Dalmatie (suite)
L’État serbe du Moyen Âge (fin xiie-xiiie s.), l’État bosniaque au xive s. (sous Étienne II Kotromanić et surtout Tvrtko Ier) engloberont la partie méridionale de la Dalmatie. Mais de 1420 jusqu’en 1797, les îles et les villes du littoral (moins Dubrovnik, qui a un statut indépendant) dépendront de Venise.
Au xviie s. et au début du xviiie s., les Turcs conquièrent l’arrière-pays et une petite partie du littoral au sud d’Omiš, provoquant une émigration des populations slaves vers la région du littoral. La Dalmatie vénitienne s’étendra aux dépens des Turcs lors des guerres austro-turques (traité de Sremski Karlovci en 1699, de Požarevac en 1718). Le traité de Campoformio en 1797 octroie à l’Autriche les possessions vénitiennes en Dalmatie ; mais en 1805 la Dalmatie (et Dubrovnik) revient aux Français, qui l’incluent dans les Provinces Illyriennes (1809-1814). Au traité de Vienne, en 1815, l’Autriche en reprendra possession. L’occupation française, qui a favorisé certaines réformes « jacobines », amorce un renouveau national suscité par l’affirmation de la langue populaire slave (illyrienne).
Mais après 1815 le centre de l’illyrisme devient la Croatie ; malgré ses promesses, l’Autriche empêchera toujours le rattachement de la Dalmatie à la Croatie ; le compromis austro-hongrois de 1867 soumet la Dalmatie à l’Autriche, tandis que la Croatie dépend de la Hongrie. En Dalmatie même, il existe d’ailleurs une opposition entre d’une part les « autonomistes », de culture italienne, partisans d’une autonomie sous la dépendance de l’Autriche, et qui ont longtemps une influence prépondérante, et d’autre part les « unionistes », partisans de l’union avec la Croatie (parti « national ») ; les unionistes finiront par obtenir en 1870 la majorité à la Diète dalmate. Par la suite, des dissensions apparaissent entre Serbes et Croates ; elles affaiblissent le parti national.
Au début du xxe s., ce sont des députés de Dalmatie (Frano Supilo, Ante Trumbić) qui sont les initiateurs, en Croatie et en Dalmatie, du rapprochement entre Serbes et Croates (résolution de Zadar et de Fiume en 1905) [v. Croatie]. Pendant la guerre, ces deux députés animent le Comité national yougoslave de Londres, créé pour la défense des intérêts des Yougoslaves de l’Autriche-Hongrie.
En 1918, la Dalmatie entre dans le royaume des Serbes, Croates et Slovènes, mais, par le traité de Rapallo en 1920, l’État yougoslave doit céder à l’Italie, en plus de l’Istrie, les îles de Krk, de Lastovo, de Palagruž et la ville de Zadar, territoires qui ont été promis par les Alliés à l’Italie dans le traité secret de 1915.
En 1941, une partie du littoral dalmate est annexée par l’Italie. En mai 1944, l’île de Vis devient le quartier général du mouvement des partisans de Tito, qui y signe en juin 1944 un accord avec Ivan Šubašić, le représentant du gouvernement royal en exil. En 1945, la Dalmatie entre dans la république de Croatie ; elle recouvre aujourd’hui une entité géographique (il n’y a pas de nationalité dalmate), mais elle a gardé de son histoire certaines particularités, ainsi que des traces de l’influence italienne, dans l’architecture notamment.
M. P. C.
➙ Croatie / Yougoslavie.