Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

connaissance (sociologie de la) (suite)

L’une des tâches les plus délicates que poursuivent ces recherches est de préciser la nature des rapports entre le type de connaissance et le support social privilégié. En bien des cas apparaissent des rapports d’homologie entre une structure sociale et la structure d’une croyance : un récit mythique peut être clairement organisé conformément à la répartition des tribus dans une société traditionnelle. Mais ce modèle s’avère souvent insuffisant : un groupe peut, au contraire, s’attacher à une idéologie qui tend à obscurcir les conflits réels ou qui présente un modèle inversé de sa réalité. Dans cette recherche, les modèles d’explication édifiés par la psychanalyse peuvent apporter une contribution positive : il se peut qu’entre le groupe et son discours apparaissent des rapports de sublimation, de refoulement ou de dénégation, familiers à la démarche psychanalytique.

Ces analyses permettent de comprendre les fonctions essentielles que remplissent les différentes connaissances dans la vie sociale et soulignent combien ces fonctions sont diverses : un mythe peut jouer un rôle intégrateur, mais un autre peut servir à justifier des revendications et participer à la réévaluation du groupe par lui-même. Une religion peut renforcer la soumission des groupes subordonnés, mais une autre peut fournir des motivations psychologiques pour une entreprise séculière. Une idéologie politique peut exalter les énergies et, simultanément, dissimuler les nouvelles contraintes qu’elle tend à établir.

Au sein des sciences sociales, la sociologie de la connaissance joue un rôle critique indispensable. Elle permet à la recherche sociologique de s’interroger sur ses propres conditionnements et donc sur sa propre validité ; elle oblige à reconsidérer les concepts employés, le choix des méthodes, les objectifs retenus ; elle permet ainsi un contrôle incessant de la pratique scientifique.

P. A.

➙ Gurvitch (G.).

 F. Bacon, Essais de morale et de politique (1597). / Condorcet, Esquisse d’un tableau historique des progrès de l’esprit humain (1794). / M. Scheler, Die Wissenformen und die Gesellschaft (Leipzig, 1926). / K. Mannheim, Ideologie und Utopie (Bonn, 1929). / P. A. Sorokin, Social and Cultural Dynamics (New York, 1937 ; 3 vol.). / F. Znaniecki, The Social Role of the Man of Knowledge (New York, 1940). / G. Gurvitch, les Cadres sociaux de la connaissance (P. U. F., 1966). / Contributions à la sociologie de la connaissance (Anthropos, 1968).

Connecticut

État du nord-est des États-Unis ; 13 000 km2 (le Connecticut est un des plus petits États, après le Rhode Island et le Delaware) ; 3 032 000 habitants (densité de 232 hab. au km2). Capit. Hartford.


Le Connecticut occupe la partie méridionale du socle de Nouvelle-Angleterre, incliné vers le sud. Aussi les reliefs, terminaison des montagnes Blanches et des monts du New Hampshire, qui atteignent encore 600 à 700 m dans le nord de l’État, se réduisent-ils dans le sud à de modestes collines avant de plonger sous le détroit de Long Island. Ils sont séparés par des vallées d’orientation méridienne, dont les terrasses étendues et les sols alluviaux furent recherchés par les premiers colons. La plus importante traverse l’État du nord au sud jusqu’à la mer ; large de 20 à 30 km à l’amont, de 5 à 10 à l’aval, elle a été formée par le Connecticut (fleuve de 650 km de longueur, né près de la frontière canadienne), qui ne draine que la partie nord de l’État car il la quitte en aval de Hartford et s’encaisse selon un nouveau tracé imposé par les épisodes glaciaires et postglaciaires.

Morceau de Nouvelle-Angleterre, le Connecticut occupe cependant une place à part dans ce groupe d’États, notamment parmi ceux du Sud, les plus industrialisés. Grâce à une structure industrielle moins orientée vers le textile que celle du Rhode Island et du Massachusetts, les effets des crises ont été relativement amortis : moins d’interruptions dans le développement industriel, moins de problèmes de conversion. En outre, le Connecticut est situé au cœur de la Megalopolis atlantique et non à l’une de ses extrémités, comme Providence et Boston : le sud-ouest du Connecticut (Bridgeport, Stratford) est depuis quelques années dans l’orbite de New York ; New Haven et même Hartford y entrent aujourd’hui (autoroutes Boston - New York par New Haven, Springfield - New York par Hartford). Cette situation avantageuse se traduit dans le lait que la population de l’État s’est accrue de 20 p. 100 entre 1960 et 1970 (10 p. 100 dans le Massachusetts).

L’industrie résulte plus de l’accroissement d’un héritage historique que de l’exploitation de matières premières ou énergétiques locales ; si l’on a jadis utilisé la force des eaux courantes et la laine du troupeau indigène, on a tôt fait appel aux importations ; de même, aujourd’hui, presque toute l’électricité et la totalité des matières premières viennent des autres États. Les premières industries, à la fin du xviiie s., reposaient surtout sur le travail des métaux et alliages non ferreux (métaux précieux, cuivre, étain, bronze), sur les produits métalliques très élaborés (horloges, argenterie, ustensiles domestiques) et, accessoirement, sur la fabrication du papier et la filature de la laine. Ces activités artisanales se transformèrent en industries modernes durant la seconde moitié du xixe s. Aux produits traditionnels en cuivre, bronze, étain s’ajoutent les machines, ressorts, outils, roulements à billes, puis les instruments de mesure et de précision, les machines à écrire. On s’est mis ensuite à la fabrication des machines et des équipements électriques et, depuis la dernière guerre, à celle des avions et pièces d’avion et du matériel électronique.

Le Connecticut rassemble une pléiade de villes industrielles. Waterbury et Meriden restent fidèles au travail du cuivre, Bristol et New Britain fabriquent des roulements à billes, de la quincaillerie, de l’outillage, Stratford et West Hartford des avions et des pièces et équipements pour avions ; Hartford possède des industries variées, notamment les branches utilisatrices de métaux, des machines à écrire et appareils de mesure aux avions. New Haven, au centre d’un corridor industriel, est surtout une ville universitaire (Yale a été fondée en 1701 ; elle possède la plus importante bibliothèque universitaire des États-Unis après celle de Harvard). Hartford et ses satellites (West Hartford, New Britain) forment une agglomération de 780 000 habitants ; la plupart des autres villes ont de 100 000 à 150 000 habitants. Le phénomène général de l’émigration des Noirs vers les centres industriels du Nord se produit dans le Connecticut, où New Haven et Hartford (ville proprement dite) en comptent 15 p. 100. Le taux de population urbaine de l’État atteint 80 p. 100 (Massachusetts : 83 ; Rhode Island : 87).