Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Confédération germanique

En allem. Deutscher Bund, union politique qui groupa les États allemands de 1815 à 1866.


L’historiographie nationale a magnifié la vague patriotique qui souleva Fichte dès 1807 contre la domination française et poussa les « croisés » de 1813 vers la liberté et l’unité de l’Allemagne. En réalité, la Confédération* du Rhin une fois dissoute, les patriotes eux-mêmes hésitèrent, aussi bien un Stein, dépourvu — comme l’a montré Wilhelm Mommsen — d’une conception unitaire du Reich, qu’un Humboldt, incapable de prévoir autre chose qu’une certaine communauté dans quelques secteurs de la vie politique. C’est pourquoi l’Allemagne nouvelle fut bâtie dans des négociations menées entre princes allemands et gouvernements européens, à partir de l’accord par lequel, dès octobre 1813, l’Autriche avait promis à la Bavière le respect de sa souveraineté.


La mise en place

Ici comme ailleurs, Metternich fait d’abord triompher le principe d’équilibre. Voyant l’intérêt de la simplification opérée par Napoléon dans la carte politique de l’Allemagne, il la conserve : la Confédération germanique, créée par l’Acte de Vienne du 9 juin 1815, englobe trente-quatre États et quatre villes libres. Mais il s’agit d’une façade, non d’une construction véritable. Si le préambule annonce une alliance qui garantira « la sécurité et l’indépendance de l’Allemagne », l’Acte lui-même n’assure ni direction ni coopération. En effet, l’empereur d’Autriche ne sera que le président de la Confédération, et la Diète, à Francfort, ne sera qu’une conférence d’ambassadeurs sans pleins pouvoirs et ne pouvant se prononcer sur les affaires importantes qu’à une majorité des deux tiers ou même à l’unanimité. Système complexe, archaïque que celui du mécanisme de vote : les questions ordinaires seront réglées à la majorité simple des dix-sept voix à émettre (dont une par chacun des six royaumes), et les questions relatives aux institutions et aux droits fondamentaux seront soumises à la règle des deux tiers, voire de l’unanimité dans une Diète disposant alors de soixante-neuf voix (dont quatre pour chacun des six royaumes).

L’hétérogénéité des membres de la Confédération reflète, elle aussi, des anachronismes : à côté de six royaumes (Autriche, Prusse, Bavière, Wurtemberg, Saxe, Hanovre), un électorat sans attributions électorales (Hesse-Darmstadt, Kurhessen), deux douzaines de duchés et de principautés, quatre villes libres (Brême, Hambourg, Lübeck, Francfort). En outre l’exclusion de la Prusse-Orientale et de la Prusse-Occidentale et, en sens contraire, l’inclusion du souverain du Danemark en tant que duc de Holstein et de Lauenburg, de celui des Pays-Bas en tant que duc de Luxembourg et de Limbourg, de celui de Grande-Bretagne en tant que roi de Hanovre expriment le dédain du sentiment national naissant.

Parce que la situation internationale a contraint à brusquer une rédaction du reste laborieuse, le Pacte fédéral comporte de graves lacunes : la première affaire de la Diète, dit un article, sera la mise au point de lois fondamentales et d’institutions concernant les relations extérieures, l’armée, les rapports internes. Mais l’article suivant stipule qu’en tout état de cause la souveraineté des membres leur garantira le droit de conclure des alliances de toute espèce, sous la réserve qu’elles ne seront pas dirigées contre la sécurité de la Confédération ou d’un « confédéré ». Finalement, ce « traité-cadre » ne recevra qu’en 1820 un complément qui précise simplement le mécanisme constitutionnel, sans stipuler autre chose, dans le domaine militaire, que le droit (et non le devoir) des États de fournir en cas de guerre un contingent supplémentaire.

Les États de la Confédération germanique ont, par conséquent, contracté des obligations peu contraignantes. Ils vivront chacun pour soi, dans sa propre armature sociale, économique, administrative, politique et militaire.

Napoléon avait imposé, à partir de l’Acte de Paris (1806), une « solution française » au problème de l’Allemagne. Metternich a dicté une « solution autrichienne » : d’emblée, en effet, le Habsbourg, qui n’est pourtant que le président, exerce une prépondérance de fait dans la Confédération grâce au prestige de son chancelier d’Autriche, à la communauté d’intérêts liant tous les États attachés au statu quo et aussi à la politique prussienne de « dualisme pacifique », respectueuse de l’influence générale de l’Autriche et de sa prépondérance en Allemagne du Sud. Le cas échéant, la Russie autocratique fera entendre sa voix dans ces cours allemandes, dont Stein a dit brutalement qu’elles constituaient ses « haras »... Dans ces conditions, le système germanique est voué à l’immobilisme, à l’extérieur comme à l’intérieur.


La période tranquille

Metternich vieillissant et découragé a résumé l’histoire de la Confédération jusqu’au milieu du siècle dans une formule lapidaire : « Trois dangers devaient menacer la stabilité de la Confédération : les ambitions politiques des princes régnant sur les États secondaires, la rivalité entre l’Autriche et la Prusse, les mouvements libéraux et révolutionnaires. » En fait, ces « dangers » ne se sont pas manifestés simultanément, et surtout ils ont conservé, jusqu’en 1830 et au-delà, un caractère éphémère ou local.

Dans les premières années, dès que se dessine une agitation, principalement dans les universités, les gouvernements autrichien et prussien n’ont pas de peine à s’entendre pour élaborer plusieurs projets de loi (sur l’université, sur la presse, sur l’ordre public), que Johann Rudolf Buol-Schauenstein (1763-1834) fait adopter en quatre jours par la Diète (sept. 1819). De là date la fameuse commission d’enquête de Mayence. Il est vrai que des réserves sont formulées dès 1820 de la part des États secondaires, et d’abord de Munich. L’empereur-président doit sermonner et même menacer le roi de Bavière Maximilien Joseph : « On dit à Votre Majesté que sa souveraineté peut être compromise par les mesures auxquelles elle a consenti », en réalité, seuls les « factieux » la mettent en cause et François II se refuse à imaginer « des gouvernements complices des désorganisateurs ».

À cette politique austro-prussienne, le délégué du Wurtemberg, Karl August von Wangenheim (1773-1850), tente de s’opposer, obtenant un jour un vœu de la Diète hostile à la commission de Mayence, mais son rappel (juill. 1823), exigé par Vienne, préface une « épuration de la Diète » et la prorogation des mesures fédérales de surveillance (1824).