Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
D
D

Dąbrowska (Maria)

Femme de lettres polonaise (Russów, près de Kalisz, 1889 - Varsovie 1965).


Maria Dąbrowska, l’un des plus grands écrivains polonais du xxe s., fit dans les lettres une entrée relativement tardive. Elle avait déjà derrière elle une carrière de journaliste commencée dès ses années d’études à l’étranger (Suisse, Belgique, puis Angleterre, France), une activité de militante dans des organisations patriotiques d’émigrés et parmi les mouvements réformistes occidentaux, comme le coopératisme, auquel elle consacra de nombreuses publications. L’œuvre de l’écrivain devait demeurer marquée par cette formation et constamment guidée par l’idéal social et moral dont elle se fit alors l’ardente propagandiste.

Après des ouvrages destinés à la jeunesse, deux recueils de nouvelles attestèrent aussitôt sa filiation réaliste et sa maîtrise des moyens artistiques. Le premier, Uśmiech dzieciństwa (Sourire d’enfance, 1923), évoque le temps où, dans l’émerveillement, se noue l’« alliance avec la vie » ; l’auteur y souligne l’importance des premières impressions et le rôle capital du souvenir dans la création artistique. Le recueil suivant, Ludzie stamtąd (Gens de là-bas, 1925), rapproché à juste titre des Récits d’un chasseur de Tourgueniev, découvre un autre univers, celui du prolétariat rural : des êtres misérables, mais possédant une vie intérieure et des qualités d’âme par lesquelles ils surmontent leur condition, témoignent d’une dignité humaine exemplaire.

De 1932 à 1934, M. Dąbrowska publie Noce i Dnie (les Nuits et les Jours), son œuvre maîtresse. Dans un cadre historique délimité par l’insurrection de 1863 et les premiers jours de la Grande Guerre, l’action a pour matière les changements déterminés dans la société polonaise par la disparition de la classe des petits propriétaires terriens, la formation simultanée de la bourgeoisie et du prolétariat, la naissance et le développement de l’intelligentsia moderne. Les phases successives des bouleversements intervenus alors dans la vie matérielle comme dans les mentalités sont décrites à travers les vicissitudes de deux familles déclassées dont les membres, au cours de deux générations, s’efforcent de s’adapter aux conditions nouvelles et de retrouver une place dans la société. Le panorama d’une époque est inséparable de l’étude psychologique. D’une extrême diversité, marqués de traits typiques liés à l’histoire et aux circonstances, les personnages sont fortement individualisés, obéissant à leur destin singulier. N’ignorant rien de ce que, dans leurs manifestations et leurs effets, complexes, contradictoires, les sentiments doivent au jeu de l’inconscient, la romancière s’attache à souligner le rôle que tiennent, dans la vie du cœur et les rapports entre les êtres, les dispositions et les valeurs morales. La psychologie conduit à l’éthique, et tout se compose dans un ensemble organique qui exprime une conception du monde. L’auteur y affirme un indéfectible amour de la vie, qui ne prend sa valeur et son sens que par le travail créateur, le refus de tout égoïsme, la bonté compatissante aux souffrances et aux misères d’autrui.

La prose de M. Dąbrowska, ici comme dans les nouvelles, est simple, dense, variée : c’est la langue de tous les jours, mais purifiée, enrichie. Son style, d’autant plus expressif qu’il se donne pour règle de dire moins pour faire entendre plus, n’est pas seulement ennemi des outrances et des effets, il a en propre de passer inaperçu, instrument docile et tout en nuances d’un écrivain dont l’idéal est de « toucher dans chaque phrase, si humble en soit le sens, aux grands problèmes de la vie sur la terre ».

M. Dąbrowska a publié deux autres recueils de nouvelles : Znaki życia (les Signes de la vie, 1938), qui marquent un approfondissement de ses préoccupations morales et philosophiques ; Gwiazda zaranna (l’Étoile du matin, 1955), où, avec une sympathie attentive et une lucidité sans complaisance, elle observe les changements intervenus autour d’elle après la dernière guerre. Elle a laissé un roman inachevé, Przygody człowieka myślącego (les Aventures d’un homme de raison), dans lequel, au milieu des horreurs de la guerre et de l’occupation, elle affirme de nouveau son amour de la vie, plus forte que tous les désastres. Elle est encore l’auteur de deux drames historiques, de nombreux essais de critique littéraire, dont une remarquable étude sur Conrad, de souvenirs de voyages, de traductions (S. Pepys, Tchekhov).

J. B.

 Cinquante Années de création littéraire de Maria Dąbrowska (en pol., Varsovie, 1963). / Z. Libera, Maria Dąbrowska (en pol., Varsovie, 1963).

Dacie

Pays s’étendant dans l’Antiquité, sur la rive gauche du bas Danube, et correspondant à une grande partie de la Roumanie actuelle et à une partie de la Hongrie.


Parmi les peuples mentionnés par les Anciens, Scythes, Gètes, Daces, ces derniers demeurèrent seuls à partir du temps de Philippe V de Macédoine. Ils étaient apparentés aux Thraces. Dominés par une aristocratie foncière, ils exploitaient des mines de sel et d’or, et leur civilisation aurait eu quelque ressemblance avec celle de la Grèce mycénienne. Ils étaient d’ailleurs en relations commerciales avec les Grecs, au moins depuis l’époque où ceux-ci colonisèrent le littoral de l’Euxin.

Au ier s. av. J.-C., sous la conduite de leur chef Burebista (ou Berebistes), les Daces conquièrent toute la région du Danube inférieur et attaquent fréquemment les Romains. Auguste les repousse, ainsi que Domitien, qui entreprend même la conquête de leur pays, conquête que Trajan réalise en une série de campagnes, en 101-102 apr. J.-C. Une garnison romaine est installée dans la capitale, Sarmizegetusa (Grădiştea Muncelului). D’abord soumis, leur roi, le grand Décébale, se révolte (105-106), puis, vaincu, se suicide (106). La colonne trajane est érigée à Rome en souvenir de ces guerres.