Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Cœlentérés (suite)

Caractères généraux

Sous une étonnante diversité morphologique, les Cnidaires cachent une structure fondamentale relativement simple, qui les a fait placer, avec les Spongiaires, tout au bas de l’échelle des Métazoaires ; ce caractère primitif est corroboré par l’ancienneté du groupe, dont on trouve, dès l’Archéen, de nombreux représentants. Chez chaque individu, le corps affecte la forme d’un sac, dont la paroi est constituée de deux feuillets cellulaires, l’ectoderme et l’endoderme ; l’ectoderme renferme des cellules caractéristiques (cnidoblastes ou cellules urticantes) particulièrement nombreuses sur les tentacules, souvent disposés en couronne autour de la bouche. Avec une telle organisation, l’individu s’apparente à un stade embryonnaire précoce, la gastrula, dont il conserve la structure. Celle-ci peut évoluer vers deux formes, l’une fixée (Polype), l’autre nageuse (Méduse). Par ailleurs, le pouvoir de bourgeonnement, très développé chez beaucoup d’espèces, conduit à la formation de colonies flottantes (Siphonophores) ou fixes (Madrépores).

Cténaires

Longtemps réunis aux Cnidaires pour former le groupe des Cœlentérés, les Cténaires, ou Cténophores, constituent maintenant un embranchement distinct, car ils présentent un certain nombre de caractères originaux. Ce sont des animaux marins, nageurs à corps mou et fragile, fréquentant plutôt les mers chaudes. Les Cydippes (Hormiphora plumosa de Méditerranée, Pleurobrachia pileus d’Atlantique) ont un corps ovoïde de la taille d’une cerise, d’où émanent deux longs tentacules rétractiles dans une gaine ; la Ceinture de Vénus (Cestus veneris) fait onduler, dans la Méditerranée, son corps rubané, qui atteint parfois 1,5 m de longueur ; les Béroés, méditerranéens également, ont la forme d’une cloche ne dépassant pas 10 cm de haut et ne possèdent pas de tentacules. Quelques Cténaires des mers tropicales rampent avec leur corps aplati (Ctenoplana, Cœloplana).

D’une élégance certaine, le corps translucide des Cténaires pélagiques est parcouru d’irisations fugaces et manifeste une luminescence bleutée après un séjour à l’obscurité. La bouche s’ouvre et conduit à une cavité gastro-vasculaire qui émet des canaux transversaux, puis méridiens ; les tentacules ne portent pas de cnidoblastes, mais des cellules adhésives, ou colloblastes ; la nourriture consiste en petits Crustacés, en larves de Mollusques et en œufs de Poissons. Au pôle opposé de la bouche se trouve un statocyste, appareil d’équilibration. Huit palettes ciliées, disposées selon des méridiens, assurent la nage (c’est leur présence qui justifie le nom de Cténophores [du grec kteis, ktenos, peigne]) ; ce mode de locomotion n’empêche pas les animaux d’être entraînés par les courants et parfois rassemblés en bancs considérables.

Les Cténaires sont hermaphrodites ; la fécondation a lieu dans la mer ; le développement aboutit à une larve dite « cydippoïde », qui ressemble beaucoup aux Cydippes. Comme chez les Cnidaires, il se forme deux feuillets, ectoderme et endoderme, mais la mésoglée est envahie par des cellules conjonctives et par de véritables cellules musculaires : on y voit l’ébauche d’un mésoderme. On ne connaît pas de multiplication asexuée, et il n’y a jamais de colonies.

Ces animaux apparaissent ainsi nettement plus élevés en organisation que les Cnidaires ; il s’agit là de deux phylums distincts, vraisemblablement issus d’une souche commune. Les affinités que l’on a cru reconnaître entre les Cténaires rampants et les Turbellariés (Vers plats) ne sont pas assez solides pour que l’on en tire des conclusions phylogéniques.


Polype et Méduse

Une Hydre d’eau douce, une Anémone de mer nous fournissent deux exemples de Polypes. Le corps a la forme d’une colonne cylindrique charnue, adhérente au substrat par sa base élargie. À l’extrémité opposée s’ouvre l’orifice principal du corps, faisant communiquer la cavité gastro-vasculaire avec l’extérieur et servant alternativement de bouche et d’anus. Il est entouré de tentacules souples, en nombre souvent déterminé (huit chez les Octocoralliaires, six ou un multiple de six chez les Hexacoralliaires). La cavité digestive est simple chez les Hydres ; chez les Actinies et, d’une manière générale, chez les Anthozoaires, des cloisons radiales la subdivisent, tandis qu’un pharynx la relie à la bouche.

Ectoderme et endoderme, séparés par une mince lame de mésoglée, forment la paroi du sac et se prolongent dans les tentacules, dans l’axe desquels on rencontre fréquemment un diverticule de la cavité principale.

Une Méduse, forme libre et nageuse, présente schématiquement l’aspect d’une cloche gélatineuse et translucide ; les bords de l’ombrelle portent des tentacules, et la bouche s’ouvre en dessous, à l’extrémité d’un tube (manubrium) ; la cavité délimitée par l’ombrelle est souvent fermée, au moins en partie, par une membrane appelée velum. Les contractions rythmées de l’ombrelle chassent l’eau de la cavité sous-ombrellaire et provoquent la nage ; mais celle-ci n’est jamais assez vigoureuse pour résister à la force des courants, et, de ce fait, les Méduses peuvent être considérées comme des constituants du plancton, malgré la grande taille qu’atteignent certaines d’entre elles.

Les deux feuillets, ectoderme et endoderme, sont séparés par une mésoglée plus épaisse que chez les Polypes ; il en résulte un rétrécissement de la cavité gastro-vasculaire, qui se subdivise en canaux radiaires ou circulaires à l’intérieur de l’ombrelle. Les Méduses sont pourvues d’organes sensoriels à la base des tentacules : yeux et rhopalies (organes d’équilibration).

Malgré d’évidentes différences morphologiques, Polypes et Méduses correspondent au même schéma fondamental ; on a pu dire qu’une Méduse était un Polype devenu libre et inversé, la colonne cylindrique prenant l’aspect d’une cloche. Les modalités du développement qui seront envisagées plus loin montrent que, bien souvent, les Polypes et les Méduses peuvent naître d’une même souche.