Dauphiné (suite)
L’art gothique est moins riche. Pourtant, au milieu du xiiie s., une certaine prospérité permettra à l’archevêque Jean de Bernier de réédifier en partie Saint-Barnard de Romans ainsi que sa cathédrale Saint-Maurice de Vienne, consacrée de nouveau en 1251 mais achevée au xvie s. seulement par une façade flamboyante. Un autre édifice majeur est l’ancienne abbaye de Saint-Antoine en Viennois, promue en 1297 chef d’un nouvel ordre hospitalier : les Antonins, qui soignaient le « mal des ardents ». L’église est reconstruite à partir de la fin du xiie s. ; au xve s., le sculpteur Antoine Le Moiturier (v. 1425 - v. 1500), venu d’Avignon et avant de se rendre à Dijon, orne les portails de la façade, dont la composition rigoureuse est rythmée par les six verticales des contreforts à niches et pinacles.
En matière de peinture murale, pour le xve s. également, les découvertes se sont récemment multipliées, surtout dans le Briançonnais ; des églises rurales révèlent un art gothique un peu archaïsant mais plein de saveur, qui, par ses équivalents en Savoie, en Piémont et dans le comté de Nice, affirme l’unité très caractéristique des deux versants des Alpes.
Face aux réussites du domaine religieux, l’architecture civile et militaire ne doit pas être oubliée : ruines de Beauvoir-en-Royans (xiiie s.), ancienne résidence des dauphins, château Bayard (xiiie-xve s.), château de Montélimar (xiie-xve s.), magnifique donjon de Crest (xiie s.), château de Suze-la-Rousse (xiiie-xvie s.) égayé d’une cour intérieure à arcades Renaissance...
Après les ravages des guerres de Religion se produit un nouvel essor, dont témoignent les constructions du connétable de Lesdiguières, son hôtel à Grenoble et surtout sa somptueuse résidence de campagne, le château de Vizille, rebâti à partir de 1611 grâce au concours de nombreux artistes flamands et lorrains. Également reconstruit pour le connétable, mais plus tardif, le château de Sassenage appartient à l’ère classique, encore insuffisamment étudiée. Les vastes bâtiments aux hautes toitures de la Grande-Chartreuse ont de belles qualités d’équilibre, à la mesure de la noblesse des montagnes qui l’entourent. Enfin, il ne faut pas oublier les créations de Vauban, chargé de fortifier les points stratégiques de la frontière : Mont-Dauphin (1692), Briançon (1693-1722) sont, avec Château-Queyras, les plus beaux exemples de l’architecture bastionnée.
F. E.
G. Dupont-Ferrier, les Institutions bailliagères en Dauphiné, 1440-1515 (Bouillon, 1902). / E. Esmonin, les Intendants du Dauphiné des origines à la Révolution (Allier, Grenoble, 1923). / T. Sclafert, le Haut Dauphiné au Moyen Âge (Sirey, 1926). / A. Van Gennep, le Folklore du Dauphiné (Maisonneuve, 1932 ; 2 vol.). / J. Egret, le Parlement du Dauphiné et les affaires publiques depuis la seconde moitié du xviiie siècle (Arthaud, 1942 ; 2 vol.) ; les Derniers États du Dauphiné, septembre 1788 - janvier 1789 (Arthaud, 1945). / P. Léon, la Naissance de la grande industrie en Dauphiné, fin du xviie siècle - 1869 (P. U. F., 1954 ; 2 vol.). / Visages du Dauphiné (Horizons de France, 1965). / G. Chianéa, la Condition juridique des terres en Dauphiné au xviiie siècle (Mouton, 1969). / R. Bornecque, Dauphiné (Arthaud, 1971). / P. Dreyfus, Histoire du Dauphiné (P. U.F., coll. « Que sais-je ? », 1972). / B. Bligny (sous la dir. de). Histoire du Dauphiné (Privat, Toulouse, 1973).