Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
D

dédifférenciation et histolyse

La dédifférenciation est le retour de certaines cellules à un état embryonnaire totipotent ; l’histolyse est la disparition d’un organe larvaire différencié par destruction de ses cellules.


À un stade généralement précoce de la vie de l’organisme, la plupart des cellules qui le constituent, d’abord totipotentes, se spécialisent, acquièrent une morphologie et une physiologie particulières, caractéristiques du tissu et de l’organe auxquels elles appartiennent, et perdent la possibilité de se diviser, au moins dans la plupart des cas : elles sont différenciées (v. développement). Les cellules différenciées ont, quelquefois, la possibilité de redevenir des cellules totipotentes, auxquelles toutes les voies de la différenciation sont théoriquement ouvertes, de même que la multiplication de leur nombre par le mécanisme de la mitose. Ce retour en arrière, quelquefois jusqu’à un état très voisin de l’état embryonnaire, correspond à la dédifférenciation cellulaire.


Dédifférenciation cellulaire chez les végétaux

Chacun sait qu’il est souvent possible de bouturer un fragment de feuille adulte ou un segment de tige, par exemple. Or, ces organes, même privés de toute cellule méristématique, engendreront les parties complémentaires, de façon à reformer un individu complet.

L’analyse cytologique de la dédifférenciation cellulaire chez les végétaux a été menée de manière systématique par Buvat. L’évolution, régressive, peut être subdivisée en deux étapes.

• La phase histogène. Elle se traduit par le retour à une structure de cellule méristématique secondaire de Dicotylédone (cellule cambiale). Elle intéresse surtout le noyau, qui entre en division du fait que de nouvelles synthèses d’A.D.N. ont été rendues possibles. Les mitochondries se fragmentent et se multiplient après réplication de l’A.D.N. spécifique qu’elles contiennent. Les plastes régressent.

• La phase organogène. Le noyau devient central ; la densité du cytoplasme augmente, les structures membranaires se multipliant, alors que le vacuome se fragmente et se résout en un grand nombre de vacuoles de petite taille. Ces cellules sont alors tout à fait identiques aux cellules méristématiques primaires.

Ces phénomènes, banals, s’observent au cours de la morphogenèse normale, au moment de la formation des organes du végétal. L’apparition d’une racine latérale, par exemple, se fait par rajeunissement progressif d’une ou de plusieurs cellules péricycliques ou péricambiales. Ils s’observent aussi au cours des processus de régénération et permettent de comprendre l’intense pouvoir de multiplication végétative des végétaux inférieurs : un fragment de protonéma d’une Bryophyte, même limité à une seule cellule, redonne en quelques jours une plante entière avec ses organes différenciés, si les conditions du milieu se révèlent favorables. De même, un morceau de mycélium ou un fragment du thalle d’une Algue permettent respectivement la reconstitution du Champignon avec ses fructifications et de l’Algue complète. Il est à noter que, chez les végétaux supérieurs également, régénération et multiplication végétative sont fréquemment observables et impliquent la dédifférenciation.


Dédifférenciation cellulaire chez les animaux

Le pouvoir de dédifférenciation des cellules est bien moindre, mais non négligeable, dans le règne animal. Aux processus de la régénération participent, aux côtés de cellules qui ont conservé leurs potentialités embryonnaires, des cellules dédifférenciées qui concourent à l’édification de nouveaux tissus et organes. Ces cellules, très généralement, conservent la même spécialisation globale que celle qu’elles avaient initialement : des cellules dérivées du feuillet ectoblastique, après dédifférenciation puis une nouvelle spécialisation, redonneront des tissus apparentés à l’ectoblaste (de l’épiderme par exemple). Il en est de même en ce qui concerne la blastogenèse (bourgeonnement dans le règne animal) ; habituellement, tous les feuillets participent à la constitution des bourgeons après dédifférenciation, ainsi qu’un certain nombre de cellules indifférenciées. Ce n’est, cependant, pas toujours le cas : chez les Kamptozoaires et les Bryozoaires, toute l’organogenèse des bourgeons se fait à partir d’un massif cellulaire ectoblastique recouvert de mésoblaste, y compris celle des tissus normalement dérivés de l’endoderme. Des faits du même ordre s’observent également chez les Ascidies composées, dont les stolons présentent des varicosités qui se gonflent, puis se séparent de l’organisme maternel. Des cellules épidermiques et un massif de cellules mésenchymateuses les constituent. C’est uniquement à partir de ces cellules que s’édifiera le nouvel individu.

Dans le cours des processus de la régénération, comme dans les phénomènes cytologiques qui accompagnent les métamorphoses, la dédifférenciation est couplée avec l’histolyse d’organes préexistants. Ceux-ci sont détruits de manière extensive. Rappelons tout d’abord la disparition de la queue des têtards, la régression du thymus ou la perte de la racine des dents de lait chez les enfants. Pour prendre l’exemple de la métamorphose chez des Insectes, les Diptères, les cellules larvaires peuvent se désintégrer complètement et mourir (autolyse). Elles sont alors rejetées avec l’exuvie. Mais le tissu lysé, dont les membranes cellulaires ont perdu leurs relations de contact, peut également être phagocyté, et ses éléments véhiculés à travers l’organisme par les phagocytes de l’hémolymphe, qui les tiennent ensuite à la disposition des organes de l’adulte en voie d’élaboration.