Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Cortés (Hernán) (suite)

Perte et reprise de la capitale

Mais les gens de Tenochtitlán, victimes d’un massacre effectué par les Espagnols restés sur place, se sont soulevés entre-temps, et Cortés, de retour, ne peut venir à bout des insurgés malgré l’intervention de Moctezuma en faveur des envahisseurs (lapidé par les siens, l’ancien empereur mourra quelques jours après, peut-être achevé par les Espagnols).

Cortés doit battre en retraite dans la nuit du 1er juillet : c’est la « noche triste », car, surpris sur les digues, les Espagnols se débandent ; 450 d’entre eux sont tués, et leur riche butin est perdu. Blessé, Cortés se réfugie chez ses amis de Tlaxcala. Pour reconquérir la capitale, il s’établit à Texcoco, sur la lagune. L’assaut est donné par les digues, mais aussi par les eaux grâce à treize embarcations dont les éléments ont été amenés à dos d’homme depuis le littoral du golfe du Mexique. Le nouvel empereur, Cuauhtémoc, oppose une résistance farouche, et les Espagnols doivent s’emparer de la ville maison par maison. Le 13 août 1521, la capitale, en ruine et remplie de cadavres, est enfin totalement occupée.


L’organisation de la Nouvelle-Espagne

Cortés se consacre très vite à la reconstruction de la cité et à l’établissement du pouvoir espagnol sur tout l’Empire aztèque, avec l’aide de ses lieutenants. Le 15 octobre 1522, Charles Quint le nomme capitaine général et gouverneur des terres conquises.

Deux ans plus tard, Cortés organise une grande expédition vers la côte du Honduras. Le départ se fait au son du hautbois ; bien vite, la marche dans les forêts immenses deviendra un calvaire. Il s’agit de reprendre en main une entreprise dont le chef Cristóbal de Olid a voulu faire, à l’instigation de Velázquez, une machine de guerre contre le conquérant de Tenochtitlán. Mais, avant même l’arrivée de Cortés, les partisans de celui-ci ont déjà assassiné Olid. Cortés avait emmené Cuauhtémoc en otage, ce qui lui vaut l’acte qu’on lui a le plus reproché : il fait exécuter l’empereur en cours de route, sous prétexte que ce dernier tramait une révolte générale. En fait, le danger pour Cortés venait encore des Espagnols eux-mêmes : des traîtres se sont emparés un moment du gouvernement de Mexico, l’ancienne Tenochtitlán.


La gloire de Cortés

Les amis de Cortés viennent facilement à bout des usurpateurs, et le conquistador rentre triomphalement à Mexico (mai 1526). De nouvelles intrigues l’obligent pourtant à se rendre en Espagne (1528) pour plaider sa cause auprès de Charles Quint. Son voyage est un triomphe : Cortés est fait marquis de la vallée d’Oaxaca ; un immense domaine lui est concédé au Mexique, et il épouse la fille d’un grand d’Espagne, le duc d’Aguilar. De retour au Mexique en juillet 1530, il se heurte encore à des jalousies diverses et se consacre dès lors à la mise en valeur de ses terres de Cuernavaca, faisant venir des mûriers d’Espagne pour l’élevage des vers à soie, créant des manufactures, exploitant des mines. Il organise même de nouvelles expéditions de découverte et part en 1536 vers la Basse-Californie. Dans ces entreprises de conquêtes, il laisse une grande partie de sa fortune et se heurte à un nouvel adversaire, le premier vice-roi du Mexique, Antonio de Mendoza.


Le déclin

Le conquistador revient encore en Espagne (1540) pour soumettre de nouveaux projets à Charles Quint. Mais on lui témoigne une certaine froideur, et il doit se contenter de participer en 1541 à une expédition contre Alger. Fiasco total : son navire fait naufrage, et il doit gagner la côte à la nage. Il vivra désormais dans une demi-disgrâce, considéré, tout au plus, comme une gloire qui appartient à un passé révolu. Le présent, c’est le Pérou, cette possession qui rapporte enfin à la Couronne les quantités d’or massives espérées depuis la découverte du Nouveau Monde. Terrassé par la dysenterie, Cortés ne retournera pas dans l’immense empire qu’il a donné à Charles Quint.

S. L.

 Cruautés horribles des conquérants du Mexique, mémoire de don Fernando d’Alva Ixtlilxochitl (Arthus Bertrand, 1838 ; rééd. Éd. Anthropos, 1967). / W. Prescott, History of the Conquest of Mexico (Londres, 1925 ; trad. fr. la Mort de l’Empire aztèque, Éd. de Saint-Clair, 1963). / J. Babelon, la Vie de Fernand Cortés (Gallimard, 1928) ; l’Amérique des conquistadores (Hachette, 1947). / J. Cassou, les Conquistadors (Gallimard, 1941). / S. de Madariaga, Hernan Cortés (Calmann-Lévy, 1953 ; nouv. éd., le Livre de poche, 1964). / J. Descola, les Conquistadors (Fayard, 1954). / Vision de los vincidos (Mexico, 1961 ; trad. fr. le Crépuscule des Aztèques, récits indigènes de la Conquête, textes prés, par M. Léon-Portilla, Casterman, 1965). / La Conquête de la Nouvelle Espagne (Rencontre, Lausanne, 1962). / J. Lafaye, les Conquistadores (Éd. du Seuil, coll. « Microcosme », 1964).

Cortone (Pierre de)

En ital. Pietro da Cortona, de son vrai nom Pietro Berrettini, peintre et architecte italien (Cortone 1596 - Rome 1669), l’un des grands maîtres de l’art baroque*.


Il se fixa vers 1612 à Rome, où il trouva un protecteur efficace en la personne du marquis Marcello Sacchetti, qui appartenait à un cercle d’amateurs d’art et d’humanistes. C’est pour lui qu’il peignit vers 1620 quatre grands tableaux d’histoire : le Sacrifice de Polyxène, le Triomphe de Bacchus, le Combat d’Alexandre et de Darius, l’Enlèvement des Sabines, aujourd’hui au palazzo dei Conservatori, à Rome. Sa personnalité s’y révèle déjà : celle d’un peintre typiquement baroque, que son goût du faste, des compositions chargées et des couleurs claires, hérité du maniérisme toscan, tient à l’écart des deux grands courants qui se partageaient alors l’école romaine, à savoir l’académisme* des Carrache* et le réalisme dramatique du Caravage*. Par l’entremise du cardinal Giulio Sacchetti, frère du marquis, Pietro obtint du cardinal Francesco Barberini la commande des fresques représentant la Vie de sainte Bibiane, dans l’église du même nom. Ce travail, qu’il accomplit de 1624 à 1626, le consacra peintre officiel de la cour pontificale et de la haute société romaine. C’est à ce titre qu’il peignit à fresque, de 1631 à 1639 environ, le plafond du grand salon du palais Barberini. Cette énorme et magnifique composition, allégorie à la gloire de la famille Barberini, marque une date de la peinture décorative en ce qu’elle est d’un seul tenant. Le souffle y est à la mesure des dimensions. De nombreuses figures se meuvent avec aisance dans un ciel léger, auquel la perspective verticale donne une profondeur infinie.