Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Corée (suite)

Le fait que les femmes aient été exclues du culte des ancêtres prouve qu’elles subissaient une discrimination sociale, préconisée par le confucianisme. Le statut des femmes est certes amélioré depuis 1945. Mais, malgré les textes qui affirment l’égalité des deux sexes, les femmes se trouvent en réalité toujours dans une situation socialement inférieure à l’égard des hommes ; ainsi il y avait en 1966, en Corée du Sud, environ 2 000 filles diplômées d’enseignement supérieur contre 36 000 jeunes gens, et 3 331 000 travailleuses contre 6130 000 travailleurs.

Les formes traditionnelles de la société coréenne commencent à disparaître progressivement, aussi bien sous le régime libéral et démocratique du Sud que sous celui de caractère communiste totalitaire du Nord, qui, l’un comme l’autre, cherchent avidement une voie de modernisation, laquelle se confond souvent avec une occidentalisation sociale et économique hâtive. Le fait que, selon une enquête récente, 30 p. 100 des agriculteurs et 35 p. 100 des intellectuels du Sud sont pour l’abolition du culte des ancêtres et que 71 p. 100 des agriculteurs et 89 p. 100 des intellectuels du Sud ne veulent plus respecter inconditionnellement l’ordre de généalogie et d’âge montre à quel point la société moderne de la Corée désire se détacher des traditions.

Sur le plan économique, l’effort des deux Corées pour l’innovation a déjà commencé à porter ses fruits ; le métayage, statut sous lequel étaient placés environ 80 p. 100 de paysans jusqu’en 1945, a disparu dès 1948 ; dans le Sud, les paysans sont devenus propriétaires de plein droit de la terre qu’ils cultivent, tandis qu’au Nord la totalité de la surface de la terre cultivée est placée sous le contrôle des nong-ŏp hyŏp-tong čo-hap (unités collectives agricoles), dont le nombre total s’élevait à 13 300 en 1958, l’année où la propriété privée de la terre a complètement été remplacée par la propriété collective.

L. O.


L’économie et les paysages de la Corée du Nord

Plus étendue que sa voisine méridionale, la république démocratique populaire de Corée a deux fois moins d’habitants, ce qui lui donne une densité moyenne de 125 habitants au kilomètre carré, assez faible pour une nation extrême-orientale. Exposées quasi exclusivement à l’influence climatique de la masse asiatique, les hautes terres qui constituent les neuf dixièmes du pays ne s’ouvrent largement qu’à l’ouest, autour de P’yŏng-yang et sur le bas Ya-lu, et, secondairement, à l’est. Aussi, plus que l’agriculture, c’est l’industrie qui reçut l’essentiel de l’effort japonais. Ici se trouvaient dès 1930 les plus vastes ensembles industriels de la péninsule et quelques-uns des plus grands barrages de l’Extrême-Orient. Usines et centrales furent sévèrement bombardées durant la guerre, et, en 1954, la valeur de la production n’excédait pas les deux cinquièmes de celle de 1944. La reconstruction fut rapide grâce au maintien sur place des techniciens nippons et à une aide substantielle des pays voisins : aide russe d’un milliard de roubles destinée à rétablir les grandes bases industrielles ; de la Chine, prêt de 8 milliards de yuans, grâce auquel on put approvisionner le pays en biens de consommation durant la reconstruction.

La Corée du Nord est un pays socialiste, réservant à l’État la propriété du sol, des moyens de production et des transports. Une stricte planification commande toute la vie économique et sociale. Un premier plan de trois ans permit de rétablir centrales énergétiques et voies ferrées ; un second, de cinq ans (1957-1961), poursuivit cet effort tout en remettant ports et usines en état ; un troisième, septennal, qui lui succéda, faisait une part plus grande aux biens d’usage, mais il ne put être mené à terme avant 1970. Une réforme agraire poursuivie parallèlement regroupa dès 1959 la totalité des cultivateurs en fermes coopératives.


Les productions

L’agriculture a toujours été le secteur difficile de cette économie ; le manque de terres arables, la rudesse du climat ne laissent au riz que le quart des surfaces affectées aux grains (2 Mha) et la moitié de la récolte totale (6 Mt). De grands efforts de vernalisation l’étendent toutefois sans cesse vers le nord. Le blé, l’avoine, le maïs, secondairement le sorgho, la pomme de terre et le soja couvrent la plupart des superficies non irriguées. De forts épandages d’engrais (dont les Japonais avaient installé ici de grandes unités de production) assurent toutefois des rendements égaux à ceux des campagnes les plus riches du Sud ou du Japon (42,3 q/ha de riz). Ce grand effort était indispensable à la Corée du Nord, privée désormais de sa traditionnelle source de grains qu’était le Sud.

C’est en effet l’industrie qui, plus que jamais, demeure le pivot de l’économie. Ici se trouvent les trois quarts du potentiel hydraulique, les quatre cinquièmes de la houille et 85 p. 100 des ressources métalliques de la péninsule. La puissante infrastructure mise en place par les Japonais a guidé leur remise en valeur. La production charbonnière est de 27,5 Mt, la production d’acier de 2,5 Mt, celle des engrais de 1,5 Mt, chiffre encore insuffisant. L’électrification domestique a rapidement progressé, et 95 p. 100 des familles nord-coréennes en jouiraient aujourd’hui. Pour le reste, on dispose de peu de renseignements chiffrés sur cette industrie, qui a fourni en 1970 les trois quarts du produit national.


Les régions

Des trois régions naturelles de la Corée du Nord, celle du centre est la moins développée. Correspondant aux plateaux et aux grands versants qui se poursuivent au nord jusqu’à la frontière chinoise, elle a reçu essentiellement une occupation de vallée. L’exploitation des conifères et des ressources hydrauliques avait été menée par les Japonais sur une vaste échelle, et cet effort a été poursuivi. Le million d’habitants qui peuple cette région se compose surtout de pionniers, cultivateurs de céréales, chasseurs. Au total, la densité globale demeure faible, et c’est le secteur du moyen Ya-lu qui paraît le mieux mis en valeur actuellement.