Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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distribution (suite)

Par ailleurs, l’accroissement de la dimension des points de vente a permis de tirer le meilleur parti possible des techniques modernes de vente (présélection, libre-service), cependant que le petit et moyen commerce (commerce de détail) commençait lui-même à sortir de son isolement en recourant de plus en plus largement à des formules d’association (groupement de détaillants, association avec des grossistes) lui permettant de bénéficier, comme ses concurrents plus puissants (les grandes surfaces de vente, supermarchés et hypermarchés), de conditions d’approvisionnement avantageuses, et de créer en commun certains services trop onéreux pour une seule entreprise (publicité commune, services de modernisation des magasins, échanges d’information, actions professionnelles de formation, centralisation des comptabilités, sessions de perfectionnement, etc.).

En outre, les entreprises de distribution, surtout importantes, ont tendu de plus en plus à rechercher une rationalisation de la gestion : à l’imitation des fabricants, les entreprises de distribution font de plus en plus appel aux études de marché, à la recherche opérationnelle ; elles gèrent les stocks au moyen d’ordinateurs, qui se chargent des travaux administratifs afférents aux commandes et fournissent le maximum d’informations, de statistiques et de prévisions de vente, ce qui permet de gérer les entreprises avec le minimum d’à-coups et d’erreurs, l’empirisme et le flair commercial cédant peu à peu la place à des méthodes modernes de gestion.

Enfin, le progrès le plus sensible obtenu depuis 1960 réside dans l’organisation de puissantes centrales d’achat, créées par le commerce intégré ou associé, qui permettent de réduire le coût des approvisionnements des magasins, d’assurer des livraisons régulières et une qualité constante, de diminuer les frais de stockage, tout en assurant les prestations les plus satisfaisantes au consommateur final. Pour augmenter leur pouvoir de modernisation, les centrales d’achat concluent souvent des accords entre elles.

Les mutations de l’appareil de distribution des produits se sont manifestées tout à la fois par le rajeunissement de la fonction de gros, par l’apparition de nouvelles formules de vente (comme les grandes surfaces), par l’essor de certains procédés peu développés (comme la vente à domicile ou la vente par correspondance) et par la modernisation des secteurs traditionnels de distribution (commerce intégré et commerce indépendant).

La structure de la distribution

Les bouleversements de l’appareil commercial ont été accompagnés, en France, par une contraction du nombre des établissements commerciaux. Pour un nombre d’établissements en activité s’élevant, au milieu de 1970, à 1 004 000 (d’après les travaux de Claude Quin portant sur le commerce de gros et de détail ainsi que sur les établissements prestataires de services comme intermédiaires du commerce, hôtels, cafés, restaurants, coiffeurs, blanchisseries, réparations et locations, etc.), il y a diminution de 58 400 unités entre 1954 et 1964 et de 17 000 unités de 1966 à 1970 (soit environ 1,7 p. 100 du nombre des établissements en activité en 1966). Cette baisse peut paraître faible. Mais, d’une part, elle n’a pas été uniforme au cours des quatre dernières années : le nombre des établissements commerciaux s’est accru en 1966 et 1967 et n’a diminué qu’en 1968, et surtout en 1969 ; la réduction de 17 000 établissements a donc été acquise sur deux années, un tiers en 1968 et deux tiers en 1969-1970. D’autre part, il s’agit d’un solde qui résulte de mouvements divergents : créations dans le secteur de l’équipement ménager, de l’hygiène et des loisirs, réductions dans les secteurs de l’équipement de la personne et surtout de l’alimentation. Enfin, il faut tenir compte des besoins en équipements commerciaux nouveaux, liés au développement de l’urbanisme.

Par nature d’activité, cette diminution, de 1966 à 1970, se décompose ainsi : 4 200 établissements en moins dans le commerce de gros ; 4 500 dans les services (en totalité dans le secteur des hôtels, cafés et restaurants) ; environ 21 000 dans l’alimentation (alimentation générale et commerce non sédentaire essentiellement) ; mais 13 500 établissements de plus dans le commerce non alimentaire, malgré une baisse sensible dans le textile. Cette évolution récente confirme celle qui est constatée depuis quinze ans. Les mêmes branches d’activité continuent à enregistrer une déflation régulière. Celle-ci est la conséquence de la concurrence des grandes surfaces de ventes déspécialisées (supermarchés et hypermarchés, magasins populaires, grands magasins) et des changements intervenus dans la consommation des ménages (déclin relatif de l’alimentation et de l’habillement, progrès rapides des dépenses d’hygiène, de loisirs, de transports et d’habitat). Ces mouvements traduisent ainsi une adaptation de l’appareil commercial aux besoins des consommateurs.

Sur 1 004 000 établissements commerciaux en activité, on compte 81 000 établissements de gros, 548 000 établissements de détail et 368 000 établissements de services. Une partie importante de grossistes (25 500) ne vend qu’à des utilisateurs professionnels, 55 500 établissements de gros approvisionnant les établissements de détail. Le commerce de détail comprend lui-même 437 000 établissements de simple revente (dont 44 500 non sédentaires) et 111 000 établissements procédant à une transformation avant revente (dont 3 000 non sédentaires). En nombre d’établissements (mais non en chiffres d’affaires), commerces de détail alimentaires et non alimentaires s’équilibrent.

Rapporté au nombre d’habitants, on compté un établissement de détail pour 92 habitants (un pour 184 hab. dans l’alimentation, un pour 183 dans le non-alimentaire). Progressivement, la densité commerciale française tend à se rapprocher de la situation observée dans les autres pays européens — Italie, Belgique et Pays-Bas exceptés —, où l’on compte un commerce de détail pour 100 habitants. Quant au nombre de personnes ayant un emploi dans le commerce et dans les services à caractère commercial, comme chef d’entreprise, aide familial ou salarié, il a été évalué, toujours par Claude Quin, à 3 620 000. En 1966, 3 495 000  emplois étaient recensés. La croissance de l’emploi (2,2 p. 100 par an en moyenne) est donc rapide et régulière. Elle résulte exclusivement de l’augmentation du nombre des salariés : 1 750 000 en 1960, 2 233 000 en 1966, 2 400 000 aujourd’hui (+ 3,7 p. 100 en moyenne par an). Les salariés représentent, en 1970, 67 p. 100 de l’emploi commercial total ; 700 000 sont employés dans le commerce de gros ou comme intermédiaires, à peu près autant dans les services et un peu plus de 1 000 000 dans le commerce de détail. La croissance du nombre des salariés étant plus rapide que celle de l’emploi global, on assiste donc à une diminution du nombre des chefs d’entreprise et des aides familiaux. Cela est bien confirmé par la comparaison des derniers recensements démographiques : de 1954 à 1962, la diminution du nombre des chefs d’entreprises commerciales avait été d’un peu plus de 60 000 unités. De 1962 à 1968, elle avait été d’un peu moins de 30 000 unités, soit, en quinze ans, un recul de près de 8 p. 100 du nombre des chefs d’entreprises commerciales recensées en 1954. Dans le même temps, le nombre moyen des salariés des établissements n’a cessé de s’élever, pour atteindre 2,4 salariés par établissement contre 1,2 il y a quinze ans. Un peu plus d’un tiers des établissements commerciaux continuent cependant à n’occuper aucun salarié, et 5 p. 100 en emploient plus de 10.