Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Algérie (suite)

• L’A. N. P. La principale force politique en Algérie reste donc l’A. N. P. (l’Armée nationale populaire), héritière de l’A. L. N. Dirigée par des hommes de confiance de Boumediene — la plupart des officiers appartiennent aux anciens états-majors des frontières ou ont acquis leurs galons dans la nouvelle armée « moderne » —, l’A. N. P. constitue l’appui le plus solide du pouvoir. Les anciens chefs du maquis sont écartés de la direction de l’armée. C’est avec leur appui que le colonel Tahar Zbiri, chef d’état-major de l’A. N. P., tente, en 1967, de fomenter un coup d’État contre le régime de Boumediene.

• La Charte nationale et la Constitution. En 1976, alors que l’opposition conteste vivement sa politique de pouvoir personnel, Boumediene, dans le but de légitimer son régime et d’équilibrer les différents pouvoirs, organise dans le pays un débat à tous les niveaux afin d’élaborer une Charte nationale. Ce débat, lors duquel tous les aspects du régime sont discutés et critiqués, fait apparaître les aspirations profondes de la population. Votée le 27 juin 1976, cette Charte sert à l’élaboration d’une Constitution qui sera adoptée le 19 novembre par référendum. Aux termes de celle-ci, l’Algérie est un État socialiste dans lequel l’islām est religion d’État et les droits fondamentaux des citoyens garantis. Cette Constitution consacre par ailleurs la prééminence du F. L. N. dans la vie politique.

• La politique étrangère de Boumediene. La politique de coopération avec l’ancienne métropole est longtemps maintenue. Des discussions aboutissent, en juillet 1965, à la signature d’une convention franco-algérienne concernant l’exploitation du pétrole du Sahara ; mais cette convention est pratiquement dénoncée en 1971 et les relations franco-algériennes se détériorent quelque temps.

Le nouveau régime, vivement critiqué à son avènement par les pays socialistes, réussit à se réhabiliter aux yeux des États anti-impérialistes. L’Algérie continue, en effet, à aider les mouvements de libération nationale, notamment en Palestine, et gagne de plus en plus d’influence parmi les pays non alignés. En 1976, l’Algérie s’oppose au partage du Sahara occidental entre le Maroc et la Mauritanie et reconnaît la république sahraouie proclamée en février, entrant ainsi en conflit ouvert avec ses voisins.

M. A.


La population


La diversité

De 1830 à 1962, lorsque le pays faisait partie de l’empire colonial de la France, deux types de populations vivaient en Algérie : des autochtones, très largement majoritaires (env. 9 millions de personnes en 1960), et des Européens d’origine, Français, mais aussi Espagnols et Italiens (un peu plus de 1 million de personnes). La guerre et l’indépendance aboutirent au départ de la presque totalité des Européens. Quelques nouveaux venus sont bien apparus, au titre de la coopération notamment. Néanmoins, l’ensemble de la population d’origine européenne représente moins de 100 000 habitants aujourd’hui. Cette rétraction brutale rend la population algérienne beaucoup plus homogène.

De multiples éléments de diversité affectent encore toutefois les Algériens. Ils tiennent surtout aux particularismes des populations traditionnelles, au fait que, pendant longtemps, aucun élément fédérateur assez puissant ne put s’imposer aux familles et aux tribus. Ils rendent compte aussi des multiples adaptations possibles à un milieu varié et délicat. Ainsi distingue-t-on encore Arabes et Berbères. Ces derniers sont probablement les plus anciens occupants de l’Algérie et du Maghreb. Face aux invasions, et notamment aux invasions arabes, ils se sont repliés dans certains massifs montagneux, où ils ont conservé jusqu’à nos jours leur propre langue et leur organisation sociale. Les deux bastions berbères de l’Algérie sont la Grande Kabylie et l’Aurès, où vivent les Chaouïas, mais on compte aussi quelques autres groupes berbères dans tout le Constantinois et au Sahara (dans le Mzab), et de petites minorités fragmentées dans l’Algérois et dans l’Oranais. Les Berbères ont joué un rôle particulièrement dynamique dans les luttes de l’indépendance. Leur organisation sociale, fondée sur des familles à la fois très soudées et très fragmentées, a profondément influencé toute la société algérienne. N’a-t-on pas pu parler d’une « Algérie kabylisée » ? Cependant, les Arabes n’en forment pas moins, et de plus en plus nettement, le groupe le plus important. La part des berbérophones dans la population algérienne a diminué environ de moitié au cours des vingt dernières années (15 p. 100 contre 29 p. 100). Les Arabes, habitants traditionnels des plaines et des villes, ont peu à peu constitué l’élément unificateur de la société, par l’attrait exercé par l’islām, par des structures sociales plus souples, plus ouvertes et plus uniformes, et par la langue, l’arabe maghrébin, devenue la langue officielle après avoir été celle d’une majorité grandissante.

Aux oppositions ethniques et linguistiques s’ajoutent celles des genres de vie traditionnels, qui ne se calquent pas exactement sur les précédentes. Le nomadisme et le semi-nomadisme sont très fortement implantés en Algérie. Ainsi les nomades de la bordure nord du Sahara se déplacent-ils à rythme régulier entre ces régions très méridionales, où ils hivernent, et les Hautes Plaines steppiques, où ils trouvent des parcours d’été. Le désert et la steppe constituent le domaine par excellence du nomadisme pastoral. Nomadisme et semi-nomadisme ne cessent de régresser. Mais, prépondérants encore au xixe s., ils ont profondément marqué de leur empreinte les genres de vie en Algérie. Aux nomades s’opposent traditionnellement les sédentaires, habitants des oasis sahariennes, des massifs montagneux ou des plaines et collines du Tell, plus agriculteurs qu’éleveurs et ayant souvent de la propriété du sol une conception plus restreinte que les tribus. Celles-ci disposent de terres ‘arch, en collectivité, les autres de biens melk ou familiaux.