Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
E

édition (suite)

Le blocage du livre joue aussi au niveau de l’objet : l’exploitation des disponibilités en temps et en argent qui se dégagent de l’accroissement des niveaux de vie et des loisirs s’effectue bien moins à des fins culturelles qu’en faveur d’activités beaucoup plus terre à terre. Dès lors, toute conquête de nouveaux lecteurs de la part d’un éditeur correspond moins à un élargissement véritable du public qu’au déplacement d’une de ses fractions à la suite d’une coûteuse bataille entre confrères.

L’incitation officielle à la lecture existe sous la forme d’une aide culturelle destinée à promouvoir le livre français à l’étranger et sous celle des bibliothèques publiques en France. L’état de ces dernières évoque un climat de désert culturel : à Paris, on prête en moyenne un livre par tête et par an contre 10 à Londres... Nombre de bons titres sont ainsi privés de ces 2 000 ou 3 000 exemplaires souscrits d’office par les bibliothèques publiques scandinaves, américaines ou anglaises (11 p. 100 de la production anglaise sont ainsi absorbés).

Le C. N. R. S. et la Caisse nationale des lettres aident, au moyen de dons, de prêts ou même d’achats, certaines publications présentant un intérêt scientifique ou littéraire reconnu, mais dépourvues d’une rentabilité suffisante.

L’audio-visuel évolué, sous forme de cassettes ou de télévision par câble, pourrait prêter à l’édition un nouveau souffle, mais ses réalisations européennes demeurent encore en filigrane. L’on ne dispose que de l’exemple des États-Unis, lequel est plus riche d’espoirs que d’éléments vraiment positifs dans l’immédiat.

La diffusion d’une langue préfigure assez celle de sa culture. Or, depuis quarante ans, l’anglo-américain, parlé par un ensemble de nations riches, distance irrémédiablement le français. En tant que marché, les francophones (France, Belgique, Canada, Suisse, Afrique) représentent en nombre 1/5 des anglophones et, en puissance d’achat, 1/8. L’édition française produit donc plus cher par définition et doit recourir à la traduction dès qu’elle veut gagner l’étranger. Toutefois, la pratique croissante des coéditions en matière d’ouvrages illustrés permet de réaliser économiquement plusieurs versions en langues différentes d’une même œuvre, au prix d’un travail raisonnable d’adaptation sur chacune.

Si l’édition montre une lenteur certaine à profiter des opportunités que semble lui offrir l’essor de l’économie, c’est sans doute faute d’avoir su introduire dans son produit les transformations qu’une civilisation en pleine évolution s’attend obscurément à y trouver.

E. G.

➙ Bibliothèque / Communication de masse / Imprimerie / Livre (sociologie du).

 E. Kuhnert et H. Widmann, Geschichte des Buchhandels vom Altertum bis zur Gegenwart (Berlin, 1952). / H. F. Schulz, Das Schicksal der Bücher und des Buchhandels (Berlin, 1952 ; nouv. éd., 1960). / J. A. Néret, Histoire illustrée de la librairie et du livre français (Lamarre, 1953). / S. Taubert, Grundriss des Buchhandels in aller Welt (Leipzig, 1953). / P. Monnet, Monographie de l’édition (Cercle de la librairie, 1956 ; 2e éd., 1960). / R. R. Barker, le Livre dans le monde (Unesco, 1957). / P. Angoulvent, l’Édition française au pied du mur (P. U. F., 1960). / R. Escarpit, la Révolution du livre (P. U. F., 1965). / P. Schuwer, l’Infraculture, précédé de Conception et graphisme du livre en France (Brient, 1969). / Le Livre et la lecture en France (Éd. ouvrières, 1969). / A. Labarre, Histoire du livre (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1970). / J. Cain, R. Escarpit et H. J. Martin (sous la dir. de), le Livre français, hier, aujourd’hui, demain (Impr. nat., 1972). / A. Spire et J.-P. Viala, la Bataille du livre (Éd. sociales, 1976).

Edmonton

V. du Canada, capit. de l’Alberta ; 425 000 hab.


Aujourd’hui principale agglomération urbaine de l’Alberta, Edmonton fut d’abord surpassée par Calgary, desservie plus tôt par un transcontinental et située dans une des premières régions colonisées de l’Ouest canadien. Edmonton occupait aussi une position jugée excentrique au moment où des vagues d’immigrants déferlaient sur les Prairies. Située dans l’auréole extérieure de cette région, le park belt ou aspen grove, zone de transition avec la forêt boréale, elle se trouvait au nord des districts de peuplement.

C’est à la proximité de la forêt riche en animaux à fourrure qu’elle doit son origine comme poste de traite fondé par la Compagnie de la baie d’Hudson et définitivement fixé sur ce site à partir de 1813, après l’abandon d’un premier comptoir établi en 1795 sur la Saskatchewan du Nord, un peu en aval de la ville actuelle. Edmonton connut une certaine activité vers 1870 avec l’arrivée de quelques colons et éleveurs et de spéculateurs escomptant la construction imminente d’un chemin de fer. Mais le rail n’atteignit Edmonton qu’en 1891, sous la forme d’une antenne greffée sur le transcontinental à Calgary.

C’est le choix d’Edmonton comme capitale de la nouvelle province d’Alberta, en 1905, qui fut le facteur décisif de développement : la ville passa de 4 200 habitants en 1901 à 31 000 en 1911. Une période de croissance commença en 1914-15 avec la construction d’un transcontinental (Grand Trunk) desservant Edmonton et de plusieurs voies ferrées, notamment vers la rivière de la Paix et McMurray. Edmonton devenait un important nœud ferroviaire. Les chemins de fer permirent le développement de la culture des céréales et de l’élevage autour de la capitale, ainsi que la colonisation du district de la rivière de la Paix. Edmonton occupait désormais une position centrale dans la province. Sa population atteignit 58 800 habitants en 1921, 79 000 en 1931 et 93 800 en 1941.

Deux facteurs nouveaux stimulèrent l’expansion d’Edmonton à partir de la Seconde Guerre mondiale et dans les premières années d’après-guerre, en lui assurant finalement l’avantage sur Calgary. Elle devint d’abord la « porte du Nord » : le trafic des régions arctiques et subarctiques drainées par le Mackenzie passe par McMurray et Edmonton, celui du Yukon par la route de l’Alaska et Edmonton ; de même, la desserte aérienne du nord et du nord-ouest du Canada et plusieurs lignes transpolaires utilisent son aéroport. Autre facteur de croissance, Edmonton est depuis les découvertes de 1947 au centre de riches gisements de pétrole (Leduc-Woodbend, Redwater, Pembina) et de gaz naturel (Beaverhill, Fort Saskatchewan, Westlock). L’extraction des hydrocarbures, le raffinage, la pétrochimie et les industries connexes (métallurgie des métaux non ferreux ; acier pour conduites) s’ajoutent aux industries traditionnelles (conditionnement de la viande, laiterie, minoterie) et expliquent l’accroissement remarquable d’Edmonton : 159 600 habitants en 1951, 281 000 en 1961, 437 000 en 1971.