alcoolisme (suite)
Complications digestives
Elles sont très fréquentes. La gastrite (v. estomac) est presque constante et existe même si le malade ne ressent rien, la pancréatite (v. pancréas) n’est pas rare et la cirrhose* du foie entraîne très souvent la mort. Elle tue soit en provoquant une ascite qui détermine un état cachectique, soit en faisant apparaître une insuffisance hépatique grave, soit en étant à l’origine d’hémorragies digestives cataclysmiques.
Prévention
En France, différentes mesures ont été prises.
La loi du 15 avril 1954 a posé pour principe que « tout alcoolique dangereux pour autrui est placé sous surveillance de l’autorité sanitaire » (représentée dans chaque département par le directeur de l’autorité sanitaire et sociale, auquel est adjoint un médecin). Elle a prévu la création de centres de rééducation spécialisés ou de sections spécialisées dans les hôpitaux existants en vue de la désintoxication et de la rééducation des alcooliques. Sur signalement par la police, par un médecin ou une assistante sociale, une enquête et un examen médical par un spécialiste sont prescrits par l’autorité sanitaire. Une mesure pour la désintoxication de l’intéressé peut être prise et rendue obligatoire. Une ordonnance du 7 janvier 1959 interdit aux débits de boisson de recevoir des mineurs de moins de seize ans non accompagnés de leurs parents et d’y employer des mineures de moins de vingt et un ans, si elles ne sont pas parentes du débitant. Un décret du 14 juin 1961 prévoit des zones de protection autour de certains établissements. Le Code du travail interdit à toute personne ayant autorité sur les ouvriers de laisser introduire ou de distribuer des boissons alcoolisées sur les lieux de travail.
En matière de conduite automobile, une loi de 1970 modifie le Code de la route et adopte un taux légal d’alcoolémie à deux degrés. Toute personne qui aura conduit un véhicule, alors qu’elle se trouvait, même en l’absence de tout signe d’ivresse manifeste, sous l’empire d’un état alcoolique caractérisé par la présence dans le sang d’un taux d’alcool pur égal ou supérieur à 0,80 g p. 1 000, sans que ce taux atteigne 1,20 g p. 1 000, sera considérée comme étant en état de contravention, et comme commettant un délit à partir d’un taux égal ou supérieur à 1,20 g p. 1 000.
À l’occasion d’une infraction au Code de la route (chevauchement d’une ligne jaune, dépassement dangereux, etc.), ou d’un accident quelconque de la circulation, les officiers ou agents de la police administrative ou judiciaire soumettront le conducteur à des épreuves de dépistage de l’imprégnation alcoolique par l’air expiré (alcootest).
Lorsque les épreuves de dépistage permettront de présumer l’existence d’un état alcoolique ou lorsque le conducteur aura refusé de les subir, les officiers ou agents de la police administrative ou judiciaire feront procéder aux vérifications médicales, cliniques et biologiques destinées à établir la preuve de l’état alcoolique, notamment par prise de sang. Le conducteur ayant refusé de se soumettre à ces vérifications sera puni des mêmes peines que le conducteur ayant commis le délit de conduite en état d’ivresse.
Conséquences de l’alcoolisme
On ne peut que sous-estimer la mortalité par l’alcoolisme, car les décès qui lui sont directement ou indirectement dus sont en fait le plus souvent attribués à un autre motif. Il est cependant prouvé que, dans la hiérarchie des causes de décès, il se place en troisième position, juste après les maladies cardio-vasculaires et le cancer. En France, des statistiques montrent que l’alcoolisme est certainement l’unique cause de plus de 23 000 morts par an ; mais, de plus, il intervient comme facteur déterminant dans un tiers des décès par tuberculose, provoque le tiers des accidents mortels de la route, est trouvé dans les 4/5 des cas de cancer du plancher de la bouche ou de l’œsophage, favorise la survenue de nombreux accidents du travail et est un des facteurs importants de la criminalité (50 p. 100 des homicides lui sont dus) et de la délinquance juvénile. Enfin, il est responsable de troubles mentaux qui constituent le motif d’entrée dans les établissements psychiatriques du cinquième des malades qui y sont admis. L’ensemble des charges que l’alcool impose à la collectivité peut actuellement être évalué en France à plus de 7 milliards de francs par an.
Vocabulaire de l’alcoolisme
alcoolomanie, besoin de boissons alcooliques s’accompagnant d’une impulsion irrésistible à les boire ;
dipsomanie, tendance qui pousse irrésistiblement le sujet à boire des boissons alcoolisées jusqu’à l’ivresse ;
œnilisme ou œnolisme, alcoolisme provoqué par l’abus du vin ;
teetotalisme, système excluant de l’alimentation toute boisson alcoolique (et l’emploi exclusif du thé), qui a donné naissance en Angleterre et aux États-Unis à de nombreuses sociétés de tempérance ;
zoopsie, vision hallucinatoire d’animaux. La zoopsie est fréquente dans le delirium tremens.
J. P.
G. Malignac, l’Alcoolisme (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1954 ; 4e éd., 1969). / J. Godard, la Prévention de l’alcoolisme à l’usine (Éd. de l’entreprise moderne, 1956) ; le Médecin du travail et l’alcoolisme (la Documentation française, 1966). / E. M. Jellinek, The Disease Concept of Alcoholism (Highland Park, New Jersey, 1960). / R. Binois et M. Lefetz, Détérioration psychologique dans l’intoxication éthylique chronique (Masson, 1962). / L. Faurobert, les Degrés de l’alcoolisme (Hachette, 1962). / J. Lereboullet, l’Alcoolisme (Baillière, 1972).
On peut également consulter le Bulletin d’information du Haut Comité d’étude et d’information sur l’alcoolisme et la Revue de l’alcoolisme.