Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
D

digue et jetée

Ouvrage massif, soit fluvial, soit maritime, de forme longitudinale, établi pour créer une protection contre l’action des eaux « sauvages ».


En ce qui concerne les fleuves, les digues ont pour objet essentiel de régulariser le cours d’eau par retenue (« endiguement ») des plus hautes eaux ; il s’ensuit, pour un même débit, une surélévation des niveaux, tempérée par un approfondissement du lit du fait de l’accroissement de la rapidité du courant. En matière d’ouvrages fluviaux, le terme jetée n’est pas usité.

En ce qui concerne les ouvrages maritimes, les digues, ou jetées, ont pour objet de créer un obstacle à la propagation de la houle et de son train de vagues, et, de ce fait, une zone de calme relatif offrant un abri aux navires tout en leur facilitant l’accès aux ports et la sortie des ports.

Dans le langage courant, les termes de digue et jetée sont sensiblement synonymes et sont souvent employés l’un pour l’autre. Cependant, on désigne par jetée un ouvrage plus léger que celui qui est connu sous le nom de digue.


Caractères généraux des digues et jetées


Digue de fleuve

C’est un ouvrage de direction sensiblement parallèle au courant des plus hautes eaux ; si le lit du fleuve est assez large, on lui donne généralement une section triangulaire, à pente plus adoucie côté fleuve (3 à 4 de base, par exemple, contre 1 de hauteur, alors que la pente externe sera de 2 de base pour 1 de hauteur). Son couronnement doit être suffisamment surélevé au-dessus des plus hautes eaux pour éviter les submersions, causes d’inondations graves du fait de l’établissement de « brèches » et de « renards » aux points de déversements transversaux après submersion. La plate-forme du couronnement, de 4 m de large en général, est aménagée en chemin de circulation. Les digues fluviales sont établies sur un sol ferme et doivent être aussi imperméables que possible. En général, un fossé de drainage des eaux infiltrées est établi au pied de la digue, à 4 m environ de la base. Enfin, les bermes horizontales, s’il en est de prévues à flanc de talus, ne doivent pas être cultivées.


Digue de mer

Devant s’opposer à la transmission de l’énergie de la houle et du train de vagues qu’elle comporte vers la zone à protéger, elle est conçue suivant deux principes distincts :
— soit s’opposer à la propagation des vagues par un mur vertical massif et solidement ancré, de hauteur suffisante pour permettre, en eau profonde, une réflexion totale de ces vagues ou, en eau peu profonde, une réflexion partielle accompagnée d’un déferlement qui absorbe une partie de leur énergie ;
— soit s’opposer au train de vagues par un massif en forme de talus, qui, par le frottement imposé au flot qui monte, absorbe progressivement toute l’énergie.

Les digues verticales sont presque toujours établies sur des massifs d’enrochements, qui en assurent la stabilité, de telle sorte que, suivant les variations du niveau de l’eau, la digue est du type « mur vertical en béton ou en maçonnerie » (cas des hautes marées) et du type « digue à talus » à mer basse.

En fait, outre le type de digue verticale et celui de digue talutée, on a un type intermédiaire, dit « digue mixte ».

Au départ du rivage, la partie de digue correspondante est celle de l’enracinement ; du côté de la « pleine mer », la digue se termine par un musoir, qui est un point très important de la digue ; on lui donne souvent une forme arrondie et l’on renforce sa protection à la base au moyen de gros blocs de béton.


Types de digues

Lorsque le fond marin est très affouillable et si l’agitation des eaux est très grande, on choisira de préférence la digue à talus. Celle-ci est d’ailleurs la solution classique, si, toutefois, les carrières d’extraction de matériaux sont à proximité, car le volume à mettre en œuvre est très important. S’il s’agit de grands fonds, auquel cas le volume de la digue à talus deviendrait excessif, ou si l’étendue de marnage est notable, le choix portera au contraire sur la digue verticale. Mais la sécurité de celle-ci tient essentiellement à l’appréciation la plus juste de l’amplitude maximale des plus fortes vagues qui viendront heurter le mur et s’y réfléchir.


Digue à talus

C’est un massif composé de moellons, de blocs de maçonnerie ou de blocs de béton dont les talus montent progressivement jusqu’au niveau de l’eau. Son emplacement doit tenir compte du site, mais aussi de la nature du sol d’assise et des fondations, ce qui exige une reconnaissance, des sondages et des études préalables à tous travaux.

Une assez grande liberté dans le détail des structures a conduit à de nombreuses variétés de digues talutées.

L’idéal serait d’employer deux grosseurs de blocs en mélange, les blocs de plus gros calibre étant chacun d’un poids aussi élevé que possible. Des raisons d’ordre pratique et des considérations économiques ne le permettent pas dans la presque généralité des cas. Dans la zone calme, en raison de la profondeur, on peut utiliser un massif de sable qui répartit les pressions et ne risque pas d’être affouillé ; mais ce sable reçoit sur toute sa surface une carapace de très gros blocs ou d’enrochements. Pour assurer la mise en place et la stabilité ultérieure des diverses couches, on est conduit à ménager des risbermes dans chaque couche inférieure. Cette première couche est elle-même recouverte d’une carapace supérieure de blocs de plusieurs dizaines de tonnes chacun ; faute de blocs naturels, on utilise des blocs parallélépipédiques en béton ayant généralement 4 m de long, 2 m de large et 2,50 m de haut. Ces blocs sont arrimés, et leur longueur est dirigée normalement à l’arrivée des lames. Côté « mer sauvage », la protection est complétée par des enrochements de pied et de talus ou par un enchevêtrement de Tétrapodes en béton. Le couronnement, dont la surface est aménagée en chemin de circulation et qui se situe à la partie supérieure du talus, est encastré dans une risberme ménagée à cet effet.