Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
E

électrochimie (suite)

L’expérience montre que la variation de Λc avec c est, à température donnée, très différente pour un électrolyte fort, tel KCl, ou faible, tel CH3—COOH. Suivant une remarque faite par Kohlrausch, la conductivité équivalente d’un électrolyte fort obéit aux faibles molarités à la loi traduite par une droite de pente négative et faible dont Λ, conductivité équivalente limite, peut être obtenue par extrapolation. Par contre, pour un électrolyte faible, la variation de Λc est grande aux très faibles molarités, interdisant le calcul de Λ par extrapolation.


Remarques

1. Pour un électrolyte fort, α étant égal à 1, la variation de Λc avec c est due aux mobilités : celles-ci décroissent quand c croît, par suite des actions interioniques. Une théorie mathématique due à Debye et Hückel permet de calculer ces actions interioniques et de retrouver la loi de Kohlrausch de variation linéaire de Λc en fonction de

2. Pour un électrolyte faible en solution très diluée, on admet, les ions étant peu nombreux, que leurs mobilités sont constantes, et l’on a
Λc = α.Λ ;
Λ = Fuc + Fua obéit à la loi d’additivité de Kohlrausch :

conductivités limites du cation et de l’anion ; celles-ci, indépendantes de l’électrolyte, peuvent être déterminées expérimentalement pour un électrolyte fort, utilisées ensuite au calcul de Λ pour un électrolyte faible, ainsi qu’à celui de α, par la mesure de Λc.

Friedrich Kohlrausch

Physicien allemand (Rinteln 1840 - Marburg 1910). Il détermina en 1874 la conductivité des électrolytes, grâce à la méthode du pont à téléphone, qu’il avait imaginée, et en déduisit les valeurs des mobilités des ions.


Thermodynamique électrochimique

L’existence des piles à liquide amène à penser qu’il existe une d. d. p. entre un conducteur métallique et un solvant ionisant tel que l’eau, dans lequel il est plongé. Cette d. d. p. s’interprète comme résultant du passage en solution de cations métalliques, laissant dans le métal un excès d’électrons. Ceux-ci attirant ceux-là, le phénomène est limité, aboutit à la création d’une couche double (+ –), de part et d’autre de la surface de contact métal-solution, et d’une d. d. p. entre métal et solution, dite « tension absolue d’électrode ». Plus généralement, si un conducteur métallique est plongé dans une solution aqueuse renfermant les ions du métal (par exemple Cu dans une solution de CuSO4), il existe une d. d. p. métal-solution qui, pour un métal donné, dépend en particulier de la molarité des ions en solution. Une formule due à Nernst* (1890) donne l’expression de la d. d. p. correspondant à cette électrode (ou demi-pile) Me/Men+ :

où F est le faraday, n la valence électrochimique des ions du métal Me ; | Men+ | désigne non pas la molarité de ces ions en solution, mais leur activité* ; V0 est la valeur de la d. d. p. pour | Men+ | = 1 ; c’est la tension normale d’électrode. On écrit, pour la température ordinaire, T = 298 K et, en passant aux logarithmes décimaux,

Il n’existe pas de moyen de mesurer cette d. d. p. autrement qu’en valeur relative. On constitue pour cela une pile en réunissant par jonction liquide l’électrode proposée à une électrode de référence, l’électrode normale à hydrogène (v. pH), dont on pose égale à zéro la tension d’électrode ; moyennant cette convention, la f. é. m. de la pile,

mesure en valeur algébrique la tension de l’électrode Me/Men+ associée à l’électrode à hydrogène. Voici quelques tensions normales d’électrode à 25 °C :

Cette échelle des tensions est aussi une échelle d’électropositivité : celle-ci décroît de Li à Au, de même que le caractère réducteur du métal. On peut par suite prévoir les réactions de déplacement d’un métal par un autre en solution : Cu, placé en dessous de Fe dans l’échelle des tensions, est déplacé, donc réduit, par ce dernier ; une lame de fer plongée dans une solution de sel cuivrique se recouvre de cuivre, en même temps que des ions Fe2+ passent en solution :
Fe + Cu2+ → Fe2+ + Cu.
De même, les métaux qui dégagent de l’hydrogène par action sur les acides sont ceux dont la tension d’électrode est négative.


Remarque

Il existe, en liaison comme les précédentes avec les phénomènes d’oxydoréduction, un grand nombre d’autres demi-piles. Telles sont par exemple les électrodes à gaz, hydrogène, oxygène, chlore..., constituées d’une électrode de platine platiné en contact à la fois avec le gaz sous sa forme moléculaire et avec une solution aqueuse qui contient les ions correspondant au gaz ; la tension d’électrode est due à l’équilibre d’oxydoréduction entre le gaz et ses ions. Telles sont aussi, d’un genre différent, les électrodes à calomel ou à chlorure d’argent (v. pH) ou, enfin, les électrodes redox, constituées d’une électrode inattaquable (platine) plongeant dans une solution contenant des ions en équilibre d’oxydoréduction, par exemple les ions ferreux et ferriques :
Fe2+ ⇄ Fe3+ + e ;
la tension d’électrode dépend de la composition du mélange redox ; elle est donnée par une formule qui généralise celle de Nernst (v. oxydoréduction) ; pour le couple ferreux-ferrique par exemple on a, à 25 °C,

avec V0 = + 0,77 volt.


Cinétique électrochimique

En dehors du cas de deux électrodes identiques plongeant dans la même solution, une cellule électrolytique constitue une pile normalement polarisée et dont la f. é. m., en l’absence de courant, est fixée en accord avec les lois de la thermodynamique. Le passage d’un courant dans une cellule provoque aux électrodes des phénomènes d’oxydoréduction. Ceux-ci créent en général une d. d. p. électrode-solution, ou en modifient la valeur existante, dans une mesure qui dépend de la densité i de courant sur l’électrode ; on nomme surtension η cette polarisation due au courant. Elle peut provenir pour une part de la raréfaction des ions autour de l’électrode : cette cause de surtension est exploitée en polarographie*. Elle provient aussi d’une modification de la surface de l’électrode, due aux réactions qui se produisent à son contact : pratiquement nulle dans le cas du dépôt ou de la dissolution d’un métal, elle peut être importante dans le cas d’un dégagement gazeux, H2, O2, Cl2 par exemple ; elle est alors la conséquence de l’encombrement que produit sur l’électrode le plus lent des processus successifs qui transforment l’ion solvaté, tel H3O+, en dégagement gazeux, ici H2 ; ce peut être le processus 2 H → H2, qui s’opère à la surface de l’électrode, en phase adsorbée, et pour lequel l’électrode est, suivant sa nature, un catalyseur plus ou moins actif ; cela explique en particulier que la surtension d’hydrogène soit beaucoup plus forte sur le mercure que sur le platine. Diverses théories ont été élaborées, qui permettent de retrouver la loi de l’Allemand JuliusTafel (1862-1918) :
η = a + b log i,
laquelle cependant est loin de donner entière satisfaction.