Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
D

Duchamp (les frères) (suite)

 I. J. Auberty et C. Perusseaux, l’Œuvre gravé de Jacques Villon (Prouté, 1950). / D. Vallier, Jacques Villon (Cahiers d’art, 1957). / J. Mellquist, les Caricatures de Jacques Villon (Cailler, Genève, 1961). / L. Venturi, Jacques Villon (Carré, 1963).
II. Catalogues d’expositions : Sculptures de Duchamp-Villon, galerie Louis Carré (Paris, 1963). / Duchamp-Villon, le Cheval Majeur, galerie Louis Carré (Paris, 1966).
III. M. Duchamp, Marchand du sel (le Terrain vague, 1959). / R. Lebel, Sur Marcel Duchamp (Éd. Trianon, 1959). / P. Cabanne, Entretiens avec Marcel Duchamp (Belfond, 1967). / A. Schwarz, The Complete Works of Marcel Duchamp (New York et Londres, 1969) ; la Mariée mise à nu chez Marcel Duchamp, même (Georges Fall, 1974). / J. Clair, Marcel Duchamp ou le Grand Fictif (Galilée, 1975).

Dufay (Guillaume)

Compositeur français (Hainaut v. 1400 - Cambrai 1474).


La situation politique dans laquelle se débat l’Occident — la France notamment — au début du xve s. n’est pas étrangère à ce que, en musique, on a pu appeler la « poussée vers le Nord » : l’autorité royale se désagrège, Paris est déchiré par la guerre civile, la papauté, en proie au Grand Schisme depuis 1378, ne retrouve un semblant d’assiette qu’avec le concile de Constance (1417). Tous ces faits sont incompatibles avec une survie de l’activité artistique qu’avaient connue Paris, Avignon et l’Italie durant le xive s. D’autre part, l’échiquier politique se trouve profondément modifié du fait de l’occupation anglaise en France et de la création d’un bloc anglo-bourguignon actif et brillant dont les provinces du nord de la France, notamment le Hainaut, constituent le noyau.

Havre de paix dans une France disloquée, les anciens comtés de Hainaut et d’Artois voient naître les musiciens qui seront les figures de proue du xve s. : Johannes Ciconia (v. 1335-1340-1411), Gilles Binchois (v. 1400-1460), Guillaume Dufay et plus tard Johannes Ockeghem*, Jacobus Obrecht* et Josquin Des Prés*.

On ne connaît avec précision ni la date ni le lieu de la naissance de G. Dufay. Mais puisque, dans les années 1409-10, il est mentionné comme puer altaris à la maîtrise de la cathédrale de Cambrai, on déduit qu’il serait né dans cette région. Les renseignements biographiques, encore fragmentaires, permettent de distinguer deux grandes périodes : une période italienne de quelque trente années à partir des années 1420 et une période française à peine plus courte.

Après avoir reçu sa formation musicale à Cambrai sous la direction de Nicolas Malin et de Richard de Loqueville, il put, suppose-t-on, accompagner l’évêque de Cambrai, Pierre d’Ailly, au concile de Constance en 1417 et rencontrer là Carlo Malatesta. De 1420 à 1426, il exerce une activité officielle à la cour des Malatesta à Rimini, comme en témoignent plusieurs œuvres datées dont le motet Vasilissa ergo gaude, écrit à l’occasion du départ de Cleofe Malatesta pour Byzance (1420), et la ballade Resvellies vous.

Des bénéfices divers à Cambrai, Laon, Tournai accordés à Dufay entre 1426 et 1428 nous inclinent à penser qu’il a pu séjourner alors en France et même à Paris, et apprécier la « contenance angloise » sans doute importée par John Dunstable (v. 1380-1453). La Missa sancti Jacobi, écrite en 1427 sans doute pour Robert Auclou, curé de l’église parisienne Saint-Jacques-de-la-Boucherie, qu’il avait connu à Bologne, recourt en effet au procédé typiquement anglais du faux-bourdon.

Ordonné prêtre en 1428, Dufay séjourne comme chantre à la chapelle pontificale, qui, après les secousses du schisme, retrouve son éclat, durant cinq années (1428-1433) au cours desquelles il compose sans doute la plupart de ses œuvres religieuses à trois voix comme les pièces de l’ordinarium, les Magnificat, les Hymnes, mais aussi quelques œuvres de circonstance comme le motet Ecclesiae militantis, écrit pour l’élection du pape Eugène IV (1431). Dufay passe alors deux années à la cour de Savoie, à Turin. Mais il regagne bientôt la chapelle pontificale, non à Rome, que le pape avait dû quitter à cause des troubles, mais à Bologne et à Florence ; il y séjournera jusqu’en 1437. C’est à cette époque qu’il compose l’un de ses plus beaux motets, Nuper rosarum flores, exécuté le 25 mars 1436 pour la dédicace de la cathédrale Santa Maria del Fiore.

Comme il ne se fixera définitivement à Cambrai que vers 1445 ou 1450, on pense que c’est à ce moment que se situe le séjour de sept années à la cour de Savoie dont il parle dans son testament.

À partir de 1445 ou de 1450, il réside dans la région de Cambrai. En 1446, il devient chanoine de Sainte-Waudru à Mons, et c’est en 1449 que, dans cette ville, il rencontre Gilles Binchois. Fut-il au service du duc de Bourgogne ? Ce n’est pas certain ; il ne faut pas prendre à la lettre ses titres de capellanus, puis de cantor illustrissimus... ducis burgundiae, qui peuvent n’être qu’honorifiques. Il est pourtant de ceux qui sont appelés à composer pour le fameux Banquet du faisan, en février 1454, à Lille. Ce sera la très belle lamentation de l’Église de Constantinople, O très piteulx, sur teneur latine.

Nous savons que c’est dans ses dernières années qu’il écrivit quelques-unes de ses plus fameuses et monumentales compositions religieuses : les messes Ecce ancilla Domini et Ave regina, ainsi qu’un Requiem qui n’a pas été retrouvé. Il meurt à Cambrai le 27 novembre 1474.

La primauté de l’art de Dufay sur celui des compositeurs de son temps tient au fait qu’à tous les genres pratiqués alors et à l’expression musicale elle-même il a insufflé un élan nouveau. La chanson (il en écrit plus de 80), tout en respectant le cadre strict de la poésie à forme fixe et l’habitude de pourvoir chaque vers d’une phrase musicale, se dégage très sensiblement de l’affectation qui caractérisait les ballades, rondeaux ou virelais de l’époque précédente et se rapproche fort, par sa courbe mélodique, de la chanson populaire. Elle plaît dorénavant davantage par son aisance que par sa recherche.