Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

coloniales (troupes) (suite)

Dans l’armée française, les troupes coloniales, dénommées troupes d’outre-mer en 1958, reprirent en 1961 leur appellation traditionnelle de troupes de marine, constituées, depuis 1967, en une arme au sein de l’armée de terre. Leur rôle consiste, dans le cadre d’accords d’assistance technique, à aider la formation des armées nationales africaines ainsi qu’à remplir les missions que les États africains demandent encore à la France en exécution d’accords de défense. Les troupes de marine, dont les fantassins sont familièrement appelés marsouins, et les artilleurs, bigors, conservent comme insigne l’ancre d’or apparue sur leur drapeau dès 1772. Leur fête traditionnelle commémore chaque année le combat de Bazeilles (1er sept. 1870) où s’illustra, par son sacrifice, la division de marine du général J. de Vassoigne (1811-1891).

L’armée française d’Afrique

Cette expression traditionnelle et non « réglementaire » a désigné l’ensemble des corps particuliers créés pour la plupart à l’occasion de la campagne d’Algérie entre 1830 et 1841. À la différence des troupes de marine — dont elle n’a jamais fait partie —, l’armée d’Afrique, bien que basée et stationnée surtout en Afrique du Nord, a toujours été intégrée à l’armée métropolitaine.

• Les zouaves furent formés dès 1831 à partir de volontaires de la tribu des Zwawas, incorporés jusqu’alors dans l’armée ottomane et qui offrirent leurs services à la France. Réunis en régiments d’infanterie, ils devinrent, après la création des tirailleurs, des unités à recrutement exclusivement européen qui combattirent en Crimée et pendant les deux guerres mondiales.

• La Légion étrangère a été créée en 1831 (v. légion).

• Les chasseurs d’Afrique, issus des escadrons de zouaves, furent constitués en corps organique de cavalerie dès novembre 1831. Ils comprenaient 5 régiments en 1938 (dont un en Tunisie).

• Les spahis, composés uniquement de volontaires autochtones, se détachèrent en 1834 des chasseurs d’Afrique pour former en 1841 une subdivision d’armes. Ils constituèrent 6 régiments (dont un tunisien et un marocain) en 1914-1918 et 3 brigades en 1940.

• Les tirailleurs algériens, issus des compagnies autochtones de zouaves, furent constitués en corps de troupes par l’ordonnance du 7 décembre 1841. C’est en Crimée qu’ils reçurent l’appellation familière de turcos. Aux trois régiments de tirailleurs algériens s’ajoutèrent, après l’établissement de la France en Tunisie et au Maroc, les tirailleurs tunisiens, puis les tirailleurs marocains. Leurs unités se battirent héroïquement au service de la France pendant les deux guerres mondiales ; elles constituèrent en 1943-44 le gros des effectifs d’infanterie du corps expéditionnaire français d’Italie du général Juin*, puis de la Ire armée française du général de Lattre*.

• Les goums furent des unités supplétives recrutées au Maroc à partir de 1908. Encadrées par les Français et les Marocains, elles comptèrent toujours parmi les forces chérifiennes. Réunis en tabors, 22 000 goumiers s’illustrèrent en Italie et en France en 1944-45. Lors de l’indépendance du Maroc, les goums ont largement contribué à la formation de l’armée royale marocaine (1956).

Tous ces corps, dont de nombreuses unités participèrent à la campagne d’Indochine (1945-1954), furent dissous, à l’exception de la Légion, entre 1955 et 1965.


Les forces britanniques outre-mer

Étant donné l’importance vitale de ses intérêts outre-mer, la Grande-Bretagne a constamment fait porter son effort militaire sur la sauvegarde de ses positions extérieures. Dès le xviiie s., plus de la moitié de l’armée est stationnée dans les colonies. Elle y joue le rôle d’une force de police et, au xixe s., concourt efficacement à l’édification des grandes bases qui jalonnent les lignes de communication de l’Empire, tandis que ses cadres aident la formation des armées nationales des dominions. Ainsi, sauf aux Indes, qui connurent un statut militaire particulier, les forces stationnées à l’extérieur furent beaucoup plus que pour la France intégrées à l’ensemble du dispositif impérial de défense. Toutes les forces métropolitaines étant appelées à participer à cette mission coloniale, on aboutit à un système, organisé en 1881, qui inscrivait cette mission dans la structure même des régiments, dont les bataillons étaient stationnés par roulement de deux ans, l’un en Angleterre, l’autre outre-mer. En 1900, sur une armée de 250 000 hommes, 120 000 servaient à l’extérieur. Cette proportion a été souvent plus accentuée encore, mais, à la suite du « repli impérial » intervenu depuis 1945, les effectifs stationnés outre-mer (Moyen- et Extrême-Orient) ont été réduits au strict minimum. En dehors de quelques éléments subsistant dans les derniers protectorats et colonies britanniques, la seule formation de l’armée anglaise encore recrutée outre-mer est la brigade de fusiliers gurkhas. Organisée en 8 bataillons, levée au Népal dans le cadre d’un accord tripartite de 1948 entre la Grande-Bretagne, ce pays et l’Inde, la Gurkhas Rifles Brigade peut être engagée sur tous les théâtres possibles par le commandement britannique.


Armée des Indes

À la fin du xviiie s., les troupes des Indes comprenaient les gardes des princes, des unités régulières anglaises et les formations européennes et autochtones appartenant à la Compagnie des Indes. Cette dernière possédait vers 1830 vingt régiments de cavalerie et plus de 150 d’infanterie, recrutés parmi les populations autochtones (notamment les Gurkhas). Après la terrible révolte des cipayes (1857), ce système militaire fut réorganisé par la création de l’armée des Indes, dépendant désormais de l’India Office de Londres et dont le chef relevait directement du vice-roi. Au début du xxe s., elle comptait 236 000 hommes, dont 75 000 Britanniques répartis en 5 corps d’armée, auxquels s’ajoutaient environ 40 000 hommes de milices encore placés sous l’autorité des princes. Ces forces furent largement engagées par les Britanniques au cours des deux guerres mondiales. En 1947, la fin de l’Empire entraîna le partage de l’armée des Indes à raison d’un tiers pour le Pākistān, où furent regroupées toutes les unités de confession musulmane, et de deux tiers pour l’Inde. L’influence britannique demeura importante dans ces deux nouvelles armées nationales, tant par la langue anglaise, qui est la seule à être comprise de tous, que par le maintien de traditions militaires d’inspiration anglaise.