Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
D

débilité mentale (suite)

L’approche analytique que présente Maud Mannoni remet profondément en cause des mesures psychopédagogiques telles que les rééducations instrumentales hâtives, le cloisonnement par QI, la diversification en établissements spécialisés. Elle rappelle également les effets, dramatiques parfois, du diagnostic médical entendu comme verdict fatal d’irrécupérabilité. Le mouvement de psychothérapie institutionnelle a contribué à renouveler certaines méthodes pédagogiques auprès d’enfants arriérés.

M.-A. P.

 S. Freud et J. Breuer, Studien über Hysterie (Vienne, 1895 ; trad. fr. Études sur l’hystérie, P. U. F., 1956). / S. Freud, Drei Abhandlungen zur Sexualtheorie (Vienne, 1905 ; trad. fr. Trois Essais sur la théorie de la sexualité, Payot, 1949) ; Hemmung, Symptom und Angst (Vienne, 1926 ; trad. fr. Inhibition, symptôme et angoisse, P. U. F., 1951 ; nouv. éd., 1965). / F. Dolto-Marette, Psychanalyse et pédiatrie (Legrand, 1940 ; nouv. éd., Éd. du Seuil, 1971). / M. Klein, Contributions to Psycho-Analysis (Londres, 1945 ; trad. fr. Essais de psychanalyse, 1921-1945, Payot, 1967). / J. Aubry, la Carence des soins maternels (P. U. F., 1955 ; nouv. éd., Libr. Riche, 1966). / M. Mannoni, l’Enfant arriéré et sa mère (Éd. du Seuil, 1964) ; l’Enfant, sa maladie et les autres (Éd. du Seuil, 1967) ; le Psychiatre, son « fou » et la psychanalyse (Éd. du Seuil, 1970). / L’Enfance handicapée, numéro spécial de Esprit (1965). / R. Fau et coll., Psychothérapie des débiles mentaux (P. U. F., 1966 ; nouv. éd., 1970). / J. Lacan, Écrits (Éd. du Seuil, 1966). / L’Enfance aliénée, numéro spécial de Recherches (1967). / O. Mannoni, Clefs pour l’imaginaire (Éd. du Seuil, 1969). / R. Zazzo (sous la dir. de), les Débilités mentales (A. Colin, 1969). / L. Not, l’Éducation des débiles mentaux (Privat, Toulouse, 1973).

Debussy (Claude)

Compositeur français de l’école impressionniste (Saint-Germain-en-Laye 1862 - Paris 1918).



L’ascendance

Achille Claude Debussy a une double ascendance bourguignonne. Laboureurs et vignerons des siècles durant, petits artisans pendant trois générations, les Debussy n’accèdent au rang des cols blancs qu’avec le père du musicien, Manuel Achille. Mais bouillant et sans bagage, celui-ci ne connaît que des échecs : volontaire dans l’infanterie de marine, marchand faïencier, courtier, chômeur, il est capitaine communard en 1871, traduit en conseil de guerre, emprisonné pendant un an avant de se stabiliser comme petit employé.


L’enfance (1862-1871)

Debussy grandit dans cette atmosphère amère et instable, poétisée par deux séjours à Cannes, où les rosés et la mer l’émerveillent et où sa tante paternelle Clémentine, l’ayant la première deviné, lui fait prendre à huit ans des leçons de piano. Voué à un destin exceptionnel par une mère qui l’aime passionnément et néglige ses quatre cadets, il doit à la sédition paternelle de continuer dans la musique : en prison, son père rencontre Charles (de) Sivry, qui fait connaître au petit Achille Mme Mauté de Fleurville, sa mère ; celle-ci l’encourage à entrer au Conservatoire et lui enseigne le piano pour faire de lui un virtuose aux éblouissants cachets...


La formation (1872-1884)

À cette tâche, les Debussy s’attellent opiniâtrement, et les six premières années d’étude sont positives : Achille est jugé « véritable tempérament d’artiste », il a ses trois médailles de solfège et obtient en 1877 un deuxième prix de piano. Puis le créateur prend le pas sur l’interprète : inhibé au contact du public, il échoue deux années de suite pour le premier prix. Il échoue aussi en harmonie, se moquant des « formules types » imposées comme il avait raillé les « pauvretés rythmiques » des manuels de solfège (nota bene : à quatorze ans). Mais, ayant désormais trouvé sa voie, il entre en 1880 en classes d’accompagnement et de composition, réussit brillamment dans la première et se met à composer sur des vers de Gautier, Bourget, Banville. Hormis une médiocre Danse bohémienne, le pianiste, pendant dix ans, n’écrira que pour la voix, c’est-à-dire pour la femme. La plupart de ses mélodies sont dédiées à Mme Vasnier, son égérie et son premier amour. Une vingtaine n’ont pas été publiées ou l’ont été dans des revues. Pour les autres, plusieurs des plus réussies ont — et auront — Verlaine* pour poète : Nuit d’étoiles ; Fantoches ; Pantomime ; Fleur des blés ; Mandoline ; Clair de lune ; Voici que le printemps ; Zéphyr ; En sourdine ; etc.

Ténébreux, fascinant, il séduit. Il doit beaucoup aux femmes : elles l’ont conduit et encouragé à la musique ; Mme Pelouze et Mme von Meck l’ont dirigé vers la composition, la seconde lui offrant en sus trois étés de vacances en Italie et en Russie (1880-1882) ; deux cantatrices le prennent comme accompagnateur à leur cours de chant, Mme Vasnier le pousse au couronnement de ses études.

En composition, son maître Ernest Guiraud s’étonne de la hardiesse des enchaînements d’accords qu’il improvise ; il note que le jeune homme « écrit mal la musique ». Déjà Debussy pressent un langage différent : les ruissellements d’accords, d’arpèges et de trilles dont il caresse les pianos du Conservatoire devant ses camarades l’attestent, mais il ne croit pas encore possible de le fixer par l’écriture. Et il doit se modérer pour obtenir en 1883 le second, en 1884 le premier grand prix de Rome, ici avec la cantate l’Enfant prodigue, sage mais déjà personnelle, qui vaut à son auteur cet éloge de Gounod : « Toi, mon petit, tu as du génie ! »


La décantation (1885-1887)

Tenu de rester deux ans au moins à Rome, à la villa Médicis, il ne prolonge que d’un mois son séjour dans cette « caserne ». Ses premiers « envois », notamment Printemps, sont blâmés par l’Académie. Il veut sortir des chemins battus : ses lettres témoignent qu’il s’efforce de fixer son esthétique, cherche le texte où il puisse sacrifier l’action à « l’expression longtemps poursuivie des sentiments de l’âme ». Il croit l’avoir avec la Diane au bois de Banville, qu’il abandonnera, et avec la Damoiselle élue de D.-G. Rossetti. La mélodie Green ne sera achevée qu’en 1888 et il avoue à Vasnier qu’il se trouve « dans l’obligation d’inventer de nouvelles formes ».