Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
D

Dijon (suite)

L’histoire

Le site a été très tôt utilisé. Mais, à l’époque gallo-romaine, Dijon n’était qu’une ville de second ordre de la tribu des Lingons et s’appelait Divio. Placée non loin de la frontière de la Germanie, la ville fut fortifiée par l’empereur Aurélien en 273, après les invasions du iiie s. Après la chute de l’Empire romain, elle fit partie du royaume des Burgondes. Elle fut saccagée en 737 par les Sarrasins, puis en 888 par les envahisseurs normands.

C’est le roi de France Robert II le Pieux qui, en 1015, la racheta à son seigneur, l’évêque de Langres, et la réunit au duché de Bourgogne, qui, à partir de 1032, devint l’apanage des princes de la famille capétienne. Jusqu’au xie s., toute la vie demeura concentrée dans l’étroit périmètre du castrum gallo-romain, qui se reconnaît encore au tracé des rues du quartier au sud du palais des ducs de Bourgogne. Au xiie s., la ville commença à prendre de l’importance à cause d’une grande foire qui s’y tenait et de l’octroi d’une commune par le duc de Bourgogne Hugues III, en 1187.

En 1361, à la mort du duc Philippe de Rouvres, elle fut réunie à la Couronne sous Jean le Bon, mais pour peu de temps, puisque le duché fut aussitôt donné à un fils du roi, Philippe le Hardi, qui fut le premier des quatre grands princes Valois, ducs de Bourgogne. Lui et ses successeurs, Jean sans Peur, Philippe le Bon et Charles le Téméraire, méritèrent le nom prestigieux de « grands ducs d’Occident ». Leur règne marqua l’apogée de Dijon, qui devint la résidence des ducs et la capitale d’une des plus brillantes cours du temps.

La Bourgogne retourna à la couronne de France à la mort du Téméraire (1477). Malgré les protestations des états, Louis XI ne laissa pas échapper une aussi belle province. Il confirma les privilèges du parlement et fixa ce dernier à Dijon. L’annexion à la France ne ruina pas la prospérité de Dijon, qui devint un centre judiciaire, le siège d’un parlement. En 1513, la ville, défendue par Louis de La Trémoille (1460-1525), soutint un siège contre 30 000 Suisses et Allemands.

Durant les guerres de Religion, Dijon prit parti pour la Ligue, mais les massacres de la Saint-Barthélemy lui furent heureusement épargnés grâce à la sagesse et à l’humanité du lieutenant du roi, Léonor Chabot de Charny, et du président du parlement, Pierre Jeannin.

Mayenne essaya de s’y maintenir après l’abjuration d’Henri IV, mais les bourgeois ouvrirent leurs portes au roi en 1595. Le xviiie s. fut une époque brillante pour la ville. Les états généraux de Bourgogne s’y réunissaient tous les trois ans ; les écoles, l’académie et les salons de Dijon rivalisaient alors avec ceux de la capitale.

Au xixe s., le chemin de fer contribua beaucoup à la prospérité de la ville, qui, défendue par Garibaldi, eut à souffrir de l’invasion de 1870.

P. R.


La ville actuelle

Le centre ville est animé. Le foyer commercial essentiel s’est installé de part et d’autre de la rue de la Liberté et jusqu’au square Darcy. La richesse des magasins, la foule dense rappellent que la ville est d’abord un centre de commerce et de services. Au xixe s., elle n’était guère que cela. Malgré la construction du canal et de la voie ferrée, elle n’avait pu fixer d’autres industries que celles qui étaient liées à sa vocation de marché agricole : moutarderies, fabriques de pain d’épice, conserveries.

Depuis une génération, une mutation s’est faite. Les services se sont développés ; le rayonnement d’une ville que la foire internationale de la gastronomie fait connaître au loin s’affirme. De nouvelles industries s’implantent ; le secteur mécanique, celui de la construction électrique et de l’électronique dominent aujourd’hui. Au-delà du périmètre de l’agglomération, ce sont toutes les petites villes d’une couronne d’une trentaine de kilomètres qui se trouvent ainsi vivifiées. La facilité des relations explique sans doute cette évolution, mais l’autoroute a jusqu’ici négligé la ville. S’agit-il d’une menace pour l’avenir ?

Au total, la vocation de métropole de la France du Centre-Est se trouve confirmée par cette évolution qui permet à Dijon d’utiliser un passé prestigieux, mais sans rompre aussi avec une tradition un peu lourde de quiétude bourgeoise et gourmande.

P. C.

➙ Bourgogne / Côte-d’Or.

 E. Fyot, Dijon, son passé évoqué par les rues (Dijon, Damidot, 1960). / P. Quarré, Dijon (Hachette, 1961). / Y. Christ, Promenades en Bourgogne (Balland, 1968). / C. R. D. P. de Dijon, Site et plans de l’agglomération de Dijon des origines à nos jours (Dijon, 1969).


Dijon, ville d’art

Le premier grand établissement chrétien fut l’abbaye bénédictine de Saint-Bénigne, fondée vers 525. Elle connut un vif éclat grâce à l’abbé Guillaume de Volpiano, qui la réforma et en fit reconstruire l’église de 1001 à 1016, contribuant ainsi à la floraison du « premier art roman » en Bourgogne*. La partie la plus originale de l’édifice était, au chevet, une rotonde à trois étages, conçue pour abriter le tombeau de saint Bénigne et comportant un double collatéral annulaire à voûtes soutenues par des colonnes. Depuis la Révolution, il ne reste plus que l’étage inférieur de la rotonde, aux chapiteaux d’un style puissant.

L’art roman est représenté à Dijon par l’église Saint-Philibert, voûtée d’arêtes à l’exemple de Vézelay, mais offrant une élévation intérieure à trois étages qui la rattache au type clunisien. Dans le deuxième quart du xiie s., l’abbatiale de Saint-Bénigne fut reconstruite, à l’exception de la rotonde. Le portail occidental à statues-colonnes, dont le musée archéologique a recueilli des fragments, montrait avant la Révolution une magnifique page de sculpture.

Dijon possède un exemple parfait du style gothique bourguignon avec l’église Notre-Dame, du deuxième quart du xiiie s. La savante répartition des poussées lui permet d’allier la légèreté à la solidité. On note l’absence de déambulatoire et, dans l’élévation intérieure, une particularité d’origine champenoise : l’existence d’une galerie de circulation devant les fenêtres hautes. Les portails sont précédés d’un porche profond que surmontent, en façade, deux étages d’arcades soulignés par des frises où des rinceaux sculptés alternent avec des figures grotesques en saillie (aujourd’hui refaites). C’est sur le modèle simplifié de Notre-Dame que l’abbatiale de Saint-Bénigne, aujourd’hui cathédrale, fut reconstruite une nouvelle fois à partir de 1280, en commençant par le chœur ; la nef, du xive s., n’est pas exempte de sécheresse. L’ancien dortoir des moines, affecté aujourd’hui au musée archéologique, est une belle construction du xiiie s. à trois nefs voûtées. Dijon a perdu peu après la Révolution un chef-d’œuvre de l’art gothique, la Sainte Chapelle du palais des ducs (xiiie-xvie s). L’architecture civile du xiiie s. offre l’hôtel Aubriot, avec sa façade à décor d’arcatures (auj. musée Perrin-de-Puycousin).