Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

clarinette

Instrument de musique à vent à anche simple battante et de perce cylindrique.


Généralités

La clarinette se compose de cinq parties s’emboîtant les unes dans les autres : le corps du haut, dévolu à la main gauche, le corps du bas, apanage de la main droite, le pavillon, le barillet et le bec, sur la « table » duquel se fixe l’anche. Le son est produit par la mise en vibration de cette dernière sous l’effet du souffle de l’instrumentiste, vibration qui se communique à la colonne d’air contenue dans le tube de l’instrument. Les divers sons de l’échelle musicale sont obtenus par l’ouverture ou l’obturation des trous percés dans le tube. L’échelle sonore de la clarinette se divise en cinq parties : le chalumeau, le médium, le clairon, l’aigu et le suraigu.

La musique destinée à la clarinette se note en clé de sol.


Historique

Les ancêtres de cet instrument de musique se trouvent en Égypte dès le début du IIIe millénaire. C’est en cherchant à accroître l’étendue du chalumeau que le Nurembergeois Johann Christoph Denner en fit vers 1690 un instrument nouveau, auquel il donna le nom de clarinette (petite trompette). Il le munit d’un pavillon et de deux clés, auxquelles six autres vinrent progressivement s’adjoindre entre 1760 et 1800. Depuis, les principales étapes de l’évolution de l’instrument sont l’innovation, par Ivan Müller en 1812, d’une clarinette à treize clés et l’application, par Hyacinthe Klosé en 1843, du système inventé par Theobald Böhm pour la flûte. La clarinette paraît avoir commencé sa carrière vers 1716. Johann Melchior Molter (1747), Franz Xaver Pokorny et Carl Stamitz écrivirent les premiers concertos pour clarinette, suivis par Mozart, qui consacra également à l’instrument un quintette avec cordes. Avec Beethoven, la clarinette devient membre permanent de l’orchestre. Les maîtres romantiques (Weber, Schumann, Brahms) lui dédient diverses œuvres. Plus abondant encore est l’apport des modernes (Saint-Saëns, Debussy, Strauss, Hindemith, Bartók, Milhaud, Poulenc, Messiaen, Dutilleux).


Une famille nombreuse

La famille des clarinettes ne comporte pas moins de treize membres : les petites clarinettes en la bémol, mi bémol et  ; les grandes clarinettes en ut, si bémol et la ; les clarinettes alto (ou cor de basset) en fa et mi bémol ; les clarinettes basses en si bémol et la ; les clarinettes contralto en fa et mi bémol ; la clarinette contrebasse en si bémol. L’étendue de la clarinette varie, selon les modèles, entre trois octaves et une tierce, et trois octaves et une sixte.

G. G.

 M. Mimart, « la Clarinette », dans Encyclopédie de la musique, sous la dir. de A. Lavignac et L. de La Laurencie, 2e partie, t. II (Delagrave, 1927). / F. G. Rendall, The Clarinet (Londres, 1963). / O. Kroll, Die Klarinette (Kassel, 1965). / G. Gourdet, les Instruments à vent (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1967).


Les clarinettistes de jazz

La clarinette soprano (en si bémol) fut dès 1895 l’instrument favori des mulâtres de La Nouvelle-Orléans ; ce choix semble avoir été dicté par l’importance traditionnelle de la clarinette dans la musique française. Les premiers virtuoses portaient d’ailleurs des noms d’origine française : Alphonse Picou, Sidney Bechet, Albert Nicholas, Barney Bigard, Omer Simeon. Citons aussi des précurseurs tels que Lorenzo Tio, George Lewis et les Blancs « Big Eye » Louis Nelson, Yellow Nunez et Larry Shields. Aussi bien dans les fanfares que dans les petits orchestres, la clarinette était, aux côtés de la trompette et du trombone, la troisième voix des improvisations collectives au cours des années 20. Si elle ne joua, la plupart du temps, qu’un rôle de contre-chant, c’est essentiellement à cause de son timbre, de sa puissance et de la fluidité de son phrasé.


Les ancêtres

Dans les années 20, trois noms s’imposèrent : Jimmie Noone, dont le style, fluide et véloce, n’excluait pas une sonorité ample ; Johnny Dodds, spécialiste des registres graves et compagnon de King Oliver et d’Armstrong ; Sidney Bechet, dont le jeu reste exemplaire à force de perfection technique et de charme. Parmi les musiciens blancs, Leon Rappolo fut populaire au sein des « New Orleans Rhythm Kings ». Ce fut ensuite l’ère des jazzmen de Chicago : Frank Teschemacher, Mezz Mezzrow, Jimmy Dorsey, Pee Wee Russell (qui jouait dans le registre le plus grave avec une fort peu orthodoxe notion du rapport souffle-son, dont Jimmy Giuffre, à la fin des années 50, allait faire la base de son style).

En vogue de 1925 à 1930, le style dixieland à la clarinette réapparut sous la forme du New Orleans Revival à partir de 1940 et fut pratiqué par un grand nombre de jeunes musiciens blancs, notamment Acker Bilk, Claude Luter, Maxim Saury, Bob Wilber.


La guerre des anches

Lorsque les premiers grands orchestres apparurent, le clarinettiste, en général également saxophoniste, se maintint dans la section des instruments à anche. En dehors de quelques trios de clarinettes dans les arrangements de Fletcher Henderson et Duke Ellington à la fin des années 20, peu à peu le saxophone allait évincer la clarinette dans les orchestrations. En revanche, les clarinettistes des années 30 allaient s’adapter aux styles du « middle jazz », substituant au jeu collectif l’improvisation en solo. La technique, voire la virtuosité devinrent pour nombre d’entre eux l’objectif essentiel. Outre un grand nombre de saxophonistes capables d’improviser à la clarinette (Benny Carter, Cecil Scott, Hershell Evans, Russell Procope, Harry Carney et Lester Young), les plus remarquables spécialistes furent Barney Bigard, Buster Bailey et Edmund Hall pour les Noirs, Jimmy Dorsey, Benny Goodman, Artie Shaw, Peanuts Hucko et Woody Herman pour les Blancs, la popularité de ces derniers restant indissociable de celle des grands orchestres dont ils firent partie ou qu’ils dirigèrent. L’instrument était alors essentiel pour le « son » des grands ensembles de danse des années du « swing craze » à la fin des années 30. Il fut aussi choisi, en France, par Django Reinhardt, lorsque ce dernier, après le départ du violoniste Stéphane Grappelly, reconstitua le quintette du Hot Club de France en faisant appel au clarinettiste Hubert Rostaing.