Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

alcools et dérivés fonctionnels (suite)

L’alcool éthylique est un liquide volatil, incolore, presque inodore quand il est pur. Il est miscible à l’eau en toutes proportions et dissout beaucoup de composés organiques ou minéraux. Le mélange alcool-eau présente le phénomène d’azéotropie : la courbe des points d’ébullition sous 760 mm de mercure passe par un minimum de 78,15 °C pour 97,1 p. 100 d’alcool. C’est pourquoi il est impossible d’obtenir par distillation simple de l’alcool à 100 p. 100, ou alcool absolu. Le mélange avec l’eau se fait avec un dégagement de chaleur et une contraction de volume qui peut atteindre jusqu’à 4 p. 100.

La composition des mélanges d’alcool et d’eau est déterminée de façon courante par densimétrie. L’alcoométrie légale française (loi de juillet 1881) est celle de Gay-Lussac*. Le degré alcoométrique Gay-Lussac est mesuré à l’aide d’un aréomètre dont la tige est graduée en volume d’alcool pur pour 100 volumes du mélange à 15 °C. La « force réelle » indique le volume d’alcool pur contenu dans 100 volumes de spiritueux à 15 °C. La « richesse alcoolique » indique le volume d’alcool pur (supposé mesuré à 15 °C) pour 100 volumes du mélange à une température déterminée. Bien que ces deux notions de « force réelle » et de « richesse alcoolique » soient relativement voisines (elles coïncident si le mélange est à 15 °C), il est nécessaire d’en tenir compte pour éviter les erreurs dues au fort coefficient de dilatation des mélanges hydroalcooliques.

En ce qui concerne les propriétés chimiques, l’oxydation totale de l’alcool par combustion s’écrit

L’oxydation par voie chimique peut s’effectuer en deux temps, puisque c’est un alcool primaire ; on obtient :

Traité par l’acide sulfurique concentré, l’alcool donne de l’éther ou de l’éthylène, suivant les conditions et les catalyseurs employés. Cette propriété est utilisée industriellement.

Avec les acides organiques ou minéraux, l’alcool donne des esters suivant une réaction d’équilibre. Par exemple, avec l’acide acétique :

Par l’action de l’acide nitrique, en présence d’un métal du groupe de l’argent, on fabrique les fulminates qui sont les amorces utilisées en pyrotechnie. L’alcool peut être préparé soit par fermentation et distillation de matières glucidiques, soit par synthèse chimique.


Fabrication de l’alcool par fermentation

Plusieurs micro-organismes sont capables de donner de l’alcool éthylique par fermentation à partir de matières glucidiques. Les levures, particulièrement les saccharomycès, sont utilisées industriellement dans ce but par les distilleries. D’après les travaux de Pasteur, les levures produisent à partir de 100 kg de saccharose, qui représentent 105,26 kg de sucre inverti, 51,11 kg d’alcool (soit 64,33 litres), 49,32 kg de gaz carbonique, 3,16 kg de glycérine et divers autres sous-produits.

En fait, industriellement, un rendement pratique en alcool de 60 à 62 litres pour 100 kg de sucre est considéré comme satisfaisant.

De très nombreux auteurs ont étudié, depuis Pasteur, la théorie de la fermentation alcoolique ainsi que la formation des produits secondaires.

L’amidon et la cellulose doivent être hydrolysés en sucres fermentescibles. Certains micro-organismes, comme les mucors, sont cependant capables de fermenter directement l’amidon pour donner de l’alcool.

• À partir de matières premières sucrées. La betterave à sucre est très utilisée en France. Les fruits sucrés tels que pommes, poires, prunes, cerises, raisins, etc., de même que les sous-produits de la cidrerie ou de la vinification (marcs, lies) permettent également de fabriquer de grandes quantités d’alcool ou d’eaux-de-vie. Les mélasses de sucrerie sont mises en œuvre, souvent à très grande échelle et dans le monde entier, pour produire de l’alcool industriel. Les mélasses de canne à sucre, comme la canne à sucre elle-même, peuvent donner également du rhum.

De très nombreuses plantes sucrées ou pouvant donner facilement du sucre par hydrolyse ont été ou peuvent être utilisées : le sorgho (Italie, Algérie, Japon), le maïs vert, les feuilles d’agave (Mexique), les cosses de pois (Italie), le topinambour (France), etc. Il en est de même des fruits secs (raisins, figues, caroubes, etc.).

De façon artisanale, on se contente, dans la plupart des cas, de fouler ou de broyer la matière sucrée pour confectionner le moût qui sera soumis à la fermentation alcoolique. Ce moût contient souvent les levures nécessaires et la fermentation démarre spontanément (cas des fruits).

Industriellement, on préfère extraire le sucre sous forme d’un jus sucré, sans matière en suspension. Pour cela, on utilise soit la diffusion (betteraves), soit la lixiviation méthodique au moyen de presses, de tamis, de macérateurs, etc.

Il convient de rectifier, si nécessaire, l’acidité, le pH, la température, la richesse en sucre du moût ou du jus obtenu pour favoriser l’action des levures. Si la matière sucrée n’apporte pas naturellement des levures dans le moût, ou si celles-ci ont été tuées par le traitement d’extraction, il convient d’ensemencer le milieu. On choisit alors une souche sélectionnée pour son bon rendement en alcool, sa résistance au traitement industriel ou la valeur organoleptique des sous-produits qu’elle forme. Il est nécessaire d’apporter des éléments nutritifs pour la levure si le milieu n’en contient pas suffisamment.

L’addition d’acide est dans certains cas utile pour donner au jus l’acidité suffisante qui favorisera l’action des levures et les protégera de ferments parasites (betteraves, mélasses). La fermentation s’effectue dans des cuves en bois, en ciment ou en acier (surtout dans les usines importantes). Certaines de ces cuves dépassent 1 000 hl de capacité. Dans la production d’alcool industriel, on recherche des fermentations rapides pour utiliser rentablement le volume de la cuverie et augmenter la production. On arrive à fermenter complètement un vin titrant de 6 à 9° en 20 à 30 heures. Pour cela, on confectionne des levains abondants et vigoureux et on maintient une température assez élevée (30 à 35 °C). D’autres fois, on fait durer la fermentation plus longtemps en travaillant à plus basse température, ce qui peut améliorer le rendement ou la valeur organoleptique du produit. Tout au long de la fermentation, il faut éviter la prolifération de ferments indésirables (lactiques surtout) en surveillant les divers paramètres de marche : acidité, température, vitesse, propreté du matériel, etc.

Le vin alcoolique obtenu après fermentation titre de 3 à 10° d’alcool, suivant la matière première utilisée et la méthode de fabrication.

• À partir de matières premières amylacées. Les matières amylacées, c’est-à-dire qui contiennent de l’amidon, donnent, par hydrolyse, des moûts sucrés fermentescibles par les levures.

Les grains, en général, sont très utilisés et produisent de grandes quantités d’alcool : le blé (pays de l’Est), le maïs (États-Unis), le riz (Extrême-Orient). Le seigle mélangé à d’autres grains sert à préparer les whiskies.