec une très bonne précision, la valeur de la charge e de l’électron. Cette méthode est souvent dite « de la goutte équilibrée ». Dans un récipient sont disposées deux électrodes parallèles et horizontales espacées d’une distance d, entre lesquelles peut être appliquée une tension continue réglable V (fig. 1). Le champ électrique entre les deux armatures est L’armature supérieure est percée d’une ouverture d’un faible diamètre. Un microscope permet d’examiner l’espace entre les deux armatures, espace éclairé par une source lumineuse puissante. Un pulvérisateur permet de produire un fin brouillard d’huile ou de glycérine au-dessus de l’armature supérieure.

Les gouttelettes de brouillard sont presque toujours électrisées du fait du frottement dans leur passage dans l’ajutage. Quelques gouttelettes passent par le trou de l’armature supérieure et apparaissent dans le champ du microscope sous l’aspect d’étoiles brillantes, descendant lentement, tombant sous l’action de leur poids p, mais freinées par la résistance de l’air.

Leur vitesse de chute, mesurée avec précision, permet de connaître la masse de la gouttelette et son poids p = mg. Si l’on applique une différence de potentiel V entre les deux armatures, l’armature supérieure étant positive, on diminue la vitesse de chute de la goutte, qui porte une charge négative. Pour une valeur particulière de la tension V, la gouttelette reste en équilibre. Si q est la charge de la gouttelette, la force exercée sur elle par le champ électrique est f = Eq ; cette force est égale au poids p de la gouttelette, lorsque celle-ci est en équilibre ; on a alors

En répétant l’opération sur un grand nombre de gouttelettes, on trouve diverses valeurs de q, toutes multiples de la plus faible d’entre elles ; cette charge e est celle de l’électron ; sa valeur est de 1,6 . 10– 19 coulomb : cette charge est infime. Pourtant, tous les phénomènes électriques sont sous la dépendance de l’électron, depuis la production d’énergie électrique par les plus gros alternateurs des stations centrales jusqu’aux plus subtiles réactions de la biologie moléculaire.


Charge spécifique de l’électron

Par l’étude de la déviation de la trajectoire d’électrons dirigée normalement à des champs électriques ou magnétiques, J. J. Thomson a pu, en 1898, déterminer la charge spécifique de l’électron, c’est-à-dire le rapport de la charge de l’électron à sa masse.

Cette charge spécifique est égale à 1,76.1011 C/kg. Cette valeur numérique ne parle pas à l’esprit. On pourrait mieux l’apprécier en supposant deux masses de 1 kg d’électrons placées chacune à l’un des pôles de la Terre, c’est-à-dire à 12 000 km l’une de l’autre ; la répulsion mutuelle de ces deux masses serait de 200 000 milliards de tonnes.

Polykarp Kusch, physicien américain d’origine allemande (Blankenburg, 1911), spécialiste de physique atomique, et Willis Eugene Lamb, physicien américain (Los Angeles, 1913), auteur de découvertes sur la structure fine du spectre de l’hydrogène. Tous deux ont reçu le prix Nobel de physique en 1955 pour leur détermination du moment magnétique de l’électron.


Masse de l’électron

La connaissance de la charge spécifique de l’électron et de sa charge e permet de calculer la masse m de l’électron :
m = 0,911.10–30 kg.
C’est environ la 1 850e partie de la masse du noyau d’un atome d’hydrogène.


Électron positif, ou positon

C’est l’antiparticule de l’électron négatif, ou négaton, mais cette dernière appellation est peu utilisée.

L’existence du positon, prévue en 1930 par l’Anglais Paul Dirac, fut confirmée expérimentalement en 1932 par l’Américain Anderson* à l’aide d’une chambre de Wilson. Les travaux de Chadwick* ainsi que ceux de F. et I. Joliot-Curie* ont, par la suite, montré que les rayons gamma frappant un métal lourd donnaient naissance à un couple négaton - positon présentant la même énergie totale.

Cette transformation d’énergie rayonnante en matière, suivant la relation d’Einstein E = mc2, constitue un exemple de matérialisation de l’énergie. Inversement, si un positon heurte un électron négatif, les deux particules se combinent en donnant naissance à un rayonnement gamma. Cette annihilation de la matière est dénommée dématiérisation de la matière transformée en énergie. L’énergie totale dégagée est de l’ordre de 106 eV par paire d’électrons, ce qui correspond à la masse des deux corpuscules disparus.

Des positons apparaissent lors de transmutations résultant du bombardement de certains isotopes par des rayonnements alpha ou gamma ou par diverses particules, protons, deutons, neutrons. La vie d’un positon est extrêmement brève, parce que, dès son apparition, il se combine à un des électrons négatifs dont fourmille la matière. Dans l’air, la vie d’un positon n’est que de l’ordre de 10–7 s.


Action des champs électriques et magnétiques

Les électrons, du fait de la charge électrique qu’ils portent, sont susceptibles d’être accélérés ou déviés par les champs électriques ou magnétiques.


Champ électrique

La valeur considérable de la charge spécifique d’un électron lui permet d’acquérir dans les champs électrostatiques, même les plus faibles, des accélérations extrêmement élevées, et par conséquent de très grandes vitesses. Théoriquement, la vitesse v des électrons accélérés par une tension V est donnée par la relation en milliers de kilomètres par seconde. Il faut noter qu’au-dessus d’une certaine vitesse il n’est plus possible de négliger la variation apparente de la masse de l’électron, laquelle, conformément à la théorie de la relativité, augmente avec la vitesse. Pour une tension d’accélération V de 20 000 V, la limitation de la vitesse commence à se manifester ; pour une tension de 100 kV, la différence entre la vitesse réelle et la vitesse théorique est de 20 p. 100. Pour une tension d’accélération d’un million de volts, la vitesse des électrons, qui, selon la mécanique classique, serait de 600 000 km/s, n’est que de 282 000 km/s. Un électron animé d’une vitesse v0 pénétrant dans un champ électrique oblique par rapport à v0 (fig. 2), celle-ci se compose géométriquement avec le vecteur vitesse v résultant du champ, et la trajectoire de l’électron devient parabolique. Cette trajectoire demeure constamment dans le plan défini par le vecteur vitesse et la direction des lignes de force du champ électrique.