Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

composition (suite)

La casse

Le casier dans lequel le compositeur manuel range les caractères, ou casse, n’a guère changé depuis des siècles ; dans ses compartiments, ou cassetins, sont répartis l’ensemble des caractères d’une même sorte et d’un même corps, bas de casse, capitales, chiffres, signes, constituant une police. Le poste de travail est un rang, ou meuble à tiroirs contenant les casses, à rayonnages contenant les blancs, et sur lequel le compositeur place la casse dont il va se servir. Un œil sur la copie, le composteur dans la main gauche, il prend les caractères un par un dans la casse avec la main droite, les aligne dans le composteur, justifie la ligne à la longueur désirée en plaçant des espaces et en coupant s’il y a lieu le dernier mot. Quand le composteur est plein, il le vide en posant son contenu sur une galée, plaque de bois ou de zinc. Il obtient sur la galée des paquets de textes, ligaturés traditionnellement par une ficelle. Un texte composé peut être aligné à gauche et à droite (composition en bloc), ou centré, ou aligné à gauche seulement (composition en drapeau). La longueur des lignes est appelée justification.


Composition mécanique

Jusqu’à la fin du xixe s., la composition était restée, malgré quelques améliorations de détail, ce qu’elle était du temps de Gutenberg. Les presses à imprimer mécaniques permettant une grande production pour l’époque, il fallait accélérer le travail lent et fastidieux, pour les livres, du typo. On avait bien déjà juxtaposé en un même caractère, ou logotype, plusieurs lettres. Certains logotypes sont encore en service : fi, ff ; d’autres, tels que aient, rent, ont été abandonnés, car ils compliquaient par trop les casses. Les premières machines à composer assemblaient des caractères mobiles. Une réalisation franco-anglaise, la Pianotype de Young et Delambre, était utilisée pratiquement vers 1845 avec des résultats acceptables. La machine de Thorne, en 1889, avait une production de 7 000 caractères à l’heure, et 2 000 exemplaires en étaient déjà vendus lorsque, quelques années plus tard, apparurent les machines assemblant des matrices et justifiant la ligne par la commande d’un clavier, puis coulant automatiquement les caractères. Ces machines, les composeuses mécaniques actuelles, sont de deux types :
1o celle qui produit des caractères séparés comme ceux de la composition manuelle : la Monotype ;
2o celles qui produisent des lignes-blocs, plaquettes de métal où tous les caractères sont solidaires les uns des autres : Linotype, Intertype, Typograph, etc.

• Monotype. Cette machine a été imaginée par l’avocat américain Tolbert Lanston (1844-1903), qui, après avoir pris ses premiers brevets en 1887, mit au point son modèle définitif en 1899. L’ensemble Monotype se compose de deux machines distinctes, le clavier et la fondeuse, le lien entre les deux étant une bande perforée à 32 canaux. Le clavier, qui possède plus de 300 touches, traduit en perforations codées sur la bande tous les mouvements que devra exécuter automatiquement la fondeuse. Sur celle-ci, les matrices sont des petits blocs de bronze de 5 × 5 mm portant en bout l’empreinte en creux du caractère ; elles sont assemblées dans un châssis qui, dans les modèles récents, en contient jusqu’à 272, soit cinq polices d’un même corps. Les caractères coulés, éjectés du moule, viennent se ranger automatiquement dans une galée. La bande perforée peut être conservée et resservir. Très souple, la composition monotype convient particulièrement aux ouvrages scientifiques, aux tableaux ; elle fournit également des séries de caractères servant à garnir les casses de la composition manuelle.

• Machines lignes-blocs. Les principales sont la Linotype et l’Intertype.

La Linotype, inventée aux États-Unis par l’horloger allemand Ottmar Mergenthaler (1854-1899), y fonctionna en 1886.
1o Les organes de composition sont constitués par des plaquettes de cuivre sur la tranche desquelles les caractères sont gravés en creux. Elles sont classées dans les canaux d’une boîte plate en métal, ou magasin. Les 90 touches d’un clavier, ressemblant à celui d’une machine à écrire, sont reliées aux 90 canaux du magasin et commandent directement la descente des matrices. Celles-ci viennent s’assembler dans un composteur ; des coins en acier, les espaces-bandes, viennent s’insérer entre les mots pour justifier la ligne.
2o Les organes de fonte comprennent un moule devant lequel la ligne des matrices est menée par l’élévateur. Ses dimensions intérieures, correspondant à la longueur et au corps de la ligne à fondre, sont réglées par des cales. Derrière se trouve le creuset contenant le métal fondu, qu’un piston envoie dans le moule. La ligne coulée est refroidie, rabotée sur ses faces au moment de son éjection du moule et rangée sur une galée.
3o Les organes de distribution remontent vers le distributeur les matrices qui viennent de servir. Une vis sans fin entraîne celles-ci et les libère au-dessus de leur canal du magasin ; un système de crantage sur le profil des matrices assure leur distribution sélective.

L’Intertype, créée en 1913 aux États-Unis par les Américains Ridder et Scudder, ressemble à la Linotype, et ses fonctions sont les mêmes. Sa particularité pour l’époque était une standardisation permettant à l’utilisateur de la compléter par de nouveaux magasins et de nouveaux moules.

La composition lignes-blocs convient pour les travaux de presse et de labeur comportant beaucoup de lignes de même longueur ; les lignes sont robustes, faciles à manipuler. La commande automatique du clavier par bande perforée lui a donné un nouvel essor. Certaines machines composent, également en métal, les titres gros corps (Ludlow), les filets (Elrod), les lingots.


Composition froide


Composition sans plomb

L’intérêt accru que présente la composition sans plomb, ou composition froide, est dû à diverses raisons : l’offset et l’héliogravure n’ont pas besoin de caractères en métal, mais seulement d’images de caractères pour la reproduction ; les solutions mécaniques, si parfaites soient-elles, paraissent démodées par rapport aux solutions électroniques ; on recherche de plus en plus des solutions alliant rapidité et bon marché de composition ; la composition en plomb est lourde et encombrante.