Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
D

désintoxication (suite)

Désintoxication des toxicomanes

La loi du 31 décembre 1970 prévoit cette cure par injonction du procureur de la République à une personne ayant fait un usage illicite de stupéfiants, ou par injonction de l’autorité sanitaire après examen médical pour des personnes signalées par des services médicaux et sociaux.

La cure de désintoxication est en fait limitée habituellement au sevrage, qui se présente de manière uniforme, surtout chez les toxicomanes habitués aux opiacés ou aux produits stupéfiants succédanés de la morphine.

La cure consiste surtout à limiter les syndromes d’abstinence pratiquement constants : malaises généraux, angoisse, agitation, sueurs et surtout douleurs, courbatures, myalgies, larmoiement, rhinorrhée. Le traitement habituel comprend l’arrêt de toute drogue stupéfiante, la prescription de faibles doses ou de doses modérées de neuroleptiques ou de tranquillisants, en s’aidant parfois de neuroleptiques majeurs intramusculaires en cas de grande agitation.

Une vitaminothérapie B est particulièrement nécessaire dans les états de carences alimentaires. L’intensité des douleurs pose un problème difficile, car elles ne sont pas calmées par les antalgiques habituels, ce qui conduit certains médecins à proposer un traitement substitutif, au moins transitoire, par de faibles doses d’opiacés, de dextromoramide ou de pentazocine.

L’utilisation des neuroleptiques provoque avec une assez grande fréquence des syndromes dyscinétiques (mouvements anormaux) ou extrapyramidaux hypertoniques (contractures) et doit être limitée à de faibles doses, surtout chez les sujets carencés. L’hypersensibilité aux neuroleptiques ne s’observe habituellement que chez les sujets ayant reçu de très fortes doses d’opiacés, et le sevrage après intoxication chronique par amphétamines ne donne pas de troubles de ce genre.

La cure de désintoxication elle-même doit comprendre normalement une suite thérapeutique au sevrage, celle-ci consistant en une prise en charge médicale et sociale capable de redonner à l’intoxiqué une certaine possibilité d’adaptation sociale.

À ce titre, certaines cures de désintoxication à la méthadone utilisent l’absorption obligatoire quotidienne d’une dose élevée d’un succédané morphinique, et une réadaptation sociale conditionnelle à l’absorption médicamenteuse. Elles ne peuvent être considérées comme de véritables désintoxications.


Désintoxication alcoolique

Elle est prévue par la loi du 15 avril 1954 créant des sections spécialisées dans les hôpitaux en vue de la désintoxication des alcooliques.

Les habitudes d’alcoolisme peuvent être dans une large mesure inhibées par des thérapeutiques dont la plus classique est celle de Jacobson, Martensen et Larsen, qui, en 1949, ont proposé l’utilisation de disulfirame pour provoquer une réaction physiologique lors de l’absorption concomitante d’alcool et de ce produit.

La cure elle-même se fait habituellement de la manière suivante :
a) élimination des sujets porteurs d’une tare cardiaque par électrocardiographie (ischémie), d’une tare cérébrale par électro-encéphalographie (tracé épileptique), de troubles psychiatriques (tendance délirante, détérioration mentale) ou hépatiques (signes d’insuffisance chronique) ;
b) absorption de disulfirame à la dose de 0,5 g par jour (certains alcooliques ayant montré des signes psychiques — confusion mentale, désorientation — ou même neurologiques du fait de l’absorption de doses plus élevées de ce corps) ;
c) administration de doses tests de la boisson alcoolique habituelle du malade. La réaction à l’action conjuguée du disulfirame et de l’alcool provoque régulièrement, mais de façon variable, une chute tensionnelle, une accélération du pouls, une vaso-dilatation cutanéo-muqueuse (rougeurs) et surtout un malaise très intense qui contribue indiscutablement à l’arrêt de l’absorption d’alcool. Après deux tests, la cure de désintoxication proprement dite se termine par l’éducation de l’alcoolique à la prise régulière de disulfirame et au rappel régulier, au cours d’une psychothérapie très prolongée, des accidents qu’il risque lors de la prise d’alcool.

Une autre technique de désintoxication, moins utilisée actuellement, a été proposée par Feldman. Elle consiste en l’établissement d’un réflexe conditionné de vomissements par l’apomorphine, chaque fois que le sujet absorbe la boisson alcoolique qu’il préfère.

Dans l’ensemble, les résultats des cures de désintoxication sont relativement limités, même chez l’alcoolique, et une postcure avec prise en charge et psychothérapie de longue durée s’avère dans tous les cas nécessaire.

E. F.

 S. Moeschlin, Klinik und Therapie der Vergiftungen (Stuttgart, 1952 ; 2e éd., 1956).

Despiau (Charles)

Sculpteur français (Mont-de-Marsan 1874 - Paris 1946).


Les premiers modelages de ce petit-fils et fils de maîtres plâtriers datent de 1889 et sont exécutés sous la surveillance d’un obscur Montois nommé Morin, qui a fait des travaux de pratique pour un sculpteur académique, Charles René de Saint-Marceaux (1845-1915). Il obtient une bourse municipale en 1891, part pour Paris et entre à l’École des arts décoratifs, où il a pour maître Hector Lemaire (1846-1933), ancien élève d’Alexandre Falguière (1831-1900) et de Carpeaux*. Après deux années, Despiau opte pour l’École nationale supérieure des beaux-arts et l’atelier de Louis Barrias (1841-1905). Moins conventionnel est toutefois l’enseignement que Despiau reçoit d’un praticien de Levallois qui lui apprend la taille de la pierre ; il se rend aussi au Louvre, au musée des Monuments français et achève ainsi sa formation, grâce aux modestes subsides que lui fait parvenir sa mère.

Il débute en 1898 au Salon des artistes français, où il expose le buste de Joseph Biays, un voisin d’atelier, représenté en chapeau melon et pardessus : audace, en un temps où l’art officiel considérait le drapé académique comme seul digne d’habiller la figure humaine. Le même goût s’exprimait dans les statuettes qu’il produisit ensuite et qu’il détruisit pour la plupart, sauf, notamment, celle pour laquelle posa Mlle Rudel (veste tailleur longue, col Médicis, vaste chapeau à bords plats), devenue sa femme en 1900.